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Author Topic: Mgr. de Castro Mayer, Vérités Opportunes 1953 Français - 8 parties  (Read 282 times)

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Le Sel de la terre. 

Catéchisme des vérités opportunes qui s’opposent aux erreurs contemporaines par
S. Exc. Mgr Antonio de Castro Mayer

...On notera que ce catéchisme a été écrit en 1953, soit seize ans avant la promulgation de
la nouvelle messe. Pourtant, tout s’y trouve : la « participation active » des fidèles, le « sacerdoce des laïcs », la suppression de l’autel au profit d’une table, la messe face au peuple, l’élimination des images des saints, le mépris de la piété populaire, etc. Cela nous montre que l’hérésie liturgique conciliaire couvait depuis longtemps, attendant son heure. L’intérêt du Catéchisme de Mgr de Castro Mayer, c’est qu’il remonte aux principes des erreurs qu’il dénonce. Pour reconstruire solidement, il nous faut faire de même : revenir aux principes catholiques et ne pas se laisser séduire par une réforme des réformes qui ne ferait que ratifier les déviations fondamentales.

Dans les tableaux, le signe
❍ désigne l’erreur condamnée, et le signe
❑ indique la vérité catholique correspondante. En plusieurs endroits du texte, nous avons corrigé la traduction. Les références aux docuмents du magistère ont été mises à jour et complétées.
On trouvera les deux premières parties de ce catéchisme dans les numéros 37, pages 54 à 62, [sur la Liturgie]; et 38 pages 7 à 20., [sur la structure de l'Église]; numéro  39 pages 30 à  38, [sur les methodes d'Apostolat]; et numéro 40 pages46 à  52, [sur la vie Spirituelle]; 41 pages 28 à  44, [sur la nouvelle morale, le rationalisme et laicisme];  42 pages 17 à 38, [sur les relations entre l'Église et l`État ].



I. – Sur la liturgie

—1—
❍ Lorsque le fidèle assiste à la sainte messe et prononce avec le célébrant les paroles de la consécration, il coopère à la transsubstantiation et au sacrifice.

❑ Le fidèle est incapable de « concélébrer » avec le prêtre en coopérant à la  transsubstantiation, parce qu’il lui manque le sacrement de l’Ordre qui communique ce pouvoir.

Explication :
Seul, le sacrement de l’Ordre confère le pouvoir et la capacité d’opérer la transsubstantiation dans le sacrifice de la nouvelle loi. Le simple fidèle est donc incapable de le faire. Cette proposition renouvelle l’hérésie des protestants condamnée par le concile de Trente (sess. 23, cap. 4) et de nouveau proscrite par Mediator Dei [20 novembre 1947] de Sa Sainteté Pie XII (Acta Apostolicæ Sedis, année et volume 39, page 556 ; Docuмents Pontificaux de Solesmes, La Liturgie, nº 570).

—2—
❍ Le fidèle « concélèbre » avec le prêtre le saint sacrifice de la messe
❑ Le fidèle participe au sacrifice de la messe.

Explication :
    Ces deux propositions demandent une explication. Jamais on ne peut dire que le
fidèle « concélèbre » avec le prêtre, car l’expression « concélébrer » se réfère, dans l’Église,
aux messes de plusieurs célébrants. Tous concourent alors activement à l’offrande du
sacrifice et à la transsubstantiation. Par exemple, les messes d’ordination sacerdotale dans
lesquelles les nouveaux prêtres concélèbrent avec l’évêque la messe au cours de laquelle ils
sont ordonnés.
      De même, la proposition dans laquelle il est dit que les fidèles participent au sacrifice
de la messe demande une explication. Beaucoup la comprennent dans ce sens que les
fidèles « concélèbrent » le sacrifice. Ce serait la répétition de l’erreur étudiée au § 1.
D’autres l’entendent comme si le prêtre n’était qu’un mandataire du peuple, dont les actes
sacerdotaux n’auraient de valeur qu’en tant qu’il représente le peuple. Ce n’est pas ainsi
qu’il faut l’entendre, selon l’enseignement de Mediator Dei (AAS 39, pages 555-556 ;
Solesmes, nº 569).
    En fait, le prêtre n’est pas un délégué du peuple (Mediator Dei, AAS 39, page 538 ;
Solesmes, nº 533), car il est choisi par vocation divine et engendré par le sacrement de
l’Ordre (Mediator Dei, ibid., page 539 ; Solesmes, nº 535). Cela ne veut pas dire que le prêtre,
en un certain sens, ne représente pas le peuple. Il le représente en tant qu’il représente
Jésus-Christ, tête du Corps mystique, dont les fidèles sont les membres (Mediator Dei, ibid.,
page 538 ; Solesmes, nº 533) et, quand le prêtre offre à l’autel, il le fait au nom du Christ,
prêtre principal, qui offre au nom de tous les membres de son Corps mystique. En sorte
que, dans un certain sens, le sacrifice est offert au nom du peuple. C’est pourquoi, il doit
participer au sacrifice. De quelle manière ? Mediator Dei le dit : « Parce qu’il unit ses vœux
de louange, d’impétration, d’expiation et d’action de grâces aux vœux ou intentions
mentales du prêtre, et même du Souverain Prêtre, afin de les présenter à Dieu le Père dans
le rite extérieur même du prêtre offrant la victime » (ibid., page 556 ; Solesmes, nº 570).
Il y a donc un sens réel à l’expression « participer » qui pourra être utilisée si l’on
prend soin d’en exclure tout autre sens moins exact.

LE SEL DE LA TERRE Nº 37, ÉTÉ 2001

—3—
❍ Le fidèle qui suit la messe avec un missel participe à la messe : le fidèle qui suit la messe de quelque autre manière y assiste seulement.

❑ La participation du fidèle au saint sacrifice de la messe consiste dans l'union aux intentions du Souverain Prêtre, Jésus-Christ, et du prêtre célébrant. Toute méthode (missel, chapelet, méditation) qui procure efficacement
cette union est parfaite.

Explication :
    La maxime réfutée renouvelle l’esprit janséniste contenu dans la proposition de
Quesnel, condamnée par Clément XI, dans la Bulle Unigenitus du 8 septembre 1713 :
« Ravir au simple peuple la consolation d’unir sa voix à la voix de toute l’Église est un
usage contraire à la pratique apostolique et au dessein de Dieu » (prop. 86, DS 2486).
En soi, c’est une conséquence de la doctrine erronée selon laquelle le fidèle « concélèbre » avec le prêtre la sainte messe et doit alors prononcer avec lui les paroles liturgiques. Celui qui ne prononcerait pas ces paroles ne « participerait » pas à la messe, il y « assisterait » seulement, dans une attitude purement « passive ». Mediator Dei insiste, au contraire, sur l’union aux intentions de Jésus-Christ et du célébrant, et donne pleine liberté
aux fidèles sur la méthode à appliquer pour atteindre ce but. Nous sommes loin, pour
autant, de déconseiller l’attention que l’on doit porter à tout ce qui se dit à la messe, et
aussi à la connaissance du missel, des prières et cérémonies du saint sacrifice, etc.
Autant il faut éviter la confusion – propre aux réformateurs du XVIe siècle – entre
fidèle et prêtre, autant il est nécessaire de respecter la liberté de l’Esprit-Saint qui, compte
tenu de l’obéissance que les fidèles doivent à la sainte Église, les oriente par ses grâces
selon son ineffable bon plaisir : « Spiritus ubi vult spirat – L’Esprit souffle où il veut » (Jn 3, 8).

—4—
❍ On ne doit assister à la messe qu’en suivant les paroles du missel. On doit exclure pendant le sacrifice les prières privées, telles que chapelet, méditation, etc. Seule, la messe dialoguée et« versus populum » s’harmonise avec la condition du fidèle dans le saint sacrifice.

❑ L’usage du missel, la récitation du chapelet, la méditation et autres prières appropriées sont toutes des méthodes excellentes pour assister au saint sacrifice de la messe. Le fidèle a donc la liberté de choisir ce qui contribue le mieux à son union aux intentions de JésusChrist et du prêtre qui célèbre. Toutes les méthodes d’assistance à la messe approuvées par la sainte Église s’harmonisent avec la condition du fidèle dans le saint sacrifice. Tout exclusivisme, sur ce point, est répréhensible.

Explication :
  La proposition réfutée est intimement liée aux faux principes du sacerdoce formel des fidèles, comme nous l’avons montré ci-dessus. L’encyclique Mediator Dei approuve et soutient le vrai mouvement liturgique. Tout ce qui porte les fidèles à connaître et à aimer la sainte liturgie ne peut que mériter les applaudissements. Le mal commence toutes les fois que de fausses interprétations théologiques vicient l’esprit avec lequel se propage la piété liturgique. C’est sur cette observation que se fonde Mediator Dei pour censurer et condamner les extravagances qui surgissent dans le domaine de la piété liturgique.

—5—
❍ L’autel doit être en forme de table pour rappeler la Cène eucharistique.

❑ « Il est en dehors de la voie droite celui qui veut restituer à l’autel son antique forme de table » (Mediator Dei).

Explication :
    Il convient de souligner la cohérence doctrinale qui existe entre les multiples propositions jusqu’ici réfutées. Elles procèdent du faux présupposé qui affirme que les fidèles participent au sacerdoce de Jésus-Christ de la même manière que les prêtres y participent, bien que, peut-être, à un moindre degré. Il y a, pourtant, une différence
spécifique entre ces deux participations, que le Saint-Père 1  ne craint pas de comparer à la différence qui existe entre un païen et un fidèle. De même que le païen est séparé de l’union au Corps mystique du Christ, et qu’il est, de ce fait, incapable de tout acte propre à ce Corps, de même le simple fidèle est en dehors du sacerdoce, propre aux prêtres, et il est fondamentalement incapable de tout acte spécifiquement sacerdotal (voir Mediator Dei,
AAS 39, page 539 ; Solesmes, nº 535). L’erreur réfutée est une nouveauté protestante que les jansénistes s’efforcèrent de maintenir au sein de l’Église, poussés par le même esprit de réforme à l’intérieur de l’Église, afin que, de société monarchique et aristocratique, elle devînt une société démocratique.
  Que l’on prête attention à l’une des propositions du Synode de Pistoie condamnées par la Bulle Auctorem fidei de Pie VI (28 août 1794) : « La proposition qui déclare : “Le pouvoir a été donné par Dieu à l’Église pour qu’il soit communiqué aux pasteurs qui sont ses ministres pour le salut des âmes”, si on la comprend en ce sens que le pouvoir du ministère ecclésiastique et du gouvernement dérive de la communauté des fidèles aux
pasteurs, est hérétique » (prop. 2, DS 2602).
1 — Il s’agit de Pie XII. (NDLR.)

—6—
❍ La communion extra missam, les visites au très Saint-Sacrement, le culte rendu aux saintes espèces, l’adoration perpétuelle, la bénédiction du très Saint-Sacrement constituent des formes extra-liturgiques de piété et, comme
telles, doivent être, peu à peu, supprimées.

❑ Toutes les formes de culte envers le très Saint-Sacrement constituent des formes précieuses de piété et, comme telles, doivent être encouragées. Bien que l’on doive conseiller la communion intra missam, la réception de la
sainte eucharistie en dehors de la messe est un moyen de participer normalement au sacrifice eucharistique (Mediator Dei).


Explication :
La maxime réfutée présuppose que toute forme de piété privée est superflue, ce qui constitue une erreur condamnée par Mediator Dei (AAS 39, pages 565-566 et 583 ; Solesmes, nº 588 et 628). Elle renouvelle aussi l’esprit des propositions condamnées par le concile de Trente dans les canons 5, 6 et 7 de la session XIII (DS 1655-1657).

—7—
❍ La célébration simultanée de plusieurs messes rompt l’unité du sacrifice communautaire.
❑ La simultanéité de plusieurs messes ne rompt pas l’unité du sacrifice communautaire de l’Église.

Explication :
  « Quelques-uns même affirment que les prêtres ne peuvent en même temps offrir la
divine hostie sur plusieurs autels, parce que, par cette manière de faire, ils divisent la
communauté et mettent son unité en péril. » Cette phrase est réprouvée par Mediator Dei
(Solesmes, nº 571). La raison en est évidente : le sacrifice de la messe n’a de valeur que par
sa relation intrinsèque avec le sacrifice de la croix, qui fut unique et valable pour tous les
temps. En sorte que, bien qu’il y ait plusieurs messes, l’unité essentielle du sacrifice
demeure en fait. La maxime réfutée rappelle l’erreur janséniste condamnée par la Bulle
Auctorem fidei de Pie VI, le 28 août 1794, sous le nº 31, où il est dit : « La proposition du
Synode qui énonce que, pour l’ordonnance des offices divins et selon la coutume ancienne,
il convient que dans chaque église il n’y ait qu’un seul autel et qu’il lui plaît que cet usage
soit rétabli, est téméraire, injurieuse pour un usage très ancien, pieux, en vigueur et
approuvé depuis de nombreux siècles dans l’Église, en particulier latine » (DS 2631).

—8—
❍ Il ne doit y avoir sur les autels aucune autre image que celle du crucifix.

❑ Il n’y a pas le moindre inconvénient à ce qu’il y ait sur les autels d’autres images que celle du crucifix, du moment qu’elles n’occupent pas la place réservée à ce dernier.

Explication :
  L’habitude de mettre des images sur l’autel est en plein accord avec la doctrine catholique touchant le culte qui leur est dû.
  La maxime réfutée est contraire à l’esprit conseillé par Mediator Dei, qui recommande l’exposition des images des saints dans les églises pour l’édification des fidèles et qui réprouve ceux qui voudraient retirer ces images (AAS 39, pages 582 et 546 ; Solesmes, nº 625 et 549).
    La préoccupation exprimée dans cette maxime se rattache facilement à l’erreur protestante voulant un seul et unique Médiateur et ne tolérant aucun médiateur secondaire.

—9—
❍ Lorsque le fidèle récite l’office divin, il fait une prière liturgique.

❑ La prière liturgique qui est faite au nom de l’Église selon les termes et les rites proposés par elle, ne peut être faite que par les prêtres ou les religieux à qui elle incombe. La prière du simple fidèle est toujours une prière privée, que son texte soit liturgique ou extraliturgique.

Explication :
  « L’office divin est la prière du Corps mystique du Christ adressée à Dieu, au nom et pour l’avantage de tous les chrétiens, par les prêtres et les autres ministres de l’Église ainsi que par les religieux, délégués par elle à cet effet » (Mediator Dei, AAS 39, page 573 ; Solesmes, nº 601).

— 10 —
❍ Il suffit que le fidèle, pour sa vie spirituelle et son union à Jésus-Christ, participe aux actes liturgiques, en récitant les textes officiels.

❑ La vie spirituelle du fidèle se compose nécessairement, non seulement de la participation à la sainte messe et aux sacrements, mais aussi d’actes de piété privée, sans lesquels le salut est impossible.

Explication :
  La maxime réfutée fut ainsi proscrite par Mediator Dei : « Certains concluent de ces profonds arguments que toute la piété chrétienne doit se renfermer dans le mystère du Corps mystique du Christ, sans aucune considération “personnelle” ou “subjective” ; ils estiment donc qu’il faut négliger les autres pratiques de religion non strictement liturgiques et accomplies en dehors du culte public. […] Tout le monde remarquera pourtant que ces conclusions sur les deux sortes de piété sont tout à fait fallacieuses, insidieuses et dommageables » (AAS 39, page 533 ; Solesmes, nº 526 [sur les nouvelles théories de la “piété objective”]).
D’ailleurs, pour les prêtres eux-mêmes, capables de prières proprement liturgiques, le code du Droit canon recommande une fervente piété privée (Can. 125, § 2).

— 11 —
❍ C’est être d’un moralisme rétrograde que de défendre aux fidèles la fréquentation des bals, dancings et piscines. Nourris par la piété liturgique, ils peuvent fréquenter ces milieux sans danger et y pratiquer l’apostolat de
l’infiltration en rayonnant le Christ par leur présence.

❑ Aucune spiritualité n’immunise l’homme contre le danger des occasions prochaines et volontaires du péché, dont on doit s’abstenir. L’apostolat exercé avec un risque prochain à l’encontre du salut est téméraire et ne peut
compter sur les bénédictions du Seigneur.


Explication :
  La proposition erronée serait vraie s’il existait une union (sacramentelle et vitale) avec Dieu obtenue par la liturgie, non seulement supérieure, mais même étrangère à l’union morale ; ou, selon une autre hypothèse, si la vie de la grâce était telle qu’elle dispensât de la coopération de l’homme. Mais, pour qui professe une authentique doctrine catholique, aucune de ces suppositions ne peut être acceptée. Aujourd’hui, comme toujours, le SaintSiège et les moralistes prémunissent les fidèles contre les tentations qui constituent des occasions prochaines de péché.
  La maxime réfutée rappelle le quiétisme condamné par Innocent XI, le 28 août et le 27 novembre 1667. Parmi les propositions condamnées, se trouve celle-ci : « Si, par ses propres fautes, on scandalise les autres, il n’est pas nécessaire d’y réfléchir dès lors qu’il n’y a pas volonté de scandaliser ; et ne  pouvoir réfléchir à ses propres défauts est une grâce de Dieu » (DS 2210). Ainsi, la maxime réfutée suppose une sanctification automatique, sans
aucun concours de la volonté humaine.

— 12 —
❍ L’état de mariage doit être exalté au-dessus de l’état de chasteté parfaite, parce qu’il est sanctifié par un sacrement.

❑ Le degré de perfection d’un état de vie se  mesure par la plus grande union à Dieu, qui, normalement, s’obtient par la grâce sanctifiante et la charité. C’est pourquoi l’état le plus parfait suppose une plus grande abnégation de celui qui l’embrasse et doit lui fournir de plus grands moyens de sanctification. Aussi l’état de perfection par excellence est-il l’état religieux, et l’état de chasteté parfaite est plus élevé que celui du mariage.

Explication :
  On ne peut affirmer que tout état qui est constitué par un sacrement soit, par làmême, plus parfait qu’un autre. Ainsi, bien qu’il n’y ait pas de sacrement spécial pour l’état religieux, on sait que Notre-Seigneur présenta la pratique des conseils évangéliques comme le sommet de la perfection.
  Quant à la supériorité de la virginité sur la continence matrimoniale, on lira, à ce sujet, le chapitre septième de la Première Épître aux Corinthiens et, dans la Somme théologique de saint Thomas, la II-II, q. 152, a. 4, ainsi que la II-II, q. 40, a. 2, ad 4. D’ailleurs, la virginité peut être considérée comme le fruit du sacrement de l’eucharistie qui la rend praticable aux mortels.
  La maxime réfutée fut plusieurs fois censurée par l’Église. Ainsi : – dans le Syllabus de Pie IX, le Nota bene après la proposition nº 74 (DS 2974) ; – dans l’allocution aux religieuses de Pie XII, le 15 septembre 1952, où le Saint-Père blâme les prêtres, laïcs, prédicateurs, orateurs et écrivains qui « n’ont plus un mot d’approbation ou de louange
pour la virginité vouée au Christ ; qui, depuis des années, malgré les avertissements de l’Église et à l’encontre de sa pensée, accordent au mariage une préférence de principe sur la virginité ; qui vont même jusqu’à le présenter comme le seul moyen capable d’assurer à la personnalité humaine son développement et sa perfection naturelle » (Aux Supérieures générales des Ordres et Congrégations religieuses de femmes, Solesmes, Les Instituts de vie
parfaite, nº 811). – On trouve les mêmes pensées dans l’allocution du 23 avril 1952 à un groupe de jeunes filles, dans laquelle il répète que la vocation religieuse restera toujours un état plus parfait que celui du mariage.
Il n’est pas nécessaire d’insister sur le mal immense que ces idées font dans notre diocèse, dans lequel la propagande protestante contre le célibat est l’une des armes avec laquelle les hérétiques assouvissent leur haine contre tout ce qui vient de l’Église de Dieu.

— 13 —
❍ La paroisse étant une communauté, le  maintien de la vie communautaire exige que tous les paroissiens participent ensemble au même sacrifice, reçoivent les grâces du même père spirituel et unissent leurs prières dans un même temple. Le fait, pour les fidèles, de fréquenter d’autres paroisses ou églises non paroissiales rompt l’unité de vie communautaire.

❑ La paroisse est la cellule du diocèse et, comme telle, il est nécessaire que tous les paroissiens maintiennent un vif contact avec le curé et soient sous sa direction. Un tel contact et une telle direction sont entièrement compatibles avec le fait que les fidèles reçoivent les sacrements et assistent à la sainte messe dans d’autres églises. C’est pourquoi ces pratiques ne doivent pas être interdites ou déconseillées.

Explication :
  Si, par vie communautaire, on entend la participation des fidèles aux mêmes mystères surnaturels, elle ne perd rien de son intensité du fait que les paroissiens participent à ces mystères dans des églises différentes. Si, par vie communautaire, on entend une vie en commun, naturelle, édifiante, une telle vie est également possible pour
les fidèles dans une autre église que la paroisse. Le fait pour une personne de fréquenter une église de monastère, par exemple, en ayant commerce avec des fidèles édifiants de sa paroisse ou d’autres paroisses, ne peut que lui être très bienfaisant, et les avantages spirituels qu’elle reçoit ainsi ont nécessairement une influence bénéfique sur sa propre paroisse.
  L’action des religieux et des recteurs d’églises non paroissiales, qui instruisent les fidèles sur leurs devoirs envers la paroisse et le curé, et qui sont toujours sollicités pour aider les curés en tout ce qui se rapporte à la vie paroissiale, sera très efficace pour l’exacte compréhension de cette question.
Comme on perçoit en général, dans toutes ces erreurs, un relent janséniste, nous rappellerons ici que ce fut l’intrigue des jansénistes qui mit en vogue cet esprit paroissial, esprit qui régna à Paris au XVIIe siècle, et qui prépara les curés au serment constitutionnel de la Révolution française. Ce fut aussi le même esprit qui, à Pistoie, dicta les règles restrictives concernant la vie des religieux, heureusement condamnées par Sa Sainteté
Pie VI.
  Cependant, le paroissien qui méconnaîtrait complètement son curé serait blâmable. Car celui-ci doit être mis au courant de l’accomplissement des devoirs de tous ses paroissiens. C’est ce qui ressort du code du Droit canon qui, au canon 859, § 3, conseille aux fidèles de faire leurs Pâques dans leur propre paroisse et demande, s’ils ne font pas ainsi, d’en avertir leur curé.
  La maxime réfutée serait valable si l’on concevait la « communauté paroissiale » comme un tout ontologique, dans lequel, pour la participation aux fonctions liturgiques, on tenterait d’absorber les paroissiens dans un seul tout essentiel d’ordre supérieur : le Christ mystique et communautaire. La communauté ontologique paroissiale se continuerait également dans le domaine temporel, en faisant de la paroisse un ensemble dans lequel pourrait se fusionner complètement ou presque complètement les familles et les propriétés, dans une participation quasi biologique à toute sorte de biens. Même dans l’ordre temporel, les personnes individuelles se fondraient alors en une seule personne collective.
Mais, si nous comprenons la communauté non comme un fait ontologique, mais comme un fait moral, quoique surnaturalisé par la grâce, la maxime erronée devient sans fondement.

[Photographie prise pendant le concile Vatican II, à la Domus Mariæ.
On reconnaît, au premier plan, Mgr de Castro Mayer et, derrière lui, Mgr Lefebvre.]

Le Sel de la terre.
La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
The measure of love is to love without measure.
                                 St. Augustine (354 - 430 AD)


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  • II. – Sur la structure de l’Église
    — 14 —
    ❍ A l’intérieur du diocèse, l’unique interprète authentique des actes du Saint-Siège est l’évêque diocésain. En sorte que les fidèles et le simple prêtre ne peuvent jamais s’éloigner de cette interprétation.

    ❑ L’interprétation des actes pontificaux appartient seulement au Saint-Siège. Aucune autre interprétation, si respectable et savante qu’elle soit, ne peut s’imposer comme officielle et unique.

    Explication
    Voir la Directive nº 8  1 :
      « Sur le magistère ecclésiastique, enseignez que le magistère pontifical étant infaillible et celui de chaque évêque, officiel, mais faillible, il est dans l’ordre de la fragilité humaine qu’un évêque ou l’autre puisse tomber dans l’erreur. L’histoire enregistre de telles éventualités. Elles engendrent, comme on le pense, les conséquences les plus dangereuses. Malgré cela, il ne faut pas manquer d’enseigner aux fidèles comment ils doivent agir dans de telles circonstances. Dans des  cas aussi douloureux, le premier devoir du fidèle consiste à conserver tout le respect dû à la personne sacrée du pasteur qui lui fut donné par la Providence et à exécuter fidèlement ses ordres dans tout ce qui ne met pas obstacle à la fidélité directe et plus élevée qu’il doit au Vicaire du Christ. »

    1  Il s’agit des Directives de Mgr de Castro-Mayer à son clergé, publiées le même jour et annexées au Catéchisme des vérités opportunes.

    — 15 —
    ❍ L’union du fidèle au pape se réalise dans la personne de l’évêque.  Celui qui suit complètement les
    opinions de son ordinaire peut être certain de se conformer absolument à la pensée du Saint-Siège.

    ❑ L’évêque a le magistère ordinaire, en sorte que les fidèles doivent recevoir son enseignement comme l’expression fidèle de la pensée de l’Église. Cependant le magistère officiel, tel qu’en a disposé le Christ, n’est pas infaillible quand il est exercé isolément. En conséquence, le fidèle ne peut apporter le même degré de soumission au magistère de l’évêque qu’à celui du pape, encore qu’il doive, dans une juste mesure, respect et obéissance à
    l’un et à l’autre.

    Explication
    Directive nº 7 :
      « Ne perdez jamais l’occasion d’enseigner une véritable dévotion envers le Saint-Père le pape et, à un degré moindre, envers l’évêque diocésain.
      « Sur ce point, il est nécessaire d’éviter certaine tendance qui, dans le but louable de resserrer les liens de charité entre les brebis et le pasteur local, présente l’évêque sous un jour tel qu’elle lui confère une sorte d’infaillibilité jusqu’à en faire presque l’égal du Saint-Père, qui, selon cette conception, ne serait qu’un simple censeur des évêques. Enseignez donc, au sujet des relations entre le pape et les évêques, la doctrine exacte.
      « Notre-Seigneur Jésus-Christ a institué dans l’Église une seule hiérarchie de gouvernement, formée de deux degrés harmonieux : le pape et, subordonnés à lui, les évêques (CIC, can. 108, § 3 1). L’unité de cette hiérarchie est une notion indispensable pour que le fidèle sache comment se placer en face d’elle. En la voyant comme un seul tout, qui a, à son sommet, le souverain pontife, source de toute juridiction dans l’Église, et en considérant dans une même perspective les évêques et le pape, le fidèle témoignera à tous le respect, la vénération et l’amour qu’il leur doit.
      « Dans cette perspective, il convient de rappeler que la plénitude du pouvoir appartient au pontife romain, qui a juridiction directe et immédiate sur les évêques et les fidèles. La juridiction des évêques, successeurs des apôtres,
    s’exerce en harmonie avec la juridiction pontificale et sous sa dépendance. « Tel est le cadre naturel de l’Église. Vouloir inculquer une dévotion envers le pape qui soit une chose entièrement différente et même opposée à la dévotion envers l’évêque, et, vice versa, prétendre inculquer une dévotion envers l’évêque qui soit différente et même opposée à la dévotion envers le pape, serait nier implicitement l’unité harmonieuse de la hiérarchie. Aimons avec une extrême charité et dévotion le pape et l’évêque, chacun selon son rang et dans la mesure des
    pouvoirs que leur a conférés Notre-Seigneur Jésus-Christ.
      « Le fidèle le plus dévoué envers son évêque – et tout catholique doit l’être – n’aura aucune crainte à se montrer très respectueux envers l’autorité suprême du pontife romain dans toute l’étendue qui lui a été conférée par le divin fondateur de l’Église. »
    7 — « La hiérarchie de juridiction se compose, de droit divin, du souverain pontificat et de l’épiscopat qui lui est subordonné ».

    — 16 —
    ❍ L’inscription du fidèle dans des organisations d’Action catholique lui confère une participation au mandat apostolique et aux fonctions hiérarchiques, qui le rend capable d’apostolat spécifiquement sacerdotal.

    ❑ L’Église est, par institution divine, une société inégale dans laquelle on distingue une partie enseignante
    et une partie enseignée : hiérarchie et sujets. Les membres des organisations d’Action catholique appartiennent entièrement à la catégorie des sujets de l’Église enseignée. Ils ne possèdent donc aucune parcelle de fonction enseignante, ni de pouvoir hiérarchique. Leurs actes sont spécifiquement ceux de tout autre fidèle.

    Explication
      Le mandat conféré par Notre-Seigneur Jésus-Christ aux apôtres et à leurs successeurs a pour objet tout ce qui se rapporte au salut des âmes. Les membres des divers degrés de la hiérarchie participent, dans le sens vrai et propre du terme, à ce mandat qui implique le pouvoir de gouverner, d’enseigner et de sanctifier.
      Le laïc n’est susceptible, comme tel, de recevoir aucune parcelle du pouvoir hiérarchique. Ainsi, il participe aux travaux de la hiérarchie et collabore avec elle. Mais il est évident qu’il ne participe pas à ses pouvoirs. Même quand un père enseigne le catéchisme à ses fils ou quand un catéchiste autorisé diffuse l’enseignement religieux, il n’y a, à proprement parler et en quelque sens que ce soit, participation au pouvoir enseignant de l’Église. Le père et le catéchiste sont des collaborateurs de la hiérarchie, mais continuent à appartenir complètement à
    l’Église enseignée. Tous les docuмents du Saint-Siège sur l’Action catholique considèrent la question de cette manière, comme cela est naturel, car c’est la seule qui correspond à l’institution divine de l’Église.
      C’est ce que dit Pie XI dans son discours aux journalistes catholiques du 26 juillet 1929 : « … Les journalistes catholiques sont ainsi de précieux porte-voix de l’Église, de sa hiérarchie, de son enseignement, par conséquent les porte-voix les plus nobles, les plus élevés de tout ce qui est dit et fait par la sainte Mère l’Église. En remplissant cette fonction, la presse catholique n’appartient pas, pour autant, à l’Église enseignante ; elle continue à faire partie de l’Église enseignée ; et cependant, elle n’en est pas moins, partout, la messagère de la discipline de l’Église enseignante, de cette Église chargée d’enseigner les nations du monde. »
    Ici se place une observation dont l’importance ne sera jamais assez soulignée. Si, d’un côté, les docuмents pontificaux soulignent et censurent diverses erreurs qui ont surgi à propos de l’Action catholique, d’un autre côté, ils manifestent le plus grand désir de conserver et d’étendre cette association. Il n’y a pas contradiction entre cette attitude et l’autre. Si le Saint-Siège corrige les exagérations dangereuses concernant l’Action catholique, c’est précisément parce qu’il désire qu’elle se développe avec rectitude et efficacité. C’est dans cette position
    d’équilibre que doivent également se maintenir ceux qui se consacrent à cette action.

    — 17 —
    ❍ L’Action catholique et le clergé diocésain  sont des organisations instituées par l’Église et, comme telles, exercent un apostolat officiel ; les congrégations religieuses et les autres associations sont des institutions particulières approuvées par l’Église et exercent un apostolat officieux.

    ❑ L’état sacerdotal dans l’Église se distingue comme spécifiquement supérieur à l’état des laïcs. De son côté, l’état religieux lui-même est supérieur à l’état des séculiers. Ainsi l’apostolat sacerdotal a la prééminence sur tous les autres. Et l’apostolat religieux a la prééminence sur celui des laïcs.

    Explication
      La phrase réfutée place l’apostolat des laïcs de l’Action catholique sur un plan officiel et l’apostolat des religieux sur un plan simplement officieux et donc inférieur, ce qui est contraire à l’ordre des valeurs.

    — 18 —
    ❍ Par suite de la participation qu’elle donne à l’apostolat hiérarchique, l’inscription du fidèle à l’Action catholique confère une grâce d’état qui rend, par cela même, son apostolat plus efficace que celui qui est exercé par les membres des autres associations.

    ❑ La participation à l’apostolat hiérarchique par laquelle le pape Pie XI a défini l’Action catholique n’implique
    pas, pour les laïcs, un état spécial, dans l’Église, distinct de celui dans lequel se trouvent les autres fidèles non
    inscrits aux associations principales de l’Action catholique. Ainsi, l’inscription d’une personne à l’Action catholique ne confère-t-elle aucune grâce spécifiquement différente de celle que reçoivent les laïcs inscrits aux autres associations d’apostolat.

    Explication
      La phrase réfutée suppose un état intermédiaire entre l’Église enseignante et l’Église enseignée. Alors se justifierait une grâce d’état propre, plus efficace en soi que celle des simples membres de l’Église enseignée.

    — 19 —
    ❍ Les principales organisations d’Action catholique sont approuvées et encouragées par le Saint-Siège. Les autres associations (apostolat de la prière, enfants de Marie, congrégations mariales, etc.) sont tout juste tolérées. Dans
    l’esprit du Saint-Siège, elles doivent disparaître lentement.

    ❑ Les congrégations mariales et autres associations qui, comme elles, ont une forme et un but apostoliques, appartiennent de plein droit à l’Action catholique. Les autres associations sont des auxiliaires providentiels de l’Action catholique et doivent donc être encouragées à cause des grands services qu’elles sont appelées à rendre à l’Église.

    Explication
      [ L]e pape Pie XII a enseigné à satiété et très solennellement, en engageant sa parole de pasteur suprême, dans la constitution apostolique Bis saeculari die du 27 septembre 1948 sur les congrégations mariales (Acta Apostolicae Sedis [AAS], vol. 40, p. 393 sq.), que l’Action catholique ne peut être organisée à la manière standardisée et totalitaire des États modernes 1.  C’est pourquoi il met les congrégations mariales et autres associations ayant des fins et une forme d’apostolat multiples dans leur esprit, dans leur constitution et dans leur activité, sur le même plan que les organisations principales d’Action catholique.

    1 — « Le Saint-Siège l’a déclaré maintes fois : “l’Action catholique [...] ne prétend pas atteindre son
    but par un moyen et une méthode particulière” (Pie XI, Lettre Quae nobis au cardinal Bertram,
    13 nov. 1928, AAS XX, 1928, p. 386), au point de supprimer ou d’absorber les autres associations
    actives de catholiques ; elle considèrera plutôt comme son rôle de “les unir, trouver des arrangements
    amicaux, faire profiter les progrès de l’une au bien des autres, dans une concorde parfaite, dans
    l’union et la charité” (Pie XI, Allocution à l’Action catholique de France, 20 mai 1931). En effet,
    comme nous l’avons récemment recommandé en termes exprès, [...] “il faut éviter l’erreur de certains,
    qui veulent réduire à une seule formule tout ce qu’on entreprend pour le bien des âmes” (Pie XII,
    Radiomessage au congrès international des congrégations mariales à Barcelone, 7 décembre 1947,
    AAS XXXIX, 1947, p. 364) ; car, il faut le dire, “cette manière d’agir s’écarte complètement de l’esprit
    de l’Église” (Pie XI, Allocution à l’Action catholique italienne, 28 juin 1930). [...] Les congrégations
    doivent être mises sur le même rang que les autres associations poursuivant un but apostolique ».
    (Docuмents pontificaux de Sa Sainteté Pie XII, 1948, Paris, Labergerie, p. 336-351.)

    — 20 —
    ❍ La nature juridique de l’Action catholique est telle que la cérémonie d’admission de ses membres ne peut être présidée que par l’évêque ou par un de ses délégués.

    ❑ L’Action catholique étant une organisation placée entièrement dans les rangs de l’Église enseignée, ses membres doivent être reçus normalement par le vicaire ou le prêtre directeur de l’association.

    Explication
      La phrase réfutée serait vraie si l’Action catholique constituait un degré intermédiaire entre l’Église enseignante et l’Église enseignée.

    — 21 —
    ❍ La nature juridique de l’Action catholique est telle que l’assistant ecclésiastique n’exerce sur elle aucune autorité, sinon dans un sens négatif, car il peut mettre son veto aux délibérations de la direction, quand elles contiennent quelque chose de contraire à la foi ou aux mœurs. Toute autorité appartient aux laïcs, qui n’ont dans le prêtre qu’un directeur de conscience.

    ❑ L’Action catholique, appartenant à l’Église enseignée, est entièrement sujette à l’autorité de l’évêque,
    dont le représentant officiel est l’assistant ecclésiastique ; l’autorité de celui-ci ne s’exerce pas seulement
    pour interdire ce qui serait contraire à la foi et aux mœurs, mais aussi pour gouverner toute l’activité
    sociale. Dans l’Action catholique comme dans les autres associations, l’assistant ecclésiastique exercera
    ces fonctions avec charité et avec la considération que méritent les laïcs et il tiendra compte de leur
    expérience valable.

    Explication
      Si le prêtre avait sur l’Action catholique un simple pouvoir de veto, elle échapperait pratiquement au pouvoir de l’évêque. D’autre part, la phrase réfutée ne se justifierait que dans l’hypothèse où l’Action catholique serait spécifiquement supérieure à l’Église enseignée, dans une condition semblable à celle dans laquelle se trouvent les simples prêtres.

    "... Et pour Nous arrêter à cette seule dernière partie de la restauration désirée, vous voyez bien, Vénérables Frères, quel appui apportent à l'Eglise ces troupes choisies de catholiques qui se proposent précisément de réunir ensemble toutes leurs forces vives dans le but de combattre par tous les moyens justes et légaux la civilisation antichrétienne; réparer par tous les moyens les désordres si graves qui en dérivent ; replacer Jésus-Christ dans la famille, dans l'école, dans la société ; rétablir le principe de l'autorité humaine comme représentant celle de Dieu; prendre souverainement à cœur les intérêts du peuple et particulièrement ceux de la classe ouvrière et agricole, non seulement en inculquant au cœur de tous le principe religieux, seule source vraie de consolation dans les angoisses de la vie, mais en s'efforçant de sécher leurs larmes, d'adoucir leurs peines, d'améliorer leur condition économique par de sages mesures; s'employer, par conséquent, à rendre les lois publiques conformes à la justice, à corriger ou supprimer celles qui ne le sont pas; défendre enfin et soutenir avec un esprit vraiment catholique les droits de Dieu en toutes choses et les droits non moins sacrés de l'Eglise.

      L'ensemble de toutes ces œuvres, dont les principaux soutiens et promoteurs sont des laïques catholiques, et dont la conception varie suivant les besoins propres de chaque nation et les circonstances particulières de chaque pays, constitue précisément ce que l'on a coutume de désigner par un terme spécial et assurément très noble : Action catholique ou Action des catholiques. Elle est toujours venue en aide à l'Eglise, et l'Eglise l'a toujours accueillie favorablement et bénie, bien qu'elle se soit diversement exercée selon les époques...." (St. Pie X, Il fermo Proposito, 11 juin, 1905)


    — 22 —
    ❍ L’apostolat dans le milieu, c’est-à-dire dans les universités, les usines, les casernes, étant propre à
    l’Action catholique, le prêtre, n’appartenant pas à ces milieux, est incapable de diriger l’apostolat spécifique de l’Action catholique.

    ❑ L’apostolat dans le milieu est une obligation pour tout fidèle. Pour diriger l’apostolat des fidèles, Jésus-Christ a
    institué la hiérarchie sacrée. Par une grâce d’état, par des études spéciales, par le fait qu’ils se placent audessus des particularités des différents milieux pour en avoir une vue générale, ses membres ont tous les secours
    nécessaires pour exercer leur mission. Le prêtre prudent saura, dans sa fonction directrice, utiliser le concours
    efficace de l’expérience que les laïcs possèdent dans leurs milieux respectifs.

    Explication
      La fonction directrice se situe nécessairement sur un plan général et supérieur. Unis à la direction ecclésiastique, les laïcs peuvent offrir le concours de spécialistes habiles concernant les particularités des milieux respectifs dans lesquels ils vivent. Conseillers dévoués, désintéressés, efficaces, mais seulement conseillers, ils doivent être prêts à suivre les ordres du prêtre et la direction que celui-ci communique aux activités sociales.
      L’incapacité du prêtre à connaître les milieux où s’exerce l’apostolat des laïcs a été rejetée directement par le Saint-Père dans son allocution de clôture du premier congrès mondial de l’apostolat des laïcs (AAS, vol. 43, p. 789-790), le 14 octobre 1951, par ces paroles : « L’appel au concours des laïcs n’est pas dû à la défaillance ou à l’échec du clergé en face de sa tâche présente. » Et, d’une manière solennelle : « Le prêtre a d’aussi bons yeux que le laïc pour discerner les signes du temps, et il n’a pas l’oreille moins sensible à l’auscultation du cœur humain. » Et, pour qu’il n’y ait aucun doute, le pape donne la raison de la collaboration du laïc : « Le laïc est appelé à l’apostolat comme collaborateur du prêtre [...] à raison de la pénurie du clergé, trop peu nombreux 1 ».
      L’apostolat des laïcs dans leur propre milieu ne peut pas être le privilège exclusif de l’Action catholique, car c’est le devoir de tout fidèle de faire de l’apostolat dans le milieu dans lequel il vit.
      Au cours de vingt siècles d’existence, la hiérarchie sacrée a su diriger avec compétence cet apostolat. On ne comprend pas comment l’Action catholique peut venir apporter une innovation dans ce sens. Il est donc nécessaire de ne pas considérer ce sujet sous un angle purement naturel. Le souverain pontife a déjà déclaré que l’apostolat de l’Action catholique est instrumental, que les laïcs doivent être subordonnés à l’autorité du prêtre, représentant normal de l’évêque. L’instrumentalité du laïc dans l’apostolat s’entend toujours, naturellement, dans un sens adapté à des personnes humaines et non à des être inanimés. Le Saint-Père a dit que « les supérieurs ecclésiastiques usent de lui à la manière dont le Créateur et Seigneur use des créatures raisonnables, comme instruments, comme causes secondes “avec une douceur pleine d’égards”
    (Sg 12, 18) 2 ».  Tel est le plan de la Providence, qui ne dispense sa grâce qu’à ce qui est fait selon la constitution divine de l’Église.
    1 — Docuмents pontificaux de Sa Sainteté Pie XII, 1951, Paris, Labergerie, p. 427.
    2 — Pie XII, Discours aux participants du 1er congrès de l’apostolat des laïcs, 14 octobre 1951, ibid., p. 426.

    — 23 —
    ❍ Dans l’Action catholique, la formation intérieure est donnée par l’apostolat lui-même, ce qui dispense des autres moyens traditionnellement employés.

    ❑ L’apostolat de l’Action catholique suppose l’emploi minutieux de tous les moyens traditionnels de formation intérieure, comme condition de persévérance et de sanctification de ses membres et de fécondité de leurs
    activités.

    Explication
      La phrase réfutée paraît provenir de l’idée selon laquelle l’Action catholique est quelque chose d’entièrement nouveau dans l’Église et qui crée un système de spiritualité qui lui est propre. Les prêtres eux-mêmes ne sont pas dispensés de l’emploi des moyens traditionnels de formation. On ne comprend pas comment pourraient s’en passer les membres de l’Action catholique, sinon en supposant à cette dernière une spiritualité opposée à celle que l’Église a toujours enseignée.

    — 24 —
    ❍ Dans le recrutement des militants et dirigeants de l’Action catholique, contrairement à ce qui se passe dans les autres associations, il est nécessaire, pour l’apostolat de conquête, de considérer davantage les aptitudes naturelles et la formation technique que la piété et la formation surnaturelle. Il ne convient pas de recruter les chefs et les membres de l’Action catholique parmi les membres des associations religieuses, mais de préférence parmi ceux qui en sont éloignés.

    ❑ Par un mystérieux dessein de la Providence, les qualités naturelles et la grâce divine concourent à l’apostolat. Comme la grâce divine est l’élément indispensable et prépondérant dans le choix des apôtres, on doit prendre
    en considération, en premier lieu, leur formation spirituelle, sans laquelle l’emploi de leurs dons naturels constitue, pour eux, un danger pour leur salut, et, pour l’apostolat, le danger de se réduire à une simple façade. Dans les rangs des associations religieuses, on peut donc rencontrer des catholiques très aptes à toute forme d’apostolat.

    Explication
      Cette proposition réfutée procède aussi de l’idée que l’Action catholique constitue à l’intérieur de l’Église quelque chose d’entièrement nouveau et d’un sentiment contraire à ses véritables traditions.

    — 25 —
    ❍ La meilleure méthode de formation consiste en des cercles d’études dans lesquels la vérité naît spontanément de la conversation entre les assistants, sans nécessité d’un professeur qui leur soit supérieur et qui leur fasse l’exposé du sujet sous une forme systématique.

    ❑ La méthode normale d’enseignement, spécialement quand il s’agit de vérités révélées, est le magistère par lequel une personne érudite et autorisée expose le sujet aux auditeurs d’une manière systématique. Le cercle d’études, lorsqu’il constitue un complément d’études, peut être utile pour permettre aux auditeurs de manifester leurs objections et leurs difficultés, aussi bien que pour recueillir leurs observations.

    Explication
      Les cercles d’études, sous la forme envisagée par la proposition réfutée, furent condamnés par le bienheureux Pie X dans sa Lettre contre le Sillon 1. En effet, cette forme est d’inspiration révolutionnaire et tend à supprimer l’autorité du professeur.

    1 — « Les cercles d’études sont de véritables coopératives intellectuelles, où chacun est tout ensemble maître et élève. [...] Le prêtre lui-même, quand il y entre, abaisse l’éminente dignité de son sacerdoce et, par le plus étrange renversement des rôles, se fait élève, se met au niveau de ses jeunes amis et n’est plus qu’un camarade » (Lettre « Notre charge apostolique » de notre Saint-Père le pape Pie X à l’épiscopat français sur « Le Sillon », Actes de S.S. Pie X, Paris, Éditions de la Docuмentation catholique, t. V, p. 133).

    — 26 —
    ❍ L’apostolat de conquête, par lequel on amène au sein de l’Église les infidèles et ceux qui vivent habituellement en état de péché, est l’apostolat par excellence. Celui de préservation et d’encouragement des bons est secondaire.

    ❑ Nos plus grandes obligations de charité sont envers ceux qui vivent le plus unis à Dieu. Aussi notre zèle doit-il se tourner, en premier lieu, vers la préservation des bons. Ainsi la formation de laïcs fervents est la condition indispensable d’un véritable apostolat de conquête que nous devons tous encourager.

    Explication
      Les deux apostolats sont essentiels : conserver et perfectionner les bons, et convertir les pécheurs. De plus, il est faux de dissocier l’apostolat de préservation et d’encouragement des bons, de l’apostolat dit de conquête. Celui-là est la condition de celui-ci. Le divin Maître a préparé la conversion du monde par la formation d’une poignée d’apôtres fervents. En d’autres termes, il est impossible de conquérir la masse sans avoir préalablement formé une élite.

    — 27 —
    ❍ Dans les conditions actuelles  d’urgente nécessité d’apostolat, il serait mieux que les familles religieuses purement contemplatives cessent d’exister ou réduisent beaucoup le nombre de leurs membres, car elles laissent inutilisées pour l’apostolat actif extérieur des personnes qui se consacrent exclusivement à la pénitence et à la prière.

    ❑ Par disposition de la Providence divine, la conquête des âmes se fait par deux moyens : d’une part, l’activité
    extérieure et visible de la hiérarchie et des fidèles, d’autre part, l’action intérieure et invisible de la grâce, fondée en grande partie sur la prière et la pénitence réparatrice des contemplatifs. En principe, l’Église devrait avoir toujours une vie active, une vie mixte et une vie essentiellement contemplative. La suppression de l’une d’elles ou
    toute réduction qui équivaudrait pratiquement à une suppression ne doit pas être désirée.

    Explication
      Le pape Pie XII, devant la situation actuelle du monde, a accordé des facilités aux contemplatifs pour leur permettre d’exercer également un apostolat actif.
    Cependant, il ne s’agit ni de suppression des familles religieuses, ni d’une réduction qui y conduirait presque. D’ailleurs, dans le même docuмent, le Saint-Père souligne que cet apostolat ne doit absolument pas dispenser de la vie contemplative ou diminuer son intensité. Voici ses paroles :
    Et in primis, quoad vitam monialium contemplativam, hoc, quod juxta mentem
    Ecclesiae semper viguit, firmum ac inviolatum servari debet : Monasteria omnia monialium vitam contemplativam, ut primum atque praecipuum suum finem, canonice semper et ubique profiteri debere. Quam ob rem, labores et ministeria, quibus moniales vacare possunt ac debent, talia esse oportet atque ita quoad locuм, tempus, modum rationemque ordinanda ac disponenda sunt ut vita vere et solide contemplativa, sive totius communitatis, sive singularum monialium, salva non tantum sit, sed jugiter alatur acroboretur (Constitution apostolique Sponsa Christi, du 21 novembre 1950, concernant le statut des moniales, AAS 43, page 11).
    « Et tout d’abord, en ce qui concerne la vie contemplative des moniales, ceci, qui a toujours été en vigueur, suivant l’esprit de l’Église, doit être maintenu ferme et intact : tous les monastères de moniales doivent toujours et partout professer régulièrement la vie contemplative comme leur première et principale fin. C’est pourquoi, il faut que les travaux et ministères auxquels les moniales peuvent et doivent se livrer, soient de telle nature et disposés de telle façon pour le lieu, le temps, la mesure et la manière, que la vie vraiment et sincèrement contemplative de
    toute la communauté, comme de chacune des moniales, soit non seulement sauvegardée, mais encore constamment nourrie et fortifiée 1. »
    1 — Docuмents pontificaux de Sa Sainteté Pie XII, 1950, Paris, Labergerie, p. 549.

    — 28 —
    ❍ Le costume dit de « clergyman » convient mieux à notre époque et facilite davantage l’apostolat que la
    robe longue imposée par le Droit canon.

    ❑ Le prêtre étant, par le sacrement de l’Ordre, une personne sacrée, et occupant dans l’Église une situation
    spécifiquement distincte et élevée au-dessus du commun des fidèles, il convient hautement à sa situation qu’il ait
    un costume totalement différent de ceux que les simples fidèles ont coutume de revêtir.

    Explication
      L’Église a toujours préféré l’usage de la soutane. Le costume dit de « clergyman », au contraire, tire son origine des pays où la situation créée par l’hérésie et la persécution a rendu difficile aux prêtres la vie normale qu’ils mènent dans les pays catholiques. Il est donc conforme à l’esprit de l’Église de louer et de conserver la soutane. C’est en se fondant sur cette préférence pour la soutane que la lettre pastorale collective de l’épiscopat brésilien, rééditée avec une nouvelle approbation de tous les évêques en 1950 2 *,    impose son usage sous peines sévères (nº 1262 3) et ne tolère d’autres vêtements que dans des circonstances spéciales (nº 1260 1 et 1261 2). Le code exige des vêtements propres aux prêtres au Canon 136, mais montre sa préférence pour la soutane quand il ordonnne que ceux qui vont célébrer la sainte messe en soient revêtus (can. 811 3).
      Cette préférence pour la soutane s’explique. La soutane, tout à fait différente du costume civil ordinaire, marque mieux la séparation qu’il y a entre le prêtre et la vie profane. La suppression de la soutane a une influence très forte dans le sens de la laïcisation du clergé.

    1 — « Lors des voyages à cheval, encore que soit toujours préférable la soutane, nous tolérons la soutane courte, que l’on appelle de “lévite”, c’est-à-dire une espèce de redingote noire ou d’autre couleur, fermée jusqu’au col et descendant jusqu’aux genoux, avec col et chapeau mou en feutre. Est entendu cependant que la “lévite” est tolérée seulement durant le voyage proprement dit, n’étant permise en aucune autre circonstance ».
    2* — Voir note complémentaire après la fin de l’article.
    2 — « Lors des voyages à l’étranger, nous permettons les habits séculiers, mais seulement dans les régions où est interdit l’usage des habits longs, et ceci encore avec les précautions dues ».
    3 — « Le célébrant doit porter un habit convenable descendant jusqu’aux talons ».
    3 — « Les clercs qui ne porteraient pas les habits longs, ni la tonsure cléricale, seront gravement
    admonestés. Passé un mois après l’admonestation sans résultat, les clercs dans les ordres mineurs qui
    agiraient ainsi sans cause légitime, perdront ipso facto tout droit à l’ordre clérical ; ceux qui sont dans
    les ordres sacrés cependant, seront suspens des ordres reçus, et perdront ipso facto, sans aucune
    déclaration, tous les offices ecclésiastiques qu’ils avaient ; et s’ils passent notoirement à un autre état
    de vie étranger à l’état clérical et, de nouveau admonestés, ne se repentent pas, ils seront déposés
    trois mois après la dernière admonestation (CIC 136, § 3 ; 188, n. 7 ; 2379) ». (Les caractères italiques
    sont ceux du texte officiel.)

    — 29 —
    ❍ Il correspond mieux à l’évolution et aux nécessités actuelles de la sainte Église que les prêtres, dans leur vie sociale, se permettent tous les divertissements qui sont autorisés aux laïcs catholiques, ainsi que les attitudes qui ne sont pas interdites à ces derniers.

    ❑ A chaque état de vie correspondent non seulement des devoirs, mais aussi des manières d’être et des attitudes appropriées. Aussi, le bon prêtre s’abstiendra-t-il, non seulement de ce que la morale condamne expressément, mais de tout ce qui, selon l’expression consacrée, « non clericat ».

    Explication
      On ne peut réduire les règles essentielles de la morale à ce que peut ou ne peut pas faire un homme. Ainsi, les attitudes, les divertissements, les manières permises à un travailleur manuel ne conviennent pas à un magistrat, et un chef de famille ne se permet pas l’attitude et les modes d’un jeune célibataire, même si ce dernier respecte entièrement les prescriptions de la morale. Abolir les manières, attitudes et genre de vie qui conviennent au sacerdoce pour conduire le prêtre à mener une existence honnête, mais au niveau de celle des laïcs, c’est
    travailler à la laïcisation de la société et, ce qui est pire, à la laïcisation de l’Église.
    Lire, à ce sujet, le canon 138 4 du code de Droit canon.

    4 — « Les clercs doivent s’abstenir de tout ce qui ne convient pas à leur état : en conséquence, ils n’exerceront pas de métiers incompatibles avec la dignité cléricale, comme les métiers de boucher, de cabaretier ; ils ne se livreront pas aux jeux de hasard où il y a mise d’argent ; ils ne porteront les armes que s’ils ont un juste motif de craindre pour leur sécurité personnelle ; ils ne peuvent se livrer qu’avec modération à la chasse ordinaire, et ils s’abstiendront toujours de celle qui se fait à cor et à cri ; sauf dans le cas de nécessité ou pour tout autre juste motif approuvé par l’Ordinaire du lieu, ils n’entreront pas dans les cabarets et autres lieux semblables où l’on sert en détail du vin, de la bière et autres boissons ».

    — 30 —
    ❍ Dans l’ambiance de majesté et de distinction aristocratique qui entoure la hiérarchie, il y a une imitation des princes temporels. Or, l’évêque est pasteur et non prince. C’est pourquoi ce qui lui convient, ce ne sont pas les apparences du prince, mais la simplicité et la pauvreté du pasteur.

    ❑ Du fait que l’homme a une sensibilité, il est nécessaire que ce qui est extérieur révèle la nature des institutions.
    C’est pourquoi, plus une charge est élevée, et plus l’atmosphère qui l’entoure doit être solennelle.
    L’évêque a la dignité de prince dans l’Église de Dieu. Et la principauté ecclésiastique est une dignité plus éminente que la principauté civile. Aussi a-t-il l’obligation de s’entourer de la splendeur qui convient à sa charge. Mais, dans sa vie privée, il doit exceller dans la pratique du détachement de toutes les choses terrestres.

    Explication
      La phrase réfutée impressionne par un jeu de mots. Elle a fait du pasteur l’image de l’évêque. Mais elle insinue une identité entre les deux conditions, quand il n’y a entre elles qu’une analogie. Le pastorat des hommes a une dignité évidemment supérieure à celle du gouvernement des brebis. Il serait donc contre l’ordre des choses qu’un prince ou un évêque se présentât, en tout et partout, comme un pasteur de troupeau. Indirectement, cela rabaisserait les hommes au niveau des animaux. Il est bien évident que la splendeur épiscopale n’est, en aucune manière, incompatible avec la mansuétude, l’humilité, le détachement et le comportement paternel qui doivent distinguer l’évêque. C’est ainsi que le véritable évêque, tout en conservant la dignité de sa charge, peut et doit être le père de tous et de chacun de ses diocésains.

    — 31 —
    ❍ L’unique moyen de comprendre et de convertir la masse ouvrière est que le prêtre sorte du presbytère,
    aille vers la masse, se mêle à elle, en prenne les façons, la manière d’être et de vivre, etc., pour pouvoir exercer
    une influence sur son milieu.

    ❑ La connaissance de la masse ouvrière, ses problèmes d’ordre moral et religieux, exigent une certaine vie en
    commun avec elle, et l’exercice du ministère paroissial en donne normalement aux prêtres d’excellentes occasions. Dans le presbytère ou en dehors, le prêtre doit être entièrement et exclusivement prêtre, et s’abstenir de toutes fréquentations et manière qui « non clericant 1 ».
    Pour le reste, il le fera par l’entremise des laïcs affiliés aux diverses associations d’action catholique, congrégations mariales, etc., et associations spécialisées comme les cercles ouvriers.

    Explication
      La phrase réfutée, excepté dans de rares cas, intervertit les rôles : le prêtre sort du presbytère et se charge de la tâche normale des laïcs. C’est, de plus, une manifestation de la tendance à la laïcisation du clergé.
    Pour que l’on comprenne ce qu’il y a d’unilatéral dans cette proposition, il convient de remarquer qu’elle ne pense qu’à la conversion de la classe ouvrière, comme si, dans les autres classes sociales, le paganisme n’avait pas fait également de terribles ravages. Or, si nous admettons le principe que chaque classe ne peut être travaillée que par des prêtres qui lui appartiennent, nous devrions logiquement avoir des prêtres fermiers, des prêtres industriels, des prêtres généraux, des prêtres diplomates, etc., et il ne nous manquerait que des prêtres-prêtres. Les saints ont toujours redouté, pour eux et pour le clergé, ce genre de vie laïcisée. Et l’Église a toujours recommandé aux prêtres de s’en abstenir avec grand soin.

    1 — C’est-à-dire qui ne conviennent pas à un prêtre.

    Note complémentaire du Sel de la terre
    En complément de cette partie du Catéchisme des vérités opportunes sur l’Église, nous donnons quelques renseignements sur la Lettre pastorale des évêques du Brésil, citée au nº 28.
    Il s’agit d’une lettre pastorale : elle s’adresse donc au clergé et aux fidèles. Rédigée en 1950, elle s’intitulait :
    « Constitutions ecclésiastiques du Brésil. Nouvelle édition de la Lettre pastorale collective de 1915,
    adaptée au code de Droit canonique, au concile plénier brésilien, et aux récentes décisions des sacrées congrégations romaines. »
    Dans la lettre-préface à cette réédition, nous lisons :
    La « Lettre pastorale collective » de Nosseigneurs les archevêques et évêques des cinquante provinces ecclésiastiques méridionales du Brésil est un docuмent qui a mérité et mérite encore aujourd’hui la sympathie et l’admiration de tous ceux qui en connaissent le contenu.
    En réalité, il ne s’agit pas seulement d’une simple « Pastorale », mais d’une
    oeuvre qui, dépassant les limites d’une lettre par son extension, en conserve cependant les caractéristiques par sa présentation. Elle est le fruit de nombreux et grands efforts et sacrifices de pasteurs d’âmes zélés qui, en collaboration fraternelle et intelligente travaillèrent à établir les fondements d’une restructuration du gigantesque
    édifice de la vie spirituelle et religieuse du Brésil, sous l’orientation infaillible du vicaire du Christ sur la terre. [...]
    Une première édition préparatoire eut lieu en 1901. [...] Du 12 au 17 janvier 1915, eut lieu la cinquième et ultime réunion plénière. [...] A la parution du code de Droit canonique en 1917, cette lettre perdit en partie sa valeur juridique à cause des nombreuses innovations, abrogations et réformes des lois ecclésiastiques. Aussitôt on
    pensa à une adaptation et une actualisation, mais les circonstances ne le permirent pas. [...]
    Lors de la préparation de cette réédition, nous avons adopté les critères suivants : conserver, dans la mesure du possible, le texte original ; supprimer ce qui n’a plus force de loi ; ajouter les nouveautés les plus importantes, tant du code de Droit canonique que du concile plénier brésilien ; introduire les modifications indispensables de caractère juridique et liturgique. [...]
    Suit le texte de la Lettre pastorale proprement dite (de 1915) introduisant les Constitutions ecclésiastiques (1538 lois et directives, sans compter les appendices). C’est une magnifique lettre sur le devoir des pasteurs :
    [...] A chacun de nous, il a été dit : « Voici que je te constitue aujourd’hui sur les peuples [...] pour arracher et détruire [...] édifier et planter » (Jr 1, 10).
    Il ne suffit pas de connaître et réprouver le mal : il est nécessaire de le combattre, de l’arracher, de le détruire, de défricher, semer, planter et occuper par la culture des œuvres saintes le terrain envahi par les vices et les crimes [...] « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile » (1 Co 9, 16).
    Nous sommes responsables des péchés que nous n’empêchons pas quand nous devons le faire. [...]
    Suivent les noms des évêques de 1915 et de 1950 (parmi lesquels Dom Geraldo Sigaud, évêque de Jacarezinho, et Dom Antonio de Castro Mayer, évêque de Campos).
    Entre l’édition de 1915 et celle de 1950, eut lieu le concile plénier brésilien,
    convoqué par le cardinal D. Sébastien Beme da Silveira, légat apostolique, en
    date du 18 mars 1939 ; et réuni du 2 au 20 juin de la même année à Rio de Janeiro. Étaient présents 96 prélats brésiliens : 81 archevêques et évêques, parmi lesquels deux cardinaux, deux préfets apostoliques, dix administrateurs apostoliques, trois vicaires capitulaires. Les décrets préalablement élaborés furent
    consciencieusement examinés par tous les présents, sanctionnés par eux, puis soumis à l’approbation du Saint-Siège. Le 8 mars 1940, Sa Sainteté Pie XII daignait approuver et confirmer les 189 décrets, avec de petites modifications, autorisant le cardinal légat à les publier. La publication fut faite le 7 septembre 1940, avec
    entrée en vigueur le 7 mars 1941.
    Ce docuмent se fait donc l’écho, avec force de loi, d’une pratique
    constante et non démentie des évêques du Brésil, jusqu’au funeste concile Vatican II.
    (à suivre)
    La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
    The measure of love is to love without measure.
                                     St. Augustine (354 - 430 AD)


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  • Catéchisme des vérités opportunes qui s’opposent aux erreurs contemporaines par
    S. Exc. Mgr Antonio de Castro Mayer

    III. – Sur les méthodes d’apostolat Irénisme – interconfessionnalisme – terrain commun – polémique, etc.

    — 32 —
    ❍ Il importe plus de maintenir les âmes dans l’union de la charité que dans l’union de la vérité.

    ❑ L’union dans la charité est le fruit connaturel de l’union dans la vérité. Aussi, importe-t-il, avant tout, de
    maintenir l’intégrité de la foi, sans laquelle personne ne peut plaire à Dieu (saint Paul aux Hébreux, 11, 6).

    Explication
      Si l’on admet quelque chose de plus fondamental que la foi, on tombe nécessairement dans la conclusion que la différence entre les religions est secondaire et, par là même, que toute ligne de conduite interconfessionnelle est justifiée. Mais, en réalité, l’union dans la foi est si capitale que nous devons lui accorder une place essentielle et
    dominante dans nos relations, non seulement avec les personnes étrangères à l’Église, mais aussi avec les propres fils de celle-ci. A ces derniers, nous devons une charité spéciale.
      Mais, s’ils se servent de leur condition de catholiques pour diffuser l’erreur à l’intérieur de l’Église, ils doivent faire l’objet d’une vive et spéciale opposition de notre part. Il est superflu de noter que, même dans l’ardeur des luttes, il convient de conserver la charité.
      En outre, si l’objection était admise, toutes les luttes, parfois séculaires, que l’Église a soutenues pour conserver dans son sein l’intégrité de la foi, seraient inexplicables. Quand on pense que ces luttes ont entraîné persécutions, martyres et déchirures dans le corps mystique du Christ, on comprend l’importance capitale que Notre-Seigneur Jésus-Christ attacha à l’intégrité du dépôt sacré qu’il confia à son Église.

    — 33 —
    ❍ L’hérétique et le pécheur, personnes souvent bien intentionnées mais qui se trompent dans l’appréciation de la vérité et du bien, ne doivent jamais être combattus ou attaqués, du moins directement, pour leurs idées et leurs mœurs. Un tel procédé les éloignerait et les révolterait nécessairement.

    ❑ Dieu a donné à tous la grâce de reconnaître la vérité et le bien, de manière à ce que les erreurs commises de bonne foi à leur encontre, soient accidentelles et anormales. La véritable mansuétude chrétienne, qui n’implique aucune condescendance en matière de foi et de mœurs, est assurément plus efficace et en soi préférable dans les relations avec les hérétiques et les pécheurs. Mais, lorsque l’obstination résiste à l’action douce et persuasive de la charité, lorsque l’insolence cause du scandale au peuple fidèle, l’emploi des méthodes énergiques et combatives s’impose.

    Explication
      La proposition réfutée paraît simpliste et univoque. Il est certain qu’il existe des hérétiques, des infidèles ou des pécheurs susceptibles d’être attirés par la douceur chrétienne. Ce serait une erreur manifeste d’agir, dans les relations avec eux, avec une âpreté inutile. Cependant, il existe également (et à certaines époques, ils ont été
    malheureusement très nombreux) des hérétiques ou des pécheurs qui ne s’émeuvent que par la condamnation énergique de leur erreur et la crainte salutaire de l’état dans lequel ils se trouvent. Ce fut le cas de David repris par le prophète Nathan.
      A ce sujet, il est nécessaire de considérer également la diversité des tempéraments.
    Pour convertir l’Apôtre des Gentils, la Providence, toujours pleine d’amour, jugea nécessaire de le précipiter à terre.
      En outre, la pratique des méthodes d’apostolat ne doit pas prendre en unique considération les désirs de l’hérétique ou du pécheur, mais aussi et avant tout le salut et l’édification de ceux qui vivent dans la grâce de Dieu. Quand un hérétique ou un pécheur, au lieu de se tenir humblement dans l’ombre, se targue de son erreur et même la propage par la parole et par l’exemple, il est souvent indispensable de le contraindre par la force.
    Les saintes Écritures sont remplies d’exemples à l’appui de cette doctrine. Ainsi, Jésus-Christ avec les scribes et les pharisiens, saint Pierre avec Ananie et Saphire, saint Paul avec l’inceste de Corinthe.

    LE SEL DE LA TERRE Nº 39, HIVER 2001-2002
    — 34 —
    ❍ Haïssez l’erreur, aimez ceux qui se trompent, dit saint Augustin. Ainsi, on ne doit attaquer que les erreurs et les péchés, jamais ceux qui se trompent ou ceux qui pèchent.

    ❑ Haïssez l’erreur, aimez ceux qui se trompent, dit saint Augustin. Ainsi, doit-on attaquer l’erreur ou le péché en répandant la doctrine catholique, en combattant les fausses doctrines et en mettant les fidèles en garde contre ceux qui se trompent ou qui pèchent. Il n’y a en cela aucun manque de charité, car c’est faire œuvre de miséricorde que de corriger ceux qui se trompent et de mettre obstacle à la diffusion de l’erreur.

    Explication
      La phrase réfutée semble supposer que tout châtiment envers ceux qui se trompent est un acte d’hostilité à leur égard. L’Église enseigne, au contraire, qu’en soi, c’est faire œuvre de miséricorde. Il n’en serait pas ainsi si ce traitement était dicté par la haine, l’envie ou l’esprit de diffamation, ou s’il était excessif ou inopportun.
      Toute l’histoire de l’Église, depuis ses origines et même avant sa fondation, dans ses commencements, et jusque dans l’enseignement de ses derniers docteurs (saint François de Sales, par exemple), est remplie d’attitudes véhémentes contre les pécheurs et les hérétiques. Rappelons-nous le « genimina viperarum [race de vipères] » de saint Jean-Baptiste contre les Pharisiens (Lc 3, 7), et les « sépulcres blanchis » et autres « hypocrites »
    (Mt 23, 27) de Jésus-Christ contre ce même genre de personnes, etc.

    — 35 —
    ❍ Dans les relations avec les infidèles et les pécheurs, il est préférable de passer sous silence les vérités de la doctrine catholique sur lesquelles ils ne sont pas d’accord et l’austérité des préceptes moraux qu’ils transgressent, et de mettre en relief, principalement, les vérités qu’ils professent et la suavité des préceptes évangéliques. C’est en maintenant sur un terrain commun les uns et les autres que les catholiques arrivent à s’attirer les sympathies des infidèles et des pécheurs, et à les convertir.

    ❑ La doctrine et la morale de l’Église sont parfaites et propres à éveiller l’admiration des hommes, autant dans leurs dispositions ardues que dans leurs principes consolants.
    De plus, il ne manque à aucun homme l’aide intérieure de la grâce. Il est sans doute plus opportun, face à certains états d’esprit déterminés, de mettre en relief les vérités et les préceptes les plus facilement acceptables.
    Mais il s’agit là de situations exceptionnelles. Normalement, il est nécessaire d’insister sur tous les points de la
    doctrine catholique.

    Explication
      L’objection pèche par naturalisme, car elle fait abstraction de la grâce divine qui rend aimable la croix de Jésus-Christ. Ce fut en prêchant Jésus-Christ crucifié que les apôtres conquirent le monde et non pas en usant de la tactique du dénominateur commun. Telle est la doctrine de saint Pie X, comme on peut le vérifier dans l’encyclique Jucunda sane publiée à l’occasion du centenaire de saint Grégoire le Grand. Le pape y fait l’éloge de ce saint, spécialement parce qu’il méprisa les conseils dictés par la prudence de la chair, pour se présenter avec l’austérité d’un prédicateur du Christ crucifié, comme l’avaient fait les apôtres, dans une Rome cultivée, civilisée et brillante, où tout paraissait exposer à l’échec un prêcheur venant au nom d’un condamné mort sur une croix.
    On lira également les propositions 93 et 94 (DS 2493 et 2494) de Quesnel condamnées par Clément XI. Elles font l’éloge de la mansuétude et de la charité au mépris de la fermeté dans la foi 1.
    1 — Proposition 93 (condamnée) : « Jésus guérit quelquefois les blessures que la précipitation des premiers
    pasteurs inflige sans son ordre ; Jésus rétablit ce que ceux-ci retranchent par un zèle inconsidéré. » Proposition 94
    (condamnée) : « Rien ne donne une plus mauvaise opinion de l’Église à ses ennemis, que d’y voir exercer une
    domination sur la foi des fidèles, et entretenir des divisions pour des choses qui ne blessent ni la foi ni les mœurs. »

    — 36 —
    ❍ La polémique entre catholiques, ou entre ceux-ci et des a-catholiques, qui sacrifie nécessairement la charité, est toujours un mal. Ceux qui polémiquent, s’ils ne sont pas hérétiques en matière de vérité, le sont en matière de charité.

    ❑ La polémique juste et opportune est un des moyens d’encourager la charité en contribuant à unir les esprits dans la vérité. Refuser de polémiquer peut, dans certains cas, constituer ce qu’on est en droit d’appeler une « hérésie » contre la charité.

    Explication
      L’objection suppose que les divergences d’ordre dogmatique sont laissées de côté. Or, ce sont les divergences de cet ordre qui donnent lieu aux polémiques. Cette attitude mentale, qui caractérise l’« iréniste », peut conduire à l’interconfessionnalisme théorique, avec ses funestes répercussions dans l’ordre pratique, car sa suite naturelle est l’indifférentisme religieux. Elle est implicitement condamnée dans la sanction de la proposition 94 de Quesnel, comme nous l’avons vu ci-dessus, car cette proposition attaque la fermeté de la sainte Église, et il s’agit, comme il ressort de l’histoire, de fermeté dans la foi puisque les Jansénistes taxaient la sainte Église d’exagérée dans ses exigences.
      Si la proposition réfutée était vraie, la lutte contre les adversaires extérieurs de l’Église et surtout contre ses ennemis intérieurs, qui, déguisés en brebis, cherchent à décimer le troupeau, se révélerait impossible. Saint Pie X, dans une lettre à Son Éminence le cardinal Ferrari, archevêque de Milan, montre combien une telle ligne de conduite peut être nocive à l’Église, évoquant « ceux qui ont résumé dans leurs écrits toutes les erreurs du
    modernisme, qui ont feint une soumission extérieure pour rester dans la bergerie et propager plus sûrement les erreurs, qui continuent le travail néfaste avec des lectures et avec des congrès secrets, et qui, d’un seul mot, trahissent l’Église en faisant semblant d’être de ses amis. […] Qui ne voit la triste impression et le scandale qu’apporte aux âmes le fait de considérer comme catholiques ces misérables que, par ordre de l’apôtre saint Jean, nous devrions refuser de saluer ? » (Disquisitio ou : enquête des procès de béatification et de canonisation de saint Pie X ; dans : Conduite de saint Pie X dans la lutte contre le modernisme, Versailles, publications du Courrier de Rome, 1996 , page 171-172).

    — 37 —
    ❍ Il convient d’employer la plus grande énergie à réduire ceux qui manifestent de l’intransigeance dans la défense de la doctrine catholique. Il n’y a pas d’erreur plus pernicieuse que celle de l’intransigeance dans la vérité.

    ❑ L’intransigeance est à la vertu ce que l’instinct de conservation est à la vie. Une vertu sans intransigeance
    ou qui hait l’intransigeance n’existe pas ou n’en conserve que l’apparence. Une foi sans intransigeance, ou bien est
    déjà morte, ou bien ne vit qu’extérieurement, car elle a perdu l’esprit [de foi]. La foi étant le fondement de la vie
    surnaturelle, la tolérance en matière de foi est le point de départ de tous les maux, notamment des hérésies.

    Explication
      Saint Pie X signalait comme l’une des caractéristiques des modernistes, la tolérance extrême envers les ennemis de l’Église et l’intolérance acerbe contre ceux qui défendaient énergiquement l’orthodoxie. De fait, il y a dans cette attitude une incohérence flagrante, car ceux qui font état de tolérer toutes les opinions devraient tolérer ceux qui soutiennent les droits de l’intransigeance. Cette contradiction est commune à tous les hérésiarques. Les
    diverses sectes s’unissent avec une grande cordialité et ferment les yeux sur leurs points de divergence chaque fois qu’il s’agit de combattre l’intransigeance de l’Église en matière de foi. Nous avons dans cette attitude un critère pour apprécier l’importance singulière qu’a, dans la vie de l’Église, l’intolérance en matière doctrinale 1.

    Il est évident que les excès en matière d’intransigeance, du fait même qu’ils sont des excès, doivent être réprimés, puisque tout excès est un mal. Mais il convient de ne pas oublier les savantes normes dictées par le Saint-Siège, sous le pontificat de saint Pie X, concernant la manière de corriger l’un ou l’autre excès des courageux polémistes
    catholiques engagés dans le combat contre l’erreur. Écrivant au Cardinal Ferrari, archevêque de Milan, au sujet du journal La Riscossa (« Le Réveil ») qui s’alarmait de l’infiltration moderniste dans cet archidiocèse, Son Éminence le cardinal De Lai, secrétaire de la sacrée congrégation Consistoriale, disait :

            "Tous ces faits mis ensemble expliquent pourquoi il y a des bons qui ont peur pour leur cher diocèse, et qui élèvent la voix pour donner l’alarme. Peut-être exagèrent-ils dans la manière. Mais, dans les batailles, qui peut accuser gravement les défenseurs s’ils ne calculent pas avec justesse les coups, et dépassent peut-être les limites de l’inculpatæ tutelæ [la défense irréprochable] ? C’est ainsi que répondait saint Jérôme à ceux qui lui reprochaient son ardeur contre les hérétiques et les mécréants de son époque.
            C’est aussi ce que je dirai, moi aussi, à Votre Éminence au sujet de l’attaque de La Riscossa. On ne peut pas nier, après les cas cités ci-dessus [modernisme à Milan], que le mal existe. Donc il n’est pas, et on ne peut pas dire qu’il soit totalement injuste que certains aient élevé la voix. A-t-on exagéré dans les manières ? Mais il convient d’excuser et ce n’est pas entièrement un mal si, en donnant l’alarme, on a  exagéré d’autant le danger. Il vaut toujours mieux exagérer en avertissant du mal que se taire et le laisser grandir."
    [Disquisitio, Conduite de saint Pie X…, page 182.]
    Un peu plus loin, la même lettre continue :

        "Enfin, dans une telle licence de la mauvaise presse, et dans les dangers qui entourent l’Église de toutes parts, il ne semble pas bon de lier les mains des défenseurs, pas plus que de les frapper et de les désavouer à chaque petite erreur." [Ibid.]

      Et le saint pape lui-même, écrivant le 12 août 1909 à Mgr Mistrangelo, archevêque de Florence, au sujet d’une modification ordonnée à la rédaction du journal catholique L’Unità Cattolica (« L’Unité catholique »), déclarait :

        "Il me semble, d’après ce long entretien, rencontrer en lui [l’avocat Calligari, directeur de L’Unità Cattolica] l’homme de paix […] qui acquiesce tant qu’il s’agit de respecter les personnes. Mais je ne voudrais pas que, par amour de la paix, on en arrive à des transactions, et que pour ne pas avoir de soucis, l’on diminue la véritable
    mission de L’Unità Cattolica qui est de garder les principes, d’être une sentinelle avancée capable de donner l’alarme (exactement comme l’oie du Capitole) et de réveiller les dormeurs. Dans ce cas, L’Unità n’aurait plus sa raison d’être.' [Disquisitio, Conduite de saint Pie X…, page 137.]
    1 — Sur cette question, voir le texte du cardinal Pie : « l’intolérance doctrinale », dans Le Sel de la
    terre 21, p. 141. (NDLR.)

    — 38 —
    ❍ On doit louer les  catholiques qui se joignent à des personnes affiliées à d’autres religions, comme
    des protestants, des schismatiques, etc., pour assurer la défense des valeurs communes à toutes les confessions chrétiennes.

    ❑ La collaboration des fidèles avec les a-catholiques, pour atteindre des objectifs communs, n’est permise par l’Église qu’à titre occasionnel. Beaucoup plus grave serait le fait, pour les catholiques, de s’associer d’une manière stable à une organisation définie, avec des personnes d’autres religions.
    L’Église regarde ces associations avec appréhension et les interdit. Lorsque, dans une circonstance exceptionnelle, elle se considère comme obligée, pour éviter de plus grands maux, de tolérer des collaborations de cette nature, elle le fait avec crainte et à regret.

    Explication
      Le danger de ces collaborations peut être aggravé par la nature même de la fin qu’elles se proposent : ainsi, une collaboration ayant une fin exclusivement technicoprofessionnelle est moins grave qu’une collaboration poursuivant des buts culturels.
      L’« Association chrétienne des Jeunes », par exemple, est interdite par l’Église parce que, réunissant des chrétiens de diverses sectes, elle essaye d’y associer également des catholiques pour leur procurer une éducation morale « chrétienne », c’est-à-dire une vague religiosité, pouvant servir aussi bien aux hérétiques qu’aux catholiques.
      Une des raisons pour lesquelles saint Pie X condamna Le Sillon, mouvement démocratico-culturel et social, imbu de modernisme, de Marc Sangnier, fut son caractère interconfessionnel (voir la lettre apostolique Notre charge apostolique, AAS, 2, 625 sq.). Entre autres choses, le bienheureux souverain pontife écrit :

      […] « Tous, catholiques, protestants et libres penseurs, auront à cœur d’armer la jeunesse, non pour une lutte fratricide, mais pour une généreuse émulation sur le terrain des vertus sociales et civiques » [Déclaration de Marc Sangnier, Paris, mai 1910]. Ces déclarations et cette nouvelle organisation de l’action sillonniste appellent de bien graves réflexions. Voici fondée par des catholiques une association interconfessionnelle, pour travailler à la réforme de la civilisation, œuvre religieuse au premier chef ; car, pas de vraie civilisation sans civilisation morale et pas de vraie civilisation morale sans la vraie religion : c’est une vérité démontrée, c’est un fait d’histoire. […] Que penser d’une association où toutes les religions et même la libre-pensée peuvent se manifester hautement, à leur aise ? Car les sillonnistes, qui, dans les conférences publiques et ailleurs, proclament fièrement leur foi individuelle, n’entendent certainement pas fermer la bouche aux autres et empêcher le protestant d’affirmer son protestantisme et le sceptique, son scepticisme 1.
    1 — Les Doctrines modernes, saint PIE X (Lamentabili, Pascendi et Lettre sur le Sillon), Paris, Nouvelle Aurore,
    1976, p. 99-100.

    — 39 —
    ❍ Les associations catholiques qui ont pour but de procurer aux catholiques exclusivement, une activité
    culturelle, récréative, sportive, etc., afin qu’ils soient séparés des milieux malsains, ne doivent pas être louées. Il est, en effet, préférable que les catholiques fréquentent les milieux les plus variés pour y exercer l’apostolat par
    l’infiltration et la conquête.

    ❑ Les associations catholiques qui ont pour but de procurer aux catholiques exclusivement, une activité
    culturelle, récréative, sportive, etc., doivent être louées, car elles concourent efficacement à préserver
    les bons des occasions prochaines de péché et leur procurent des moyens excellents de formation et de
    sanctification. Les laïques ainsi formés seront des apôtres de grande valeur pour la diffusion de la doctrine catholique dans les différents milieux avec lesquels ils seront en contact par leurs devoirs d’état quotidiens.

    Explication
      La proposition réfutée fait abstraction de ce qui est fondamental en matière d’apostolat : la formation d’élites pour la diffusion du règne du Christ. Or, de telles élites ne peuvent être formées que dans des milieux de haute tenue religieuse qui ne s’obtiennent pas sans une sélection des éléments qui les fréquentent.
      De plus, l’objection a aussi l’inconvénient de ne pas distinguer entre les milieux qu’un catholique est obligé de fréquenter par devoir d’état, et ceux dans lesquels il s’expose volontairement. Dans le premier cas, le jeune par exemple, qui est obligé, pour ne pas mourir de faim, d’accepter un emploi dans un lieu dangereux pour son salut, pourra compter sur les grâces spéciales de Dieu, et résistera d’autant plus fortement que sa formation aura été plus soignée. Dans le deuxième cas, le jeune qui, sans aucun motif de nécessité, fréquente des lieux dangereux, s’expose volontairement au danger et court le risque de voir s’accomplir pour lui la parole de l’Esprit-Saint : « Qui amat periculum in illo peribit – Celui qui aime le péril y trouvera sa perte » (Eccli 3, 24  1).
      Que la phrase incriminée loue une attitude contraire à la Tradition de l’Église et aux désirs du Saint-Siège pour les temps actuels  2,  cela se voit par les recommandations que donne le pape Pie XII aux membres de l’Association catholique internationale des Œuvres de la protection de la jeune fille. Dans une allocution adressée aux membres de cette association réunis en congrès, à Rome, en septembre 1948, le pape loue leur labeur incessant :

        "Vous procurez la sécurité morale de la jeune fille grâce à des centres d’accueil, à des foyers, à des hôtels, à des pensions et restaurants irréprochables, grâce à des secrétariats, à des services de placement et d’orientation, à des permanences dans les gares et les ports maritimes et aéronautiques "  3.
    Comme on le voit, le souverain pontife juge que l’efficacité de l’apostolat demande un éloignement du milieu mondain. Les personnes auprès desquelles on veut être apôtres doivent pouvoir être attirées par des milieux à la fois sains, agréables et imprégnés de profonde moralité. Dans de tels milieux, la formation religieuse, l’acquisition des qualités domestiques, le développement des dons artistiques et l’éducation de la jeunesse à la vie pratique, peuvent être atteints aisément et avec succès (voir Civiltà Cattolica, 16 octobre 1948).
    1 — Vulgate : 3, 27.
    2 — En 1953.
    3 — Docuмents pontificaux de Sa Sainteté Pie XII, Année 1948, Paris-Louvain, Labergerie-Warny, 1950, p. 357.

    — 40 —
    ❍ Seule l’autorité ecclésiastique a compétence pour réprimer les erreurs relatives à la foi qui se manifestent dans les milieux catholiques. Les simples fidèles ont seulement le droit de dénoncer ces erreurs à l’Ordinaire du lieu. Il ne leur est pas permis d’attaquer ces erreurs par oral ou par écrit, sauf si l’autorité ecclésiastique en a déjà pris l’initiative.

    ❑ Toute doctrine ne peut être officiellement condamnée, au nom de l’Église, que par l’autorité ecclésiastique. Cependant, tout fidèle mis en présence d’une doctrine déjà condamnée a le droit et même, souvent, le devoir de la combattre. S’il est en présence d’une doctrine non encore expressément condamnée, mais incompatible avec
    les enseignements de l’Église, il peut et même, souvent, il doit, sous sa responsabilité personnelle, souligner
    une telle incompatibilité et s’opposer, dans la mesure du possible, à la propagation de cette doctrine.

    Explication
      La proposition réfutée va à l’encontre de toute la Tradition de l’Église. En effet, la condamnation des erreurs des hérésiarques en général, comme Luther et Jansénius, et, plus récemment, les Modernistes, fut toujours précédée de controverses polémiques tenues entre les novateurs et quelques défenseurs éminents de la foi, ecclésiastiques ou laïques, agissant sous leur propre responsabilité 4. Cependant, il est toujours méritoire d’informer l’autorité ecclésiastique, qui ne peut voir que d’un bon œil la lutte entreprise par les fidèles contre l’erreur, dans la justice et dans la charité.

    4 — Dom Guéranger, dans sa célèbre Année liturgique, à la fête de saint Cyrille d’Alexandrie (9 février), a donné
    un commentaire qui illustre cette vérité : « Quand le pasteur se change en loup, c’est au troupeau à se défendre tout d’abord. Régulièrement sans doute, la doctrine descend des évêques au peuple fidèle, et les sujets, dans l’ordre de la foi, n’ont point à juger leurs chefs. Mais il est dans le trésor de la révélation des points essentiels dont tout chrétien, par le fait de son titre de chrétien, a la connaissance nécessaire et la garde obligée. » Texte cité dans Le Sel de la terre 36, p. 245. (NDLR.)

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  • IV. – Sur la vie spirituelle

    — 41 —
    ❍ L’union à Dieu consiste dans le contact vital et expérimental avec Jésus-Christ ; l’union morale, à savoir l’exercice des vertus, est accessoire pour arriver à cette fin.

    ❑ Il n’est pas possible de distinguer en Dieu son essence et sa sainteté. D’où la fausseté de toute conception qui prétend, d’une manière formelle ou implicite, affirmer qu’une union avec l’essence divine est possible sans qu’il y ait union simultanée avec la sainteté de Dieu. De même est fausse toute séparation établie entre l’union ontologique et l’union morale par l’obéissance aux préceptes, puisque toutes deux résultent de la grâce sanctifiante, des vertus infuses et des grâces actuelles. Quant à la grâce et à son action, elles échappent d’elles-mêmes au domaine de l’expérience (voir III, q. 112, a. 5 c – De Veritate q. 10, a. 10, c.).

    Explication
      La proposition réfutée a un fort caractère moderniste, en tant qu’elle fait consister la vie spirituelle, d’une manière prépondérante et même exclusive, dans une union ontologique et expérimentale avec Dieu, en un domaine qui est au-delà des facultés de l’âme, domaine pour ainsi dire transpsychologique.
        Dans l’ordre moral, elle conduit au laxisme. Si l’union à Dieu ne se fait pas par l’union à la sainteté divine, tous les préceptes sont accessoires et superflus, puisqu’ils ne conduisent pas à la fin ultime qui est Dieu. On dirait que se forment deux classes spirituelles : l’une pour ceux qui volent vers les déserts de l’union ontologique et expérimentale avec Dieu, l’autre pour ceux qui, guidés par les moralistes, se traînent sur le terrain des préceptes.
    L’union à Dieu découle avant tout d’une participation à la nature divine qui se réalise par la grâce sanctifiante. Mais elle n’est pas indépendante de l’accomplissement des préceptes sans lequel elle ne peut subsister ni se développer. Saint Thomas, en effet, affirme (I-II, q. 4, a. 4, c.) :
      Rectitudo voluntatis requiritur ad beatitudinem et antecedenter et concomitanter.
    Antecedenter quidem, quia rectitudo voluntatis est per debitum ordinem ad finem ultimum. Finis autem comparatur ad id quod ordinatur ad finem, sicut forma ad materiam. Unde sicut materia non potest consequi formam, nisi sit debito modo disposita ad ipsam, ita nihil consequitur finem, nisi sit debito modo ordinatum ad ipsum. Et ideo nullus potest ad beatitudinem pervenire, nisi habeat rectitudinem voluntatis. Concomitanter autem, quia, sicut dictum est, beatitudo ultima consistit in visione divinae essentiae, quae est ipsa essentia bonitatis. Et ita volontas videntis Dei essentiam, ex necessitate amat quidquid amat, sub ordine ad Deum.

      La rectitude de la volonté est requise pour la béatitude, et à titre d’antécédent et par concomitance. A titre d’antécédent, car ce qui rend droite la volonté, c’est son juste rapport à la fin ultime. Or la fin, à l’égard de ce qui est ordonné à elle, joue le même rôle que la forme à l’égard de la matière. De même donc qu’une matière ne
    peut obtenir une forme si elle n’y est convenablement disposée, ainsi rien ne peut parvenir à sa fin sans être dans un juste rapport avec elle. Et c’est pourquoi nul ne peut parvenir à la béatitude à moins d’avoir une volonté droite.
    Cette rectitude est également requise par concomitance ; car, comme nous l’avons dit, la suprême béatitude consiste dans la vision de l’essence divine, qui est l’essence même du bien. Et ainsi, la volonté de celui qui voit Dieu par essence aime nécessairement par référence à Dieu tout ce qu’elle aime.

    — 42 —
    ❍ Pour l’union du fidèle avec le Christ, l’effort, dans la pratique de la vertu et des préceptes, est secondaire et presque inutile. Donner une grande importance à la pratique des vertus et se préoccuper de l’obéissance aux commandements est du « moralisme » ou du « vertucentrisme » répréhensible.

    ❑ L’effort du fidèle dans la pratique de la vertu et des préceptes est indispensable pour obtenir, conserver et augmenter l’union avec le Christ, fruit de la grâce sanctifiante. Se préoccuper de pratiquer les commandements est légitime et nécessaire, à condition que cette pratique ne tourne pas à l’obsession.

    Explication
      Étant donné la faiblesse humaine, l’homme manifeste très facilement la tendance à considérer ce qui l’élève – la grâce sanctifiante – sans considérer ce qui lui impose des obligations – la loi morale. On comprend très bien que l’Église, comme une bonne mère, insiste sur ce qui est le plus difficile, à savoir la pratique des commandements. Il ne peut y avoir aucun « moralisme » répréhensible en cela. Telle fut d’ailleurs l’attitude du Divin fondateur de l’Église, Jésus-Christ. Ce qui serait condamnable, ce serait d’arriver à l’exagération du pélagianisme, en concevant l’acte de vertu comme purement naturel, indépendant de la grâce et capable d’obtenir en lui-même l’union à Dieu.

    — 43 —
    ❍ Le « moralisme » ou « vertu-centrisme » fixe l’attention du fidèle sur lui-même en la déviant de Dieu.
    L’homme avec ses problèmes moraux tend à être le centre de la vie spirituelle. C’est le hideux «  anthropocentrisme » diamétralement opposé à la véritable piété catholique qui est « théocentrique ».

    ❑ Quand le fidèle est tourné vers lui-même pour combattre un défaut ou acquérir une vertu, il pratique un acte excellent tendant à l’unir à Dieu, du moment qu’il le fait pour un motif surnaturel. Il n’y a en cela rien
    d’« anthropocentrique » puisque l’homme ne se tourne vers soi que pour mieux s’unir à Dieu. Car, selon la scolastique, ce qui est premier dans l’intention est dernier dans l’exécution.

    Explication
      Comme la rectitude de la volonté est un moyen nécessaire pour arriver à Dieu, tout ce que fait le chrétien pour son progrès dans la vertu et son perfectionnement moral a comme centre et mesure Dieu-même et non l’homme en soi. Toute ascèse chrétienne est donc, nécessairement, théocentrique.
    D’ailleurs, la proposition réfutée ne constitue pas une erreur nouvelle. Déjà, parmi les propositions de Miguel de Molinos condamnées par Innocent XI (20 novembre 1687), la neuvième, entre autres, censure également cette attitude envers ses propres défauts (DS 2209  1).
    Récemment, le pape Pie XII a consacré plus d’une page de Mediator Dei (AAS 39,
    pages 533 à 537) à la censure de cette fausse position ascétique de beaucoup de catholiques qui prétendent supprimer l’effort pour vaincre les passions et s’unir au Christ.
    1 — Erreur quiétiste nº 9 : « L’âme ne doit se souvenir ni d’elle-même ni de Dieu, ni d’aucune chose, et dans la
    voie intérieure toute réflexion est nocive, même la réflexion sur ses actions humaines et sur ses propres défauts. »

    — 44 —
    ❍ La spiritualité des Exercices de saint Ignace et, en général, les écoles de spiritualité nées sous l’influence
    de la Contre-Réforme, comme celle de saint Jean-de-la-Croix, de saint Alphonse de Liguori, etc., sont imprégnées d’« anthropocentrisme », de « vertucentrisme », de « moralisme ». Elles furent utiles en tant que réaction contre le protestantisme ; mais elles n’ont pas de valeur durable, parce qu’elles ont fait dévier la piété chrétienne du véritable chemin théocentrique.

    ❑ Les écoles de spiritualité qui ont surgi après la Réforme protestante comme toutes celles qui sont approuvées par l’Église, bien qu’elles aient entre elles des différences explicables par la liberté avec laquelle l’Esprit-Saint instruit et guide les saints, sont, en fait, toutes « théocentriques » et conservent leur efficacité pour tous les temps, comme le démontrent les recommandations réitérées du Saint-Siège, même de nos jours, des Exercices de
    saint Ignace et, en général, des écoles de spiritualité (voir, outre Mens Nostra de Pie XI sur les Exercices Spirituels de saint Ignace, Mediator Dei, AAS 39, page 585 et 586).

    Explication
      Il est si essentiel à toute spiritualité d’être « théocentrique » que la moindre déviation sur ce point constitue une très grave erreur. On ne comprend pas comment l’Église, qui est infaillible en tout ce qui se rapporte à l’édification des fidèles, aurait pu approuver des méthodes qui éloignent de Dieu, ni que les fidèles arrivent à des vertus héroïques en appliquant de telles méthodes. La proposition réfutée jette implicitement le doute sur
    l’infaillibilité de l’Église.

    — 45 —
    ❍ Une spiritualité qui insiste beaucoup sur la méditation et, en général, sur les pratiques de piété par lesquelles l’individu exerce son pouvoir pour éveiller en lui le bon propos, sont des moyens de sanctification secondaires, voire même imparfaits. Seules les pratiques liturgiques, en vertu de leur action « ex opere operato », assurent le plein développement de la vie spirituelle et de l’union à Dieu.

    ❑ Selon Mediator Dei, l’intensité de la participation des fidèles aux actes liturgiques est conditionnée par les dispositions intérieures. La méditation, l’examen de conscience et autres pratiques semblables furent toujours préconisées par l’Église comme moyens indispensables pour acquérir ces dispositions. Il serait également téméraire de mépriser la prière privée pratiquée en vue d’obtenir la même fin. En conséquence, la participation aux actes liturgiques, l’oraison privée, la méditation et autres pratiques semblables, se complètent mutuellement, et le fidèle ne doit pas choisir entre l’une ou l’autre, mais les utiliser toutes.

    Explication
      La proposition réfutée serait vraie si, pour un adulte, une sanctification « ex opere operato » qui le dispensât d’acquérir les dispositions intérieures était possible. Mais Mediator Dei lie la « piété objective » ou liturgique à la « piété subjective » ou privée, en montrant que les deux sont légitimes et que l’une ne peut se passer de l’autre (AAS 39, page 532 et suivantes).
    De plus, à l’intention du Brésil spécialement, la sacrée congrégation des Séminaires enseigne que : « Le renoncement à soi-même, à ses propres manières de voir, au désir de dominer et de se faire admirer, ne s’acquiert que par l’oraison, par la méditation de la vie de Jésus et des paroles prononcées par lui pour toutes les générations, et par l’exercice patient et contrôlé au moyen de fréquents examens de conscience. Sans la victoire dans ce secteur du combat spirituel, il n’est pas possible d’arriver à l’humilité chrétienne requise pour être
    totalement soumis à la volonté de Dieu » (AAS 42, page 843).

    — 46 —
    ❍ Une spiritualité alimentée exclusivement par les pratiques liturgiques qui constituent la piété officielle, est le
    propre de l’Action Catholique, apostolat officiel de l’Église. En revanche, c’est le propre des associations religieuses (Apostolat de la prière, pieuses unions, etc.), entités d’apostolat purement privé, de cultiver la piété
    extra-liturgique.

    ❑ L’obligation de cultiver la piété liturgique et extra-liturgique est commune à tous les fidèles, indistinctement, à
    quelque association qu’ils appartiennent.

    Explication
      Comme nous le disons ci-dessus, le pape Pie XII insiste, dans Mediator Dei, pour dire que les deux piétés sont complémentaires et indispensables.

    — 47 —
    ❍ La dévotion aux saints et spécialement à Notre-Dame fait dévier facilement les fidèles de la piété vraiment catholique, qui est, par excellence, « christocentrique ».

    ❑ La dévotion aux saints et particulièrement à la très sainte Vierge ne porte en aucune manière les fidèles à s’éloigner de Jésus-Christ. Elle constitue, au contraire, un canal excellent, normal et, en ce qui concerne la très sainte Vierge, nécessaire, pour arriver à l’union avec Jésus-Christ.

    Explication
      L’ignorance religieuse et certaines superstitions des païens portent beaucoup de personnes à faire des saints l’objet d’une fausse piété, abus qui, d’ailleurs, se pratique aussi à l’égard du Christ lui-même. C’est ce que l’on constate parfois dans certaines régions de notre diocèse ou d’autres parties du Brésil. Le risque n’est pas à proprement parler dans la dévotion aux saints, mais dans l’ignorance religieuse et, surtout, dans les superstitions
    héritées des ancêtres païens. La dévotion aux saints et à Notre-Dame, telle qu’elle existe chez la plupart des personnes pieuses de nos villes, ne présente ni exagération, ni symptômes laissant craindre que de tels abus puissent se produire. Du reste, selon saint Thomas (IV Sent. d. 45, q. 3, a. 2), nos prières doivent monter au trône de Dieu par le même canal par lequel descendent les bienfaits divins : de même que ceux-ci ont pris pour chemin l’intercession des saints, c’est par la dévotion aux saints que nous devons approcher de Dieu.
      Sur le rôle nécessaire de Marie dans notre sanctification, saint Pie X a écrit : « Nous tous donc, qui, unis au Christ, sommes, comme parle l’Apôtre, les membres de son corps issus de sa chair et de ses os [Ep 5, 30], nous devons nous dire originaires du sein de la Vierge, d’où nous sortîmes un jour à l’instar d’un corps attaché à sa tête. » Et plus loin : « Si donc la bienheureuse Vierge est tout à la fois Mère de Dieu et des hommes, qui peut douter qu’elle
    ne s’emploie de toutes ses forces, auprès de son Fils, tête du corps de l’Église [Col 1, 18], afin qu’il répande sur nous, qui sommes ses membres, les dons de sa grâce, celui, notamment, de le connaître et de vivre par lui [1 Jn 4, 9]. » Enfin : « Marie, comme le remarque justement saint Bernard, est l’aqueduc [Sermon pour la Nativité de la Vierge “De aquæductu”, nº 4] ou, si l’on veut, le cou qui relie le corps à la tête et par lequel la tête exerce son pouvoir et ses influences sur le corps » (Encyclique Ad diem illum, 2 février 1904 1).
    1 — Voir Docuмents pontificaux de Sa Sainteté saint Pie X, t. I (1903-1908), Versailles, Publications du Courrier de
    Rome, 1993, p. 98.

    — 48 —
    ❍ L’assiduité au sacrement de pénitence constitue une dévotion blâmable. L’Église se contente de demander que
    les fidèles reçoivent une fois par an ce sacrement. La confession faite au pied de l’autel lorsqu’on participe à la sainte messe suffit pour obtenir le pardon des péchés.

    ❑ L’assiduité au sacrement de pénitence est encouragée par l’Église et recommandée par tous les docteurs de la vie spirituelle. Le Confiteor de la messe ne peut pardonner les péchés mortels. Quant au pardon des péchés véniels, il peut être obtenu par les sacramentaux, comme, par exemple, le Confiteor à la messe, lorsqu’il y a repentir et ferme propos. Une personne qui renoncerait à la pratique de la confession fréquente pour se contenter uniquement des sacramentaux se priverait des avantages et des grâces précieuses que le sacrement de pénitence confère seul, et agirait contre la manière de penser de la sainte Église.

    Explication
    La proposition réfutée soutient une opinion ascétique condamnée par la Tradition de l’Église et récemment proscrite par Mystici Corporis Christi de Pie XII, le 29 juin 1943, dont voici les paroles :
      "C’est ce qui résulte aussi de la doctrine erronée d’après laquelle il ne faut pas faire tant de cas de la confession fréquente des fautes vénielles, puisqu’elle le cède en valeur à cette confession générale que l’Épouse du Christ, avec ceux de ses enfants qui lui sont unis dans le Seigneur, fait tous les jours par ses prêtres avant de monter
    à l’autel."  [DS 3818.]

    Et il insiste plus loin :
        "Pour avancer avec une ardeur croissante dans le chemin de la vertu, Nous tenons à recommander vivement ce pieux usage, introduit par l’Église sous l’impulsion du Saint-Esprit, de la confession fréquente, qui augmente la vraie connaissance de soi, favorise l’humilité chrétienne, tend à déraciner les mauvaises habitudes, combat la négligence spirituelle et la tiédeur, purifie la conscience, fortifie la volonté, se prête à la direction spirituelle, et, par l’effet propre du sacrement, augmente la grâce." [DS 3818.]

    Et il termine par cette amère censure :
        "C’est pourquoi ceux qui méprisent et font perdre l’estime de la confession fréquente à la jeunesse ecclésiastique savent qu’ils font une chose contraire à l’Esprit du Christ et très funeste au Corps Mystique du Sauveur." [AAS 35, page 235.]

    — 49 —
    ❍ Les ordres des supérieurs doivent être exécutés quand ils semblent prudents aux sujets. Obéir à des ordres
    imprudents dénote une servilité incompatible avec la dignité du chrétien.

    ❑ L’obéissance chrétienne consiste à tenir compte de tous les ordres émanant des supérieurs légitimes, du moment qu’ils n’entraînent pas au péché. Il ne convient pas aux sujets de désobéir à un ordre simplement parce qu’ils ne le jugent pas prudent.

    Explication
      La proposition réfutée détruit tout le fondement de l’autorité, car elle la fait reposer sur le consentement des sujets, erreur proscrite par la condamnation du libéralisme. La doctrine catholique, au contraire, enseigne que l’autorité vient de Dieu et que, comme telle, elle doit être obéie, même lorsque les ordres qu’elle donne paraissent incompréhensibles ou imprudents aux sujets. C’est en cela que l’obéissance est précisément une vertu, car, tandis
    que la proposition réfutée fait de l’obéissance un acte de l’intelligence, la doctrine catholique voit en elle un acte de la volonté. Et, sans acte de volonté, il n’y a pas vertu.
      Voir la doctrine de saint Pierre (1 P 2, 8) dans laquelle il commande d’obéir même aux supérieurs difficiles.
    La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
    The measure of love is to love without measure.
                                     St. Augustine (354 - 430 AD)

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  • V — Sur la morale nouvelle

    — 50 —

    ❍ Dans les domaines de l’activité humaine (affaires, arts, littérature, divertissements, sports, etc.) l’homme ne doit prendre en considération que les principes propres à chaque domaine. Ainsi, l’œuvre d’art, par exemple, sera parfaite si artistiquement elle est bien réussie, le sport s’il est efficace selon ses fins spécifiques, etc. Aucun
    de ces domaines n’est subordonné aux principes généraux de la morale.

    ❑ Toutes les fins prochaines auxquelles tendent les activités humaines visent à une fin dernière qui leur
    donne leur unité et leur valeur. Les principes qui touchent à cette fin dernière dominent donc les fins secondaires qui se rapportent à chaque domaine spécifique de l’activité humaine.

    Explication
      La proposition réfutée appartient à la morale dite « nouvelle » condamnée par le Saint-Père [Pie XII] dans l’allocution du 23 mars 1952 1.  Elle nie l’unité théologique de l’homme et donc la subordination de toutes ses actions à une fin ultime, et, par conséquent, la subordination de tous les domaines de l’activité humaine à un ensemble supérieur de règles morales, applicables, servatis servandis [toutes proportions gardées], à toutes les branches de l’activité auxquelles se livre l’homme.
      La phrase réfutée conduit logiquement à la doctrine de ceux qui affirment l’identification absolue entre l’être et le bien, de telle sorte que tout accroissement dans la ligne de l’être équivaut à un progrès dans la ligne du bien « simpliciter » (voir saint Thomas, Iª pars, q. 5, a. 1, ad 1  2).  Ainsi, par exemple, plus un artiste progresse en tant qu’artiste, plus il progresse dans le bien absolument parlant. Et comme Dieu est au sommet de la ligne de l’être, celui qui progresse dans cette ligne s’approche, de ce seul fait, de Dieu qui est le Souverain Bien. La conformité
    ou la difformité de l’œuvre d’art avec les préceptes de la morale, d’après cette conception, est intrinsèque et ne peut aucunement affecter l’ascension ontologique vers Dieu.

    1 — Radiomessage à l’occasion de la « Journée de la famille » (23 mars 1952) : « […] Dans la morale catholique, comme dans le dogme, on voudrait faire en quelque sorte une radicale révision pour en déduire un nouvel ordre des valeurs. Le premier pas, ou pour mieux dire le premier coup porté à l’édifice des règles morales chrétiennes, devrait être de le dégager – comme on prétend – de la surveillance étroite et opprimante de l’autorité de l’Église ; libérée alors des subtilités et des sophismes de la méthode casuistique, la morale serait ramenée à sa forme originelle et à la détermination de la conscience individuelle. […] Il est bon de mettre en évidence le vice capital de cette “nouvelle morale”. En remettant tout critère éthique à la conscience individuelle, fermée jalousement sur elle-même et rendue arbitre absolue de ses déterminations, cette théorie, bien loin de lui aplanir le chemin, la
    détourne de la vraie voie qui est le Christ. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, 1952, p. 85 ;
    AAS 44, p. 270 sq.) (NDLR.)
    2 — « Le bien (bonum) et l’être (ens) ont beau être identiques dans la réalité (secundum rem), comme ils diffèrent quant à la notion (secundum rationem), ce n’est pas de la même manière qu’une chose est dite être purement et simplement (ens simpliciter) et bonne purement et simplement (bonum simpliciter). […] En effet, c’est par son être substantiel (per suum esse substantiale) qu’une chose est dite être purement et simplement (ens simpliciter) tandis que par ses actes surajoutés (per actus superadditos), on la dit être à quelque égard seulement (esse secundum quid). […] A l’inverse, le bien (bonum) inclut la raison de perfection (dicit rationem perfecti), qui est ce à quoi l’on tend, et par conséquent la raison de fin ultime. D’où il suit que ce qui est en possession de son ultime perfection est dit bien purement et simplement (bonum simpliciter), mais ce qui n’a pas l’ultime perfection
    qu’il devrait avoir, quoiqu’il ait quelque perfection selon qu’il est en acte, ne sera pas dit parfait ni bien purement et simplement (perfectum vel bonum simpliciter), mais seulement sous un certain rapport (secundum quid). […] ». Autrement dit, c’est par son être premier et substantiel qu’une chose est ens simpliciter, et c’est par son être dernier ou sa perfection ultime qu’elle est bonum simpliciter.
    (NDLR.)

    LE SEL DE LA TERRE Nº 41, ÉTÉ 2002

    — 51 —
    ❍ La presse catholique doit traiter chaque matière selon les principes qui lui sont propres, faisant abstraction des principes supérieurs à chaque domaine. Ainsi, dans la critique morale des spectacles, elle pourra censurer un film, car l’objet spécifique de cette rubrique est la morale, mais dans la partie des annonces, elle pourra faire de la propagande pour ce même film, car l’objet de cette rubrique est la simple propagande ; de même dans les autres rubriques (concernant l’art, le sport, etc.) qui, toutes, doivent suivre des principes propres indépendants de la morale et de la religion.

    ❑ Les principes religieux et moraux doivent dominer toutes les rubriques des journaux, surtout quand ceux-ci se proposent comme fin spéciale la diffusion et la défense de la doctrine catholique. La publication d’annonces immorales dans les organes catholiques est scandaleuse, comme est scandaleuse également la contradiction entre la critique cinématographique et la partie commerciale.

    Explication
    (Voir l’explication de la proposition antérieure).

    — 52 —
    ❍ La règle morale doit être inculquée en tant que norme qui convient à l’homme selon l’ordre naturel des choses ; et son caractère de précepte, émané de Dieu et obligatoire par la force de l’autorité divine manifestée dans la Révélation, doit, de préférence, être passé sous silence. Car le caractère de précepte et d’obligation révolte et choque la mentalité de l’homme contemporain.

    ❑ Le point essentiel de la formation morale réside dans la reconnaissance de la souveraineté suprême de Dieu sur tous les hommes et toutes les choses. En conséquence, une formation morale qui cherche son fondement principal ou exclusif dans la conformité avec la nature humaine, pèche à sa base et n’arrivera jamais à donner une formation surnaturelle.

    Explication
      La phrase réfutée est profondément révolutionnaire. Elle capitule devant la révolte de l’homme contre l’autorité du Créateur. Cela ne veut pas dire qu’il ne convient pas, pour rendre le précepte plus facile à pratiquer après l’avoir reconnu et accepté comme imposé par Dieu, de montrer qu’il correspond de fait à la nature de l’homme, créé par Dieu et objet de son amour. Mais une formation morale fondée uniquement sur cette considération [= la conformité de la morale catholique avec la nature], qui est moins importante que celle qui vient en premier [= la reconnaissance de la souveraineté suprême de Dieu sur tout], serait fondamentalement défectueuse.
    Quand il est question de convaincre des a-catholiques, on peut montrer la conformité de la religion catholique avec la nature humaine comme moyen d’aplanir le chemin, du moment qu’il s’agit de personnes dont on note la bonne foi. Cependant, une apologétique qui se limiterait à cela serait foncièrement insuffisante. Le catholicisme est la religion de l’obéissance et doit être présenté comme tel.

    — 53 —
    ❍ C’est le propre des associations religieuses traditionnelles, telles que les congrégations mariales, les pieuses associations des Enfants de Marie, etc., de déconseiller à leurs membres de se maquiller, de fréquenter les bals, les piscines publiques, les sorties mixtes, etc. Au contraire, l’Action Catholique, formée d’après les dispositions morales les plus récentes de l’Église, doit autoriser, promouvoir et encourager ces pratiques qui adaptent ses membres au monde dans lequel nous vivons et les rendent ainsi capables de faire de l’apostolat.

    ❑ La morale de l’Église est immuable et ce qui, hier, était vanité, occasion prochaine de scandale ou de péché,
    l’est encore aujourd’hui et le sera demain. Aussi l’Église n’approuvera-telle jamais les bals modernes, les piscines mixtes ou publiques, les sports mixtes, les exhibitions publiques de sports féminins, etc., et louera toujours les personnes qui s’abstiennent de se maquiller et de tout ce qui est signe de vanité et de mondanité.

    Explication
      La proposition réfutée serait logique si l’on admettait l’idée d’une morale nouvelle dans l’Église, plus libre et commode, dont l’Action Catholique serait le héraut. Au contraire, cette organisation ayant reçu tant d’encouragements honorables et des bénédictions si précieuses des souverains pontifes, il convient
    qu’elle considère la pratique des plus rigoureux principes de la modestie chrétienne comme lui étant pleinement appropriée. Le souverain pontife ne s’est pas prononcé en un autre sens dans les diverses allocutions à la jeunesse féminine catholique, comme on peut le voir dans les Acta Apostolicæ Sedis 35, page 142 (24 avril 1943  1) ;  33, page 186 (22 mai 1941  2) ; 32, page 414 (6 octobre 1940  3).
    1 — Discours aux jeunes filles de l’Action Catholique italienne (24 avril 1943) : « […] Dignité et liberté de la femme qui ne se fait jamais esclave, pas même de la mode ! C’est un sujet délicat, mais urgent, où votre action incessante se promettra d’heureux et bienfaisants succès. Cependant votre zèle contre les vêtements et la tenue immodestes ne doit pas seulement être une réprobation mais une édification, montrant pratiquement au monde féminin comment une jeune fille peut bien harmoniser dans sa toilette et son comportement 1es lois supérieures de la vertu avec les normes de l’hygiène et de l’élégance. Il faut espérer qu’une bonne partie des femmes italiennes, celles, du moins, et elles sont nombreuses, qui se sont conservées saines de pensée et de cœur, ne tarderont pas et n’hésiteront pas à suivre votre exemple. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, 1943, p. 106.) (NDLR.)
    2 — Allocution aux jeunes filles de l’Action Catholique de Rome, membres de la croisade de pureté (22 mai 1941) : « […] Nous ne Nous proposons pas de retracer ici le triste tableau trop connu des désordres qui se présentent à vos yeux : vêtements si exigus ou tels qu’ils semblent faits plutôt pour mettre davantage en relief ce qu’ils devraient voiler ; parties de sport qui se déploient dans des conditions de vêtements, d’exhibition et de camaraderie, inconciliables avec la modestie même la moins exigeante ; danses, spectacles, auditions, lectures, illustrations, ornements, où le désir du divertissement et du plaisir accuмule les périls les plus graves. […]
    « Dans l’attitude à observer à l’égard de la mode, la vertu tient le juste milieu. Ce que Dieu vous demande est de vous souvenir toujours que la mode n’est pas ni ne peut être la règle suprême de votre conduite, qu’au-dessus de la mode et de ses exigences, il y a des lois plus hautes et impérieuses, des principes supérieurs et immuables qui, en aucun cas, ne peuvent être sacrifiés au gré du plaisir ou du caprice et devant lesquels l’idole de la mode doit savoir abaisser sa fugitive toute-puissance. Ces principes ont été proclamés par Dieu, par l’Église, par les saints et les saintes, par la raison et par la morale chrétienne. Ce sont des signaux qui marquent les limites au-delà desquelles ne fleurissent pas les lis et les roses, où la pureté, la modestie, la dignité et l’honneur féminins n’exhalent plus leurs parfums, mais où souffle et règne un air malsain de légèreté, de langage équivoque, de
    vanité audacieuse, de fatuité dans le cœur tout autant que dans l’habillement. Ce sont ces principes que saint Thomas d’Aquin énonce et rappelle touchant la toilette de la femme [Expositio in Isaiam prophetam, ch. III in fine] en indiquant quel doit être l’ordre de notre charité et de nos affections : le bien de notre âme l’emporte sur celui de notre corps, et nous devons préférer à l’avantage de notre propre corps le bien de l’âme de notre prochain (II-II, q. 169, a. 2). Dès lors, ne voyez-vous pas qu’il existe une limite qu’aucune forme de mode ne peut permettre de dépasser, une limite au-delà de laquelle la mode se fait source de ruines pour l’âme de la femme et pour l’âme d’autrui ?
    « Certaines jeunes filles diront peut-être que telle façon déterminée de se vêtir est plus commode et aussi plus hygiénique ; mais si elle devient pour le salut de l’âme un péril grave et prochain, elle n’est certainement pas hygiénique pour votre esprit et il est de votre devoir d’y renoncer. La volonté de sauver leur âme a rendu héroïques les martyres, telles les Agnès et les Cécile, au milieu des tourments et des lacérations de leur corps virginal. Vous, leurs sœurs dans la foi, dans l’amour du Christ et dans l’estime de la vertu, vous ne trouveriez pas au fond de votre cœur le courage et la force de sacrifier un peu de bien-être, un avantage physique, si l’on veut, pour garder saine et pure la vie de vos âmes ? Et si, pour un simple plaisir personnel, nul n’a le droit de mettre en péril la vie corporelle des autres, n’est-il pas encore moins permis de compromettre le salut, donc la vie même de
    leurs âmes ? Si, comme le prétendent certaines, une mode audacieuse ne produit sur elles aucune impression mauvaise, que savent-elles de l’impression que les autres en ressentent ? Qui les assure que les autres n’en retirent pas de mauvaises incitations ? Vous ne connaissez pas le fond de la fragilité humaine ni de quel sang corrompu ruissellent les blessures laissées dans la nature humaine par le péché d’Adam avec l’ignorance dans l’intelligence, la malice dans la volonté, l’avidité du plaisir et la faiblesse à l’égard du bien ardu dans les passions des sens, à tel point que l’homme, souple comme la cire pour le mal, “voit ce qui est mieux et l’approuve, et s’attache au pire” [Ovide, Métamorphoses, VII, 20-21], à cause de ce poids qui toujours, comme du plomb, l’entraîne au fond. Oh ! combien justement on a observé que si certaines chrétiennes soupçonnaient les tentations et les chutes qu’elles causent chez les autres par leur toilette et les familiarités auxquelles, dans leur légèreté, elles accordent si peu d’importance, elles s’épouvanteraient de leur responsabilité ! » (Docuмents pontificaux de
    S.S. Pie XII, 1941, p. 128-132.) (NDLR.)
    3 — Allocution aux jeunes filles de l’Action Catholique (6 octobre 1940) : « […] “Ne savez-vous pas que vos membres sont le sanctuaire de l’Esprit-Saint, qui habite en vous, auquel vous appartenez de la part de Dieu, sans plus vous appartenir à vous-mêmes ?” (1 Co 6, 19). La pensée consciente de cette inhabitation divine, de cette incorporation au Christ, a fait naître et a développé à travers les siècles chez les peuples dociles à l’Évangile un religieux respect du corps qui se traduit dans un ensemble d’arrangement de la personne, des manières, du maintien, des paroles sagement réglées et mesurées : la modestie. Et dès le commencement de l’Église le même apôtre voulait que les femmes portassent le voile dans les réunions sacrées et disait dès lors aux Corinthiens : “Jugez-en donc par vous-mêmes : convient-il à la femme de prier Dieu la tête découverte ?... C’est une gloire pour la femme d’entretenir sa chevelure ; parce que les cheveux lui ont été donnés par manière de voile” (1 Co 11, 13 et 15).
    « […] Mode et modestie devraient bien aller et marcher ensemble comme deux sœurs, puisque les
    deux mots ont la même étymologie, du latin modus qui veut dire juste mesure, en deça et au delà de
    laquelle ne peut se trouver le juste ou le raisonnable. Mais la modestie n’est plus de mode ! Semblable à ces pauvres aliénés qui, ayant perdu l’instinct de la conservation et la notion du danger, se jettent dans le feu ou dans les fleuves, bien des âmes féminines oublieuses dans leur ambitieuse vanité de la modestie chrétienne, courent misérablement au-devant des dangers où leur pureté peut trouver la mort. Elles subissent la tyrannie de la mode, même immodeste, d’une manière telle qu’elles paraissent n’en même plus soupçonner l’inconvenance ; elles ont perdu le sens même du danger, l’instinct de la modestie. Aider ces malheureuses à reprendre conscience de leurs devoirs sera votre apostolat, votre croisade au milieu du monde : “Que votre modestie paraisse à tous les regards”
    (Ph 5, 5).
    « Votre apostolat agira avant tout par l’exemple. Il appartiendra […] à vos sages dirigeantes de
    vous apprendre comment, avant de porter un vêtement, vous devez demander à votre conscience de
    quelle façon le jugera Jésus-Christ ; de vous avertir qu’avant d’accepter une invitation, vous devez
    considérer si votre invisible et céleste ange gardien pourra vous suivre en semblable rendez-vous sans
    se couvrir la face de ses ailes. Elles vous indiqueront quels spectacles, quelles compagnies, quelles
    plages vous devez éviter ; elles vous montreront comment une jeune fille peut être moderne, cultivée
    sportive, pleine de grâce, de naturel er de distinction, sans se plier à toutes les vulgarités d’une mode
    malsaine, conservant un visage qui ignore les artifices comme l’âme dont il est le reflet, un regard
    sans ombres ni intérieures ni extérieures, mais à la fois réservé, sincère et franc. Pour la défense, généreusement active, de votre pureté, Nous vous recommandons par-dessus tout la prière et, d’une façon spéciale, le culte de la sainte Eucharistie et de la Vierge immaculée à laquelle vous êtes consacrées. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, 1940, p. 303-305.) (NDLR.)

    Quant aux bals, le Pape Pie XI, dans l’encyclique Ubi arcano Dei, se prononce de cette manière : « Personne n’ignore que la légèreté des femmes et des jeunes filles a déjà outrepassé les limites de la pudeur, surtout dans les vêtements et les danses » (AAS 14, pages 678 et 679). Déjà, auparavant, Benoît XV déplorait l’indécence des vêtements féminins et le manque de retenue et de pudeur dans les danses. Après avoir regretté l’« aveuglement des femmes » et la « folie des vêtements », il ajoutait ce qui suit au sujet des danses : « Elles sont entrées dans les
    mœurs de la société, venues de la barbarie, toutes pires les unes que les autres, et aptes plus que tout autre chose à ôter toute pudeur » (Encyclique Sacra propediem, 6 janvier 1921, AAS 13, page 39). En ce qui concerne les manifestations publiques de sports féminins, la sacrée congrégation du Concile a promulgué, le 12 janvier 1930, une instruction dans les termes suivants : « Que les parents interdisent (arceant) à leurs filles la participation aux exercices publics et aux concours de gymnastique ; si leurs filles sont obligées d’y prendre part, qu’ils
    veillent à ce qu’elles mettent des habits qui respectent la décence et ne tolèrent jamais les costumes immodestes » (Instruction sur les modes féminines indécentes, décision III 1 )  .  Le pape Pie XII s’est prononcé dans le même sens lorsqu’il s’est adressé aux médecins et aux professeurs d’éducation physique, le 8 novembre 1952  2.


    1 — Actes de Pie XI, Bonne Presse, t. VI, p. 353 ; AAS 22, p. 26.
    2 — Discours aux professeurs d’éducation physique (8 novembre 1952) : […] Non moins importante est une autre règle fondamentale contenue aussi dans un passage de la sainte Écriture. On lit en effet dans la lettre de saint Paul aux Romains : « Je vois dans mes membres une autre loi, qui s’oppose à la loi de mon esprit et me rend esclave de la loi du péché qui est dans mes membres »
    (Rm 7, 23). On ne pourrait décrire de façon plus vivante le drame quotidien dont est tissée la vie de
    l’homme. Les instincts et les forces du corps se font sentir, et, étouffant la voix de la raison, l’emportent sur les énergies de la bonne volonté depuis le jour où leur pleine subordination à l’esprit fut perdue par le péché originel.
    Dans l’usage et l’exercice intensifs du corps, il faut tenir compte de ce fait. De même qu’il y a une gymnastique et un sport qui, par leur austérité, concourent à réfréner les instincts, ainsi il existe d’autres formes de sport qui les réveillent, soit par la force violente, soit par les séductions de la sensualité. Du point de vue esthétique aussi, par le plaisir de la beauté, par l’admiration du rythme dans la danse et dans la gymnastique, l’instinct peut insinuer son venin dans les âmes. Il y a, en outre, dans le sport et dans la gymnastique, dans les exercices rythmiques et dans la danse, un certain nudisme qui n’est ni nécessaire ni convenable. Ce n’est pas sans raison qu’il y a quelques décades un observateur tout à fait impartial devait avouer : “Ce qui dans ce domaine intéresse la masse, ce n’est
    pas la beauté de la nudité, mais la nudité de la beauté”. A une telle manière de pratiquer la gymnastique et le sport, le sens religieux et moral oppose son veto. En un mot, le sport et la gymnastique doivent non pas commander et dominer, mais servir et aider. C’est leur fonction, et c’est là qu’ils trouvent leur justification. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, 1952, p. 516-517 ou EPS, Le Corps humain, Desclée, 1953, § 401-402.) (NDLR.)
    LE SEL DE LA TERRE Nº 41, ÉTÉ 2002

    — 54 —
    ❍ On ne doit pas défendre les décolletés, maillots et autres genres de vêtements qui montrent beaucoup le
    corps, car le corps est bon en soi, a été créé par Dieu et ne doit pas être caché.

    ❑ Le corps humain a été créé par Dieu et, comme tout être, il est bon en soi. Mais après le péché
    originel, la concupiscence s’est trouvée déréglée. Pour cette raison, il convient de couvrir le corps,
    afin qu’il ne serve pas d’occasion au péché.

    Explication
      La phrase réfutée s’inspire d’un naturalisme radicalement anticatholique.

    — 55 —
    ❍ On ne doit pas censurer les personnes qui se présentent fardées, décolletées, en manches courtes, etc. 1 pour recevoir la communion. Ce serait manquer à la charité que de leur refuser les sacrements puisque ces personnes
    n’y mettent aucune malice, sans quoi, elles ne se présenteraient pas ainsi à l’église. De plus, voir le mal en toutes choses, c’est blâmer Dieu lui-même, Créateur du corps humain.

    ❑ L’Église déconseille le fard et défend l’exagération dans les décolletés, les manches courtes 1  , etc. Les fidèles doivent être instruits de la doctrine de l’Église catholique sur ce point ; car le corps humain, après le péché originel, est devenu esclave de la concupiscence et toute imprudence en cette matière est pour le moins dangereuse.

    Explication
    Le corps humain est bon en soi comme toute créature de Dieu. La nécessité qu’a l’homme de ne pas l’exposer ne vient pas du corps humain tel que Dieu l’a créé, mais du dérèglement des instincts, conséquence du péché originel.
      C’est pourquoi l’Église recommande la modestie dans l’habillement.
      La sensation de honte causée par l’exhibition immodeste du corps humain ne peut être appelée malice, mais pudeur. Car la notion de ce qui fait la différence entre le bien et le mal n’est pas un défaut, mais est, au contraire, le fondement de toutes les vertus.
      En conséquence, réprimander les personnes qui s’habillent avec immodestie, c’est éveiller en elles, non la malice, mais la vertu. C’est pourquoi la législation de l’Église oblige les prêtres à refuser les sacrements aux personnes qui se présentent de manière immodeste (sacrée congrégation du Concile, le 12 janvier 1930, décision nº 9, AAS 22, pages 26 et 27  2 edité).
      La proposition réfutée considère la question comme si l’humanité n’était pas dans l’état de nature déchue. D’autre part, elle nie l’existence d’un bien et d’un mal objectifs. Le mal, dans le cas concret, ne résiderait pas dans un fait objectif : l’immodestie du vêtement, ou la transgression du précepte qui interdit lesvêtements immoraux, mais plutôt dans l’état d’âme subjectif de celui qui voit l’immoralité dans la nudité.
      Une application concrète montrera jusqu’à quel point la phrase réfutées’oppose au véritable esprit de l’Église. Les saints se sont toujours distingués par,leur extrême délicatesse à percevoir et à rejeter tout ce qui s’opposait, même de loin, à la vertu angélique. Selon la proposition erronée, ce serait là un raffinement de malice, alors que l’Église y voit un raffinement de pudeur.
      Sur la vanité féminine, les recommandations de saint Paul (1 Tm 2, 9) et de saint Pierre (I P 3, 5) sont précieuses. Lire également le chapitre III d’Isaïe, versets 16 à 24.

    1 — L’on pourrait ajouter aujourd’hui : les dames et les jeunes filles vêtues de mini-jupes ou de jupes outrageusement fendues. (NDLR.)
    2 — « Qu’on interdise aux jeunes filles et aux femmes qui s’habillent d’une manière immodeste l’accès de la Table sainte, le rôle de marraine au baptême et à la confirmation et, si les circonstances y portent, l’entrée même de l’Église. » (Instructio de inhonesto feminarum vestiendi more ; Actes de Pie XI, Bonne Presse, t. VI, p. 354-355.)

    — 56 —
    ❍ Il convient que les membres de l’Action Catholique participent aux divertissements du carnaval pour y faire de l’apostolat. Aussi les retraites spirituelles qui séparent du monde les membres de l’Action Catholique ne doivent-elles pas avoir lieu pendant les journées du carnaval.

    ❑ Il est illicite de se procurer une occasion prochaine de pécher sous prétexte d’apostolat. Les divertissements
    du carnaval constituant une occasion prochaine de pécher, les fidèles doivent s’en abstenir.

    Explication
      Le carnaval du Brésil est tristement célèbre dans le monde par les immoralités auxquelles il donne lieu et tout indique qu’il devient de plus en plus mauvais 1 edité.  La participation des fidèles à ces amusements immoraux ne constitue pas seulement un danger pour leurs âmes, mais également un grave scandale pour le prochain. Au contraire, le fait de s’isoler dans le recueillement et la prière durant ces trois jours produit une édification qui n’est pas petite et constitue en soi un excellent apostolat.
      La phrase erronée paraît méconnaître l’existence des occasions prochaines de pécher, au moins pour celui qui prétend faire de l’apostolat. Rappelons donc la condamnation lancée par Innocent XI contre le laxisme moral (2 mars 1679), lequel prônait, entre autres, les postulats suivants : – proposition 63 : « Il est permis de chercher directement l’occasion prochaine de pécher pour notre bien spirituel ou temporel, ou pour celui du prochain » ; – proposition 62 : « Une occasion prochaine de pécher ne doit pas être fuie lorsqu’il y a une raison utile honnête de ne pas la fuir » (DS 2163 et 2162).
    1— Ce texte date de 1953. Que dire aujourd’hui ! (NDLR.)

    — 57 —
    ❍ Les personnes divorcées qui contractent un autre mariage peuvent être admises à participer publiquement à des campagnes destinées à recueillir des fonds en faveur d’œuvres de charité spirituelles ou matérielles.

    ❑ Il est licite de recevoir des aumônes de pécheurs publics. Mais il est scandaleux de les introduire dans des commissions destinées à collecter des offrandes pour des œuvres pieuses, car ce fait ne manque pas de les mettre en évidence dans la société chrétienne  1.

    Explication
      La proposition réfutée nie implicitement l’unité morale de l’homme, puisqu’elle paraît distinguer, dans une même personne, deux aspects entièrement étrangers l’un à l’autre : bien qu’elle puisse, dans la vie domestique, être en état de péché public et mériter une sanction, la même personne continue, dans la vie publique ou sociale, de par sa fonction d’homme politique, d’homme d’affaires ou de « philanthrope », à bénéficier de la considération générale. Et l’Église, se voilant la face devant l’une des faces de sa vie, jugerait l’autre recommandable.
    Une telle manière de considérer le comportement de l’homme est erronée, comme le montre le commentaire de la proposition nº 50.
    1 — Évidemment, les principes énoncés ici s’appliquent à toutes les activités ou œuvres catholiques. (NDLR.)

    — 58 —
    ❍ L’union sexuelle étant une image des relations de la vie intime dans la Sainte Trinité, il est raisonnable et utile de se servir de thèmes érotiques pour éveiller la piété.

    ❑ Bien que tous les actes honnêtes accomplis dans une intention droite soient méritoires devant Dieu, les relations sexuelles, dans le présent ordre historique de la nature déchue, sont liées d’une telle manière à la concupiscence déréglée que, normalement, elles ne peuvent constituer un objet propre à éveiller ou élever la piété.

    Explication
      La littérature mystico-sensuelle est une des plaies de notre époque. Le pape Pie XII en a averti plusieurs fois les fidèles. Sous le pontificat antérieur, la sacrée congrégation du Saint-Office a pris une mesure spéciale contre ces écrits dans l’instruction du 3 mai 1927 (AAS 19, pages 186 et suivantes 2). Un des graves inconvénients de cette littérature est qu’elle se prête facilement à des expressions qui conduisent à un mysticisme panthéiste. Prétendre alimenter la piété avec des considérations mystico-sensuelles est aller contre la Tradition de l’Église qui s’est
    toujours efforcée d’inculquer aux fidèles, quel que soit leur état de vie, l’esprit de pureté par lequel l’homme se prépare à la demeure céleste, où  neque nubent neque nubentur (« les hommes n’ont point de femmes ni les femmes de maris »,`Mt 22, 30). On a cité, non sans blasphème, en faveur de la littérature mysticosensuelle, le Cantique des cantiques. L’Église, unique interprète authentique de l’Écriture sainte, a toujours condamné l’interprétation érotique de ce poème. Il est certain, en effet, que les phrases qui s’y trouvent ne font pas allusion à la vie animale de l’homme. D’autre part, parce que l’union amoureuse de l’âme avec Dieu y est décrite de manière assez réaliste, déjà, parmi les juifs, sa lecture n’était autorisée qu’après l’âge de 30 ans. Telle est la prudence que requiert cette matière.

    2 — Instruction sur la littérature sensuelle et sensuelle-mystique (3 mai 1927) : « Parmi les maux
    les plus funestes qui, de nos jours, corrompent totalement la morale chrétienne et portent un immense préjudice aux âmes rachetées par le précieux Sang de Jésus-Christ, il faut stigmatiser surtout ce genre de littérature qui porte à la sensualité, aux passions mauvaises et à une espèce de mysticisme lascif. […] Il est des écrivains, détail abominable, qui ne craignent pas de faire passer l’aliment d’une sensualité morbide sous le couvert des choses sacrées, en combinant l’amour impudique avec une espèce de piété envers Dieu et avec un religieux mysticisme absolument faux… » (Actes de Pie XI, t. IV, p. 189 sq.) (NDLR.)


    — 59 —
    ❍ La formation de l’adolescent pour le mariage doit se faire d’une manière moderne, à savoir dans de larges auditoires, en langage réaliste, vif, de forme légère et même amusante.
    Les arguments doivent surtout avoir un caractère naturel. Il est nécessaire de ne pas attaquer la tendance qu’ont
    les hommes au sentimentalisme, mais plutôt d’y accorder de la sympathie.

    ❑ Dans la formation de l’adolescent en vue du mariage, on doit tenir compte avant tout des funestes conséquences du péché originel qui rendent ce sujet spécialement dangereux à cet âge.
    C’est pourquoi on doit prendre un soin attentif à graver dans les esprits l’importance des moyens
    surnaturels et toujours éviter de donner au sujet une publicité inconvenante, c’est-à-dire contraire
    à la retenue avec laquelle ces questions doivent être traitées.

    Explication
      Dans l’allocution aux pères de famille du 18 septembre 1951, le pape glorieusement régnant, Pie XII, condamne la manière avec laquelle beaucoup d’écrivains catholiques traitent de cette matière, sans la discrétion que le sujet exige 1 ;  et il recommande les précautions déjà prescrites par Pie XI dans l’encyclique Divini illius Magistri (AAS 22, pages 49 et suivantes). En complément de cette encyclique, est venue s’ajouter la réponse de la sacrée congrégation du Saint-Office, le 21 mars 1931 (AAS 23, page 118), à une consultation sur l’éducation et l’initiation sexuelle. Nous jugeons utile de transcrire ici les recommandations de la sacrée congrégation :
      "Il est absolument nécessaire, dans l’éducation de la jeunesse, de suivre la méthode jusqu’ici employée par l’Église et par les hommes de vertu, et recommandée par le très Saint-Père dans l’encyclique sur l’éducation chrétienne de la jeunesse datée du 31 décembre 1929 ; à savoir : il est nécessaire de veiller, en premier lieu, à donner une formation religieuse de la jeunesse des deux sexes qui soit complète, ferme et sans interruption ; il est nécessaire d’exciter dans la jeunesse une estime, un désir et un amour de la vertu angélique ; et, par-dessus tout, de lui inculquer la constance dans la prière, l’assiduité aux sacrements de pénitence et de sainte eucharistie, une continuelle et filiale dévotion envers la bienheureuse Vierge Marie, mère de la sainte pureté, en se consacrant totalement à sa protection ; enfin, qu’elle évite soigneusement les lectures dangereuses, les spectacles obscènes, les conversations mauvaises et toutes autres occasions de pécher." 

    Après avoir donné ces conseils pour indiquer comment doit se faire l’éducation sexuelle, la sacrée congrégation censure les livres qui préconisent une nouvelle méthode dans cette éducation, y compris ceux qui sont écrits par des auteurs catholiques.
    Que cette détermination du Saint-Siège ait été – « more jansenistarum » – mise en oubli, cela se voit à la manière singulièrement énergique avec laquelle le pape Pie XII parle de ces auteurs catholiques dans l’allocution déjà citée aux pères de famille. Il convient de lire cette allocution dans Catolicismo (2 édité)  du 13 janvier 1952.

    1 — Allocution à un groupe de pères de famille de France (18 septembre 1951) : « Il est un terrain sur lequel cette éducation de l’opinion publique, sa rectification, s’imposent avec une urgence tragique. Elle s’est trouvée, sur ce terrain, pervertie par une propagande que l’on n’hésiterait pas à appeler funeste, bien qu’elle émane cette fois de source catholique et qu’elle vise à agir sur les catholiques, même si ceux qui l’exercent ne paraissent pas se douter qu’ils sont, à leur insu, illusionnés par l’esprit du mal. Nous voulons parler ici d’écrits, livres et articles, touchant l’initiation sexuelle, qui souvent obtiennent aujourd’hui d’énormes succès de librairie et inondent le monde entier, envahissant l’enfance, submergeant la génération montante, troublant les fiancés et les jeunes époux.
    « […] On reste atterré en face de l’intolérable effronterie d’une telle littérature : alors que, devant le secret de l’intimité conjugale, le paganisme lui-même semblait s’arrêter avec respect, il faut en voir violer le mystère et en donner la vision – sensuelle et vécue – en pâture au grand public, à la jeunesse. Vraiment c’est à se demander si la frontière est encore suffisamment marquée entre cette initiation soi-disant catholique, et la presse ou l’illustration érotique et obscène, qui, de propos délibéré vise la corruption ou exploite honteusement, par vil intérêt, les plus bas instincts de la nature déchue.
    « […] En second lieu, cette littérature, pour l’appeler ainsi, ne semble tenir aucun compte de
    l’expérience générale d’hier, d’aujourd’hui et de toujours, parce que fondée sur la nature, qui atteste
    que, dans l’éducation morale, ni l’initiation, ni l’instruction ne présente de soi aucun avantage, qu’elle
    est, au contraire, gravement malsaine et préjudiciable, si elle n’est liée à une constante discipline, à
    une vigoureuse maîtrise de soi-même, à l’usage, surtout, des forces surnaturelles de la prière et des
    sacrements. Tous les éducateurs catholiques dignes de leur nom et de leur mission savent bien le rôle
    prépondérant des énergies surnaturelles dans la sanctification de l’homme, jeune ou adulte, célibataire ou marié. De cela, dans ces écrits, à peine souffle-t-on mot, si encore on ne le passe tout à fait sous silence. Les principes mêmes que dans son encyclique Divini illius Magistri, Notre Prédécesseur, Pie XI, a si sagement mis en lumière, concernant l’éducation sexuelle et les questions connexes, sont – triste signe des temps ! – écartés d’un revers de main ou d’un sourire : Pie XI, dit-on, écrivit cela il y a vingt ans, pour son époque. Depuis, on a fait du chemin ! » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, 1951, p. 388-390.) (NDLR.)

    2— Catolicismo était le bulletin diocésain officiel de Mgr de Castro Mayer à Campos. Les extraits
    concernés de l’allocution de Pie XII signalée ici sont cités dans la note précédente. (NDLR.)

    — 60 —

    ❍ Par un dessein de la Providence, la grande majorité des personnes doivent vivre dans l’état du mariage. Les
    collégiennes qui « flirtent » suivent donc leur penchant naturel. On ne doit pas les en empêcher.

    ❑ En matière d’élection de l’état de vie, l’action de l’éducateur doit consister : 1) à instruire et aider l’élève de manière à ce qu’il puisse faire un choix conforme à la volonté de Dieu ; 2) à empêcher que l’ambiance du collège ne fasse obstacle aux vocations qui exigent une plus grande générosité, comme le sacerdoce ou l’état religieux. En conséquence, on doit combattre énergiquement l’amour prématuré ou celui qui ne serait pas en
    vue du mariage, car il s’agit là de pure sensualité, également contraire à la vocation sacerdotale ou religieuse et à la préparation chrétienne du mariage.

    Explication
      Bien que, par nature, les hommes penchent vers l’état conjugal, il est nécessaire de prendre en compte la vocation personnelle de chaque élève. La proposition réfutée paraît considérer l’ambiance du collège comme destinée à former tous les élèves en vue du mariage, sans tenir compte des vocations spéciales, le sacerdoce ou l’état religieux. De plus, elle est ambiguë, car elle ne distingue pas entre le fait de tomber amoureux en vue d’un prochain mariage, et le « flirt 1 édité » qui se fait par simple plaisir charnel. L’ambiguïté de la proposition erronée vient également de ce qu’elle ne distingue pas entre le fait de s’énamourer de façon précoce ou à l’âge approprié. Une telle ambiguïté est d’autant plus dangereuse que le mot « flirt » se prête à des interprétations très variées.
      Enfin, le propos réfuté fait abstraction du péché originel, en considérant que tout ce qui est naturel est bon en soi ; une telle proposition ne peut s’admettre qu’en niant le dogme du péché originel. Par tout ce qu’elle contient d’ambigu et de faux, cette proposition réfutée est un stimulant à la sensualité et à l’indiscipline dans les collèges.

    1 — En réalité, le mot « flirt » qui est employé ici rend assez mal le sens du mot portugais
    « namoro » qui est dans l’original. Namoro est très nuancé et intraduisible en français. Ce n’est pas
    vraiment « amour », mais c’est plus qu’« amourette ». Cela s’emploie en bonne ou mauvaise part, alors
    que « flirt » est péjoratif. C’est pourquoi nous avons rendu le sens par des locutions voisines. (NDLR.)

    VI — Sur le rationalisme, l’évolutionnisme, le laïcisme

    — 61 —
    ❍ La philosophie et les sciences ont un objet propre et une méthode autonome par rapport à la sacrée théologie, en sorte que le fidèle, dans ses recherches philosophiques et scientifiques, n’a pas à tenir compte de la Révélation
    surnaturelle.

    ❑ La philosophie et les sciences ont un objet propre et une méthode autonome. Cependant, la Révélation
    divine étant infaillible et la raison humaine faillible, le savant et le philosophe doivent prendre les enseignements de l’Église, authentique interprète de la Révélation, comme critérium de certitude et guide, pour le moins négatif, dans leurs études et recherches.

    Explication
      Il n’y a pas de possibilité de désaccord entre la raison et la foi. Quand une telle incompatibilité paraît exister, cela provient du fait que l’enseignement de la foi n’a pas été formulé avec une précision objective ou, plus probablement, que la raison s’est trompée dans ses recherches. De plus, le philosophe ou le savant,
    face à l’enseignement infaillible de l’Église, doit toujours rejeter les conclusions de sa philosophie ou de sa science qui sont en conflit avec ces enseignements.
      Le pape Pie XII, dans son encyclique Humani generis, rappelle en ces termes la doctrine traditionnelle : « Il est nécessaire d’être très prudent quand il s’agit bien plutôt d’hypothèses – même si elles ont quelque fondement scientifique – qui touchent à la doctrine contenue dans la sainte Écriture et dans la “Tradition”. Mais si de telles opinions conjecturales s’opposent directement ou indirectement à la doctrine révélée par Dieu, une telle demande [à savoir, que la religion catholique en tienne compte] ne pourrait d’aucune manière être acceptée » (DS 3895. AAS 42, page 575).

    — 62 —
    ❍ Il est injurieux pour l’Église d’admettre, de nos jours, l’existence d’hérésies cachées ou la menace d’une
    hérésie déclarée. En effet, dans l’état actuel de son progrès, l’Église a définitivement surmonté ces dangers.

    ❑ Jusqu’à la fin des temps, les hommes seront sujets à pécher contre toute vertu et donc également contre la foi.
    L’hérésie ne constitue pas un déshonneur pour l’Église, mais seulement pour les hérétiques. Car bien que la sacrée
    théologie puisse arriver à une certaine perfection d’expression, à l’éclaircissement des vérités révélées, et réaliser un véritable progrès pour l’Église, ce fait n’empêche pas qu’il puisse y avoir des personnes qui se révoltent contre le magistère ecclésiastique.

    Explication
      Voir Lettre Pastorale. [Cette lettre « sur les problèmes de l’apostolat moderne » accompagnait le Catéchisme des vérités opportunes dans l’édition originale. Nous la publierons lorsque toutes les parties du Catéchisme seront parues.]

    — 63 —
    ❍ L’histoire ne fournit pas la connaissance des faits dans leur réalité objective, mais seulement une image de ceux-ci, modelée subjectivement par l’historien.

    ❑ L’histoire a pour fin la reconstitution objective du passé et la méthode historique est destinée à préserver une telle reconstitution des déformations qu’elle peut subir par suite de l’action subjective de l’historien.

    Explication
      La proposition réfutée détruit par la base la religion catholique qui est tout entière fondée sur le fait historique de la Révélation, connue et transmise dans sa réalité objective. Ce fut ce même principe qui servit de fondement aux modernistes pour propager leurs erreurs, lesquelles, en dernière analyse, réduisaient la religion à un pur subjectivisme.

    — 64 —
    ❍ La société civile, au cours des derniers siècles, a évolué vers une simplicité et une égalité plus grandes
    dans les mœurs, dans l’organisation politique, sociale et économique, en accord avec les principes
    évangéliques. Il convient que l’Église, à son tour, suive cette évolution en devenant égalitaire dans son
    organisation, simple et démocratique dans sa discipline, dans sa liturgie et dans ses mœurs, et dans le
    comportement extérieur des membres de la hiérarchie.

    ❑ Au cours des derniers siècles, l’esprit de la révolution a produit des transformations constantes dans le but de renverser les pouvoirs légitimes, rabaisser l’autorité, qu’elle soit politique, sociale ou économique, et niveler toutes les inégalités légitimes. L’Église s’oppose et continuera à s’opposer à ce processus historique. Au XIXe siècle, elle a combattu le libéralisme anarchisant ; il en est de même dans la première décade du XX e siècle ; dans cette seconde partie du XXe siècle, elle se dispose à combattre « avec la plus grande énergie », le socialisme, qui met en grave péril « la dignité de l’homme et le salut éternel des âmes » (Pie XII, Radio-message aux catholiques de Vienne. Voir Catolicismo nº 24, décembre 1952). C’est pourquoi elle instruit le monde par l’existence de son organisation hiérarchique qui est d’institution divine et, par conséquent, immuable ; et c’est pourquoi aussi, dans la liturgie, dans sa discipline, etc., elle manifeste un esprit de hiérarchie opposé à l’esprit révolutionnaire.

    Explication
      La phrase réfutée accepte comme légitimes les différentes révolutions à caractère niveleur – protestantisme, Révolution Française, communisme, – qui, sous la pression de l’esprit d’orgueil et de sensualité, sont en train, depuis longtemps déjà, de transformer la terre (Léon XIII, encyclique Parvenu à la 25e année).
      Vouloir conformer l’Église à une société civile modelée selon cet esprit, c’est demander à la religion catholique de capituler. De plus, c’est faire abstraction de ce que l’organisation de l’Église, en ses éléments d’institution divine, est immuable.

    — 65 —
    ❍ Le catholique doit être un homme de son temps et, comme tel, doit accepter sincèrement, sans arrière-pensée, les transformations et les progrès par lesquels notre siècle se différencie des siècles antérieurs.

    ❑ Le catholique doit être un homme de son temps et, comme tel, il doit accepter sincèrement les transformations et les progrès par lesquels notre siècle se différencie des précédents, tant que ces transformations et progrès sont conformes à l’esprit et à la doctrine de l’Église et promeuvent de la meilleure façon une civilisation vraiment chrétienne.

    Explication
      La proposition réfutée est unilatérale. A chaque période de l’histoire, les catholiques ont un double devoir : d’adaptation et de résistance. La phrase incriminée n’envisage que l’adaptation.
    Ce double devoir est facile à comprendre. A aucune époque, l’ensemble des lois, institutions, mœurs, manières de voir et de comprendre, n’ont mérité que des louanges ou que des censures. Aux meilleures époques comme aux
    pires, il y eut, au contraire, des choses bonnes et des choses mauvaises. En face du bien, où qu’il se rencontre, notre attitude ne peut être que celle conseillée par l’Apôtre : Éprouver toutes choses et prendre ce qui est bon. Face au mal, nous devons également obéir au conseil de l’Apôtre : « Ne vous conformez pas au siècle présent » (Rm 12, 2).
      Cependant, il convient d’appliquer intelligemment l’un et l’autre conseil. Il est excellent d’analyser toutes choses et de ne garder que ce qui est bon. Mais nous devons avoir présent à la pensée que le bien est ce qui concorde non seulement avec la lettre, mais encore avec l’esprit. Le bien n’est pas ce qui favorise à la fois la vertu et le vice, mais ce qui favorise toujours et uniquement la vertu. Aussi, quand une coutume, irréprochable en soi, crée une atmosphère favorable au mal, la prudence commande de la rejeter. Quand une loi, favorisant l’unique
    et véritable Église, encourage en même temps l’hérésie ou l’incrédulité, elle doit être combattue.

      Il faut encore que la résistance au siècle se fasse avec prudence, c’est-à-dire : elle ne doit pas rester en deçà ni aller au-delà de sa fin. Comme exemple d’opposition inintelligente, nous pouvons citer l’attachement à des formes changeantes et sans beaucoup d’importance intrinsèque, comme de vouloir revenir à « l’autel en forme de table ». C’est une contestation qui va très au-delà de sa fin, qui est la défense de la foi 1.    D’un autre côté, la résistance ne doit pas rester en deçà de son objectif. Elle ne peut consister en une pure théorie, sans application concrète aux circonstances du moment, ni en des protestations platoniques. S’il est nécessaire d’apprendre la doctrine, il faut aussi connaître l’actualité dans toute sa réalité vivante et mouvante, et organiser l’action pour intervenir profondément dans le cours des événements.

      Enfin, il est nécessaire de se souvenir que la physionomie d’une époque ne peut être séparée en éléments bons et éléments mauvais, entièrement coupés les uns des autres. Toute époque a une mentalité propre qui résulte, à la fois, d’aspects bons et d’aspects mauvais. Si ceux-là sont prépondérants et que ceux-ci ne concernent que des objets secondaires, l’époque, sans être excellente, peut être appelée bonne. Si, au contraire, les éléments mauvais prédominent et que le bien n’existe que dans quelques détails, l’époque doit être appelée mauvaise. Dans les problèmes des rapports du catholique avec son temps, il ne suffit pas que celui-ci se détermine en fonction d’aspects fragmentaires du monde dans lequel il vit. Il doit considérer la physionomie générale du moment présent, dans son unité morale profonde, et définir sa position par rapport à elle. C’est surtout en vertu de ce principe que doit être rejetée la phrase incriminée. Car elle ne nous parle pas de l’acceptation de tel ou tel aspect du monde contemporain, mais de son unité globale.

      Dans le Syllabus, Pie IX condamne la proposition suivante : « Le pontife romain peut et doit se réconcilier et composer avec le progrès, le libéralisme, et la culture moderne » (Proposition 80 ; DS 2980). Évidemment, cette condamnation serait incompréhensible si elle ne sous-entendait pas que le progrès et la civilisation modernes, au temps de Pie IX, tout en présentant des aspects bons, étaient dans leur ensemble rongés par les erreurs de l’époque et plus spécialement par le libéralisme que la proposition 80 mentionne particulièrement. En effet, cette
    proposition est tirée de l’allocution Jamdudum du 18 mars 1861, dans laquelle le souverain pontife dépeint le tableau impressionnant de la lutte entre deux forces irréconciliables, l’une combattant pour la prétendue civilisation moderne – « système inventé pour affaiblir et, sans doute, en finir avec l’Église du Christ » –
    et l’autre défendant les principes éternels de la civilisation chrétienne. Si, par civilisation moderne, on entend ce qu’a déclaré Pie IX, c’est-à-dire une civilisation païenne en voie de s’implanter sur les décombres de l’antique civilisation chrétienne, la condamnation de la proposition 80 s’explique entièrement.
    Quel est l’aspect dominant de l’époque dans laquelle nous vivons ? Consultons les papes. Pie XI nous dit :

      A mesure que se succèdent les siècles, d’agitation en agitation, nous arrivons à la révolution actuelle que, de tous côtés, nous pouvons dire déjà déchaînée et sérieusement menaçante, selon une ampleur et une violence qui surpassent toutes les épreuves des persécutions antérieures contre l’Église. Des peuples entiers se trouvent en danger de retomber dans une barbarie pire que celle dans laquelle se trouvait encore la plus grande partie du monde à la venue du Rédempteur. (Divini Redemptoris.)
      Pie XII, dans un discours du 12 octobre 1952 à l’Union des hommes de l’Action Catholique italienne, n’est pas moins explicite :
      "Aujourd’hui ce ne sont pas seulement la Ville éternelle et l’Italie qui sont menacées, mais le monde entier. Oh ! Ne nous demandez pas qui est l’« ennemi », ni sous quel aspect il se présente. Il se rencontre partout et au milieu de tous : il sait être violent et rusé. Au cours de ces derniers siècles, il a tenté de réaliser la désagrégation intellectuelle, morale, sociale de l’unité qui existait dans l’organisme mystérieux du Christ. Il a voulu la nature sans la grâce, la raison sans la foi, la liberté sans l’autorité et, quelquefois, l’autorité sans la liberté. C’est un « ennemi » qui devient chaque fois plus concret, avec une absence de scrupules qui surprend encore : « Le Christ, oui, l’Église, non ! » Ensuite : « Dieu, oui, le Christ, non ! » Finalement, le cri impie : « Dieu est mort », et même : « Dieu n’a jamais existé ». Et voici, maintenant, la tentative d’édifier la structure du monde sur des bases que nous n’hésitons pas à indiquer comme les principales responsables de la menace qui pèse sur l’humanité : une économie sans Dieu, un droit sans Dieu, une politique sans Dieu. L’« ennemi » s’est efforcé à ce que le Christ devienne un étranger dans les universités, à l’école, dans la famille, dans l’administration de la justice et dans l’activité législative, dans les assemblées des nations, là où se décide la paix ou la guerre. Actuellement, il corrompt le monde par une presse et des spectacles qui tuent la pudeur chez les jeunes gens et les jeunes filles, et détruit l’amour entre les époux ; il inculque un nationalisme qui conduit à la guerre." (Voir Catolicismo, n° 25, janvier 1953.)

    Nous concluons ainsi :
    1) Le catholique de notre époque doit distinguer soigneusement entre le bien et le mal en soutenant et favorisant tout ce qui est bien, en s’opposant intrépidement à tout ce qui est mal, en utilisant spécialement le progrès de la
    technique pour faire de l’apostolat.
    2) Il doit prendre position contre les principes erronés qui exercent une influence prépondérante dans tous les domaines de la vie moderne : tel doit être l’objet principal de son apostolat.

    1 — La critique s’adresse ici à ceux qui, dans les années cinquante, voulaient absolument que l’on
    revienne aux formes supposées primitives de l’autel antique. La suite a montré que ce (faux) archéologisme qui n’avait rien à voir avec la foi, cachait un désir de bouleversement total et révolutionnaire
    de la liturgie. En fait de « résistance » au siècle, c’était plutôt une première forme d’« aggiornamento ».
    (NDLR.)

    Le Sel de la terre. LE SEL DE LA TERRE Nº 42, AUTOMNE 2002
    La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
    The measure of love is to love without measure.
                                     St. Augustine (354 - 430 AD)


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  • VII — Sur les relations entre l’Église et l’État

    — 66 —
    ❍ Dans le stade actuel de l’évolution de la société humaine, l’État a pris une conscience plus grande de
    sa propre autonomie, en sorte qu’il ne lui est plus possible de maintenir avec l’Église des relations aussi
    intimes qu’autrefois. A l’antique État « pharisaïquement » chrétien doit succéder, dans la future chrétienté, un état « vitalement » chrétien, c’est-à-dire animé de l’esprit évangélique, fruit de la collaboration de toutes les confessions chrétiennes, selon le message plus ou moins dense de chacune, mais sans qu’il y ait de la part du gouvernement une protection spéciale envers l’une d’elle.

    ❑ L’État a pour fin propre de pourvoir au bien temporel et, dans sa sphère, il est souverain. L’Église tutrice du droit naturel sur toute la terre, a le droit de voir respectées ses lois et ses doctrines par les pouvoirs publics
    temporels. L’État doit se déclarer officiellement catholique et doit mettre toutes ses ressources au service de la préservation et de l’expansion de la foi.

    Explication
      La phrase réfutée s’aligne logiquement sur la doctrine de la séparation de l’Église et de l’État condamnée par le Syllabus (proposition 55  1)  et de nouveau proscrite par Léon XIII dans l’encyclique Immortale Dei, par saint Pie X dans Vehementer et, plus récemment, par la lettre de la sacrée congrégation des Séminaires à l’épiscopat brésilien (AAS 42, page 841  2).  En outre, la proposition réfutée contient plusieurs autres notions inacceptables. Dans toute la rigueur de son expression, elle revient à dire que le régime d’union entre l’Église et l’État, tel
    qu’il a existé au Moyen Age, représentait une phase préliminaire ou intermédiaire, que les peuples, poussés par la force immanente de l’évolution, auraient ensuite surmontée. Or l’Église n’admet pas le déterminisme historique évolutionniste, qui implique la négation du libre arbitre et de la Providence divine. De même, elle n’admet pas que les situations diverses de l’humanité puissent triompher d’un ordre de relations déduit logiquement de la Révélation et de l’ordre naturel et immuable des choses  3.
      Moins encore, l’Église ne peut admettre que cette évolution se fasse dans le sens d’un indifférentisme religieux, de telle sorte que, dans la future chrétienté, le progrès de l’État doive consister dans l’égalité de toutes les confessions chrétiennes. Si nous lisons les propositions 77 et 79 condamnées par le Syllabus, nous
    voyons que telle est bien la doctrine de l’Église 4. Dans ce célèbre docuмent, l’immortel Pie IX condamne l’opinion de ceux qui pensent que l’égalité des cultes signifie un progrès (proposition 77, DS 2977), et celle de ceux qui nient qu’une semblable égalité conduit à l’indifférentisme religieux (prop. 79, DS 2979).
      Les mots « chrétienté », « pharisaïque » et « vital » méritent encore une remarque. Une chrétienté consiste dans un ordre temporel de choses fondé sur la doctrine de Jésus-Christ. Si l’Église catholique enseigne seule cette doctrine de manière authentique, comment une « chrétienté » peut-elle s’organiser en s’inspirant aussi bien de ce qu’enseigne l’Église et de ce que prêchent les sectes hérétiques ? Un exemple concret : si cette « chrétienté » admet le divorce, l’organisation de la famille y sera-t-elle chrétienne ? Et si elle le rejette, pourra-t-elle se dire
    inspirée autant par la doctrine catholique que par les sectes chrétiennes favorables au divorce ?
      D’autre part, il semble que le mot « pharisaïque » résonne comme une injure envers l’Église. Si le régime d’union de l’Église et de l’État a toujours été le seul accepté par l’Église ; si, en dépit des irrégularités ici ou là, il fut approuvé, maintenu et pratiqué par tant de papes, par tant de rois élevés aux honneurs des autels, comment concevoir qu’un tel régime soit qualifié de « pharisaïque » sans en inférer les conséquences les plus injurieuses pour le Saint-Siège et pour tant de saints ?
    Quant à « vital », que signifie exactement cette expression ? Vital veut dire normalement : qui a la vie. Ne fut-elle pas vitalement chrétienne la civilisation sortie des mains de l’Église au Moyen Age ? Y a-t-il quelque espoir que soit vitalement chrétien l’État interconfessionnel de la future « chrétienté » ?
    Pour terminer ces remarques, il convient de rappeler que le régime d’union entre l’Église et l’État implique comme caractéristique nécessaire la plus grande indépendance de l’Église à l’égard de l’autorité civile en tout ce qui appartient au pouvoir spirituel ou mixte. Dans les temps modernes principalement, cet ordre a été faussé par les empiétements croissants de l’État dans le domaine ecclésiastique. Il convient de condamner absolument de tels empiétements, de revendiquer la liberté de l’Église, mais non pas de renoncer au principe de son union
    avec l’État. Et lorsque, dans un pays, le malheur des circonstances est si profond que la séparation constitue un mal moindre que l’union, parce que celle-ci y serait nécessairement dénaturée, on doit craindre pour ce pays. Car, rien de ce qui se sépare de Dieu et de son Église ne peut se maintenir longtemps. Un des pires effets de la séparation de l’Église et de l’État – même lorsqu’elle est un moindre mal – est la déformation qui se produit dans la mentalité populaire, laquelle s’habitue à considérer la vie temporelle de manière totalement naturaliste. On
    forme ainsi des mentalités profondément laïcisées et l’on est obligé de reconnaître que, sous un tel système de relations, il est très difficile de façonner l’âme de tout un peuple conformément à la pensée droite qui soumet la vie temporelle à Dieu.

    1 — Proposition 55 : « L’Église doit être séparée de l’État, et l’État de l’Église » (DS 2955). (NDLR.)
    2 — Lettre de la S. C. des Séminaires à l’épiscopat du Brésil (7 mars 1950) : « Une autre erreur,
    également condamnée par l’Église, doit être évitée par le chrétien : c’est le libéralisme. Il nie que
    l’Église, en raison de sa très noble fin et de sa mission divine, ait une suprématie naturelle sur l’État. Il
    admet et encourage la séparation entre ces deux pouvoirs. Il nie à l’Église catholique le pouvoir
    indirect sur les matières mixtes. Il affirme que l’État doit se montrer indifférent en matière religieuse,
    en ce qui concerne les fidèles ; que l’on doit accorder la même liberté à la vérité qu’à l’erreur ; que
    l’Église ne doit pas avoir des privilèges et des faveurs ou des droits plus étendus que ceux qui sont
    accordés aux autres confessions religieuses, pas même dans les pays catholiques […]. » (Docuмents
    pontificaux de S.S. Pie XII, année 1950, t. XII, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1952,
    p. 75.) (NDLR.)
    3 — Dans son discours à l’Université du Latran, le 2 mars 1953, S. Ém. le cardinal Alfredo
    Ottaviani déclarait : « L’Église catholique insiste sur ce principe : que la vérité doit avoir le pas sur
    l’erreur, et que la vraie religion, quand elle est connue, doit être aidée dans sa mission spirituelle de
    préférence aux religions dont le message est plus ou moins défaillant, et où l’erreur se mêle avec la
    vérité. C’est là une simple conséquence de ce que l’homme doit à la vérité. Il serait cependant très
    faux d’en conclure que ce principe ne peut s’appliquer qu’en réclamant pour la vraie religion les
    faveurs d’un pouvoir absolutiste, ou l’assistance de dragonnades, ou que l’Église catholique
    revendique des sociétés modernes les privilèges dont elle jouissait dans une civilisation de type
    sacral, comme au Moyen Age. » (Note de l’édition brésilienne du Catéchisme des vérités opportunes…)
    4 — Proposition (condamnée) 77 : « En notre temps, il ne convient plus que la religion catholique
    soit considérée comme l’unique religion de l’État, à l’exclusion de tous les autres cultes » (DS 2977) ;
    proposition (condamnée) 79 : « Il est en effet faux que la liberté civile de tous les cultes, de même
    que le plein pouvoir laissé à tous de manifester publiquement et au grand jour leurs opinions et leurs
    pensées, conduise plus facilement à corrompre les mœurs et les esprits, et à propager la peste de
    l’indifférentisme » (DS 2979). (NDLR.)

    — 67 —
    ❍ Le devoir politique des catholiques consiste seulement à promouvoir le bien temporel. En faveur de l’Église, ils doivent se limiter à demander à l’État les libertés accordées à toute association privée.

    ❑ Le catholique doit agir sur la politique, non seulement en vue de promouvoir le bien commun dans le
    domaine temporel, mais encore d’obtenir que l’État reconnaisse à l’Église la qualité de société de droit
    public, souveraine dans sa sphère et pourvue de toutes les prérogatives qui lui appartiennent de droit
    comme seule véritable Église.

    Explication
        La proposition réfutée se ressent de l’influence de deux erreurs : – celle de la « morale nouvelle » qui, sur ce point, considère le bien commun temporel comme une fin en soi, entièrement indépendante d’une autre sphère ; – et celle de l’égalité entre la véritable Église et les fausses « églises » et associations privées.
    Ainsi, la phrase réfutée tombe logiquement sous le coup de la proposition condamnée par Pie IX dans le Syllabus, qui déclare licite l’éducation sans rapport avec la foi catholique et l’autorité de l’Église, ordonnée exclusivement ou, du moins, principalement, à la connaissance des réalités naturelles et au bien terrestre social (proposition 48, DS 2948 1). Elle mène aussi à l’erreur de la proposition 54 condamnée par le Syllabus, selon laquelle l’autorité civile doit être placée au-dessus de l’autorité ecclésiastique (DS 2954 2).
    1 — Proposition (condamnée) 48 : « Les catholiques peuvent approuver une méthode de
    formation des jeunes en dehors de la foi catholique et du pouvoir de l’Église, qui considère
    uniquement, ou en premier lieu, la connaissance des choses de la nature et les fins de la vie sociale
    terrestre. » (NDLR.)
    2 — Proposition (condamnée) 54 : « Les rois et les princes ne sont pas seulement exempts de la
    juridiction de l’Église, mais pour trancher les questions de juridiction, ils sont supérieurs à l’Église. »
    (NDLR.)

    — 68 —
    ❍ Dans la sélection des immigrants, peu importe leur croyance : il suffit de considérer les avantages économiques, ethniques et politiques.

    ❑ Dans la sélection des immigrants, on doit prendre en considération, en premier lieu, leur croyance, et non pas seulement les besoins d’ordre économique, ethnique et politique.

    Explication
      L’unité d’un pays dans la vraie foi constitue le plus élevé de ses biens spirituels. Il est évident qu’une telle unité peut être brisée si les frontières sont ouvertes à des courants migratoires qui finissent par former des kystes religieux aussi dangereux dans le domaine spirituel que le sont les kystes sociaux dans le domaine politique. La phrase réfutée, qui se ressent du laïcisme des propositions antérieures, fait abstraction de ces considérations.
    En outre, elle a été directement condamnée par le pape Pie IX dans le Syllabus, proposition 78, qui dit : « C’est donc de façon louable que dans certaines régions portant le nom de catholiques la loi a pourvu à ce qu’ils soient
    permis aux immigrants de pouvoir exercer publiquement leurs cultes respectifs »
    (DS 2978).
      Car, en matière d’immigration, la considération du facteur religieux doit occuper la première place. Bien que ce soit un droit naturel des nations surpeuplées de pouvoir envoyer des émigrants dans les pays capables de les recevoir, cependant, il est nécessaire que ce droit soit exercé avec les précautions exigées par le droit supérieur qu’ont les populations catholiques de fidélité à l’Église. En d’autres termes, quand les circonstances obligent les pays catholiques à recevoir des immigrants des pays païens ou hérétiques, une série de mesures complexes
    s’impose pour qu’une telle immigration ne s’opère pas au détriment spirituel des populations catholiques. On peut voir toute la préoccupation du Saint-Siège concernant l’assistance spirituelle aux immigrants dans la constitution apostolique Exsul Familia du 1er août 1952 (AAS 44, page 649 sq. 1).
    1 — Texte français dans Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1952, t. XIV, Saint-Maurice,
    éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1955, p. 337 sq. La première partie de la constitution traite de ce
    que l’Église a fait dans le passé spécialement pour les émigrés catholiques, la deuxième partie donne
    « les règles pour l’assistance spirituelle des émigrants » (voir spécialement le chap. IV : « De la charge
    des âmes à exercer par les Ordinaires des lieux par rapport aux étrangers », p. 395 sq.). (NDLR.)

    — 69 —
    ❍ Les catholiques doivent s’unir sur le terrain social et économique à tout groupe, courant ou
    mouvement politique qui les aide contre le capitalisme. Ainsi peuvent-ils accepter, dans leurs relations avec les communistes, la politique dite de la main tendue.

    ❑ Les catholiques peuvent consentir à unir leurs efforts à d’autres mouvements, courants d’idées, groupements, s’ils poursuivent, occasionnellement, la même fin immédiate. Mais ceci n’autorise pas une collaboration stable avec des éléments d’une autre doctrine. Les fins ultimes, les moyens employés et l’esprit avec lequel chacun recherche la fin qu’il se propose étant différents, il y a une vraie impossibilité de collaboration durable avec les communistes. Une telle collaboration pourrait, en outre, nuire gravement aux catholiques et conduire le public à des confusions dangereuses. Les catholiques doivent toujours éviter, dans leurs interventions dans les questions sociales, d’avoir l’air de soutenir la lutte des classes.

    Explication
      La phrase réfutée est très liée aux principes du laïcisme et de l’indifférentisme religieux des propositions précédentes. Elle subordonne toutes les considérations spirituelles et doctrinales à la simple préoccupation de succès occasionnels et favorise les pires ennemis de l’Église. Rappelons que les communistes ont
    fait l’objet d’une condamnation spéciale de la part du Saint-Office (1er juillet 1949, AAS 41, page 334 1).

    1 — Décret du Saint-Office contre le communisme du 1er juillet 1949 (DS 3865) :

    « Questions : 1. Est-il permis d’adhérer au parti communiste ou de le favoriser en quelque
    manière ? 2. Est-il permis de publier, de répandre ou de lire des livres, revues, journaux ou tracts qui
    soutiennent la doctrine ou l’action des communistes, ou d’y écrire ? 3. Des fidèles chrétiens qui
    sciemment et librement ont posé des actes dont il est question en 1 et 2 peuvent-ils être admis aux
    sacrements ? 4. Des fidèles chrétiens qui professent la doctrine matérialiste et antichrétienne des
    communistes, et surtout ceux qui la défendent ou la propagent, encourent-ils par le fait même,
    comme apostats de la foi catholique, l’excommunication spécialement réservée au Siège apostolique ?

    « Réponse (confirmée par le souverain pontife le 30 juin 1949) : Pour 1. Non : le communisme est
    en effet matérialiste et antichrétien ; bien que les chefs communistes déclarent parfois en paroles
    qu’ils n’attaquent pas la religion, ils montrent en fait, soit par la doctrine, soit par les actes, qu’ils sont
    hostiles à Dieu, à la vraie religion et à l’Église du Christ. Pour 2. Non : ils sont en effet prohibés de
    plein droit (voir CIC [1917], can. 1399). Pour 3. Non, conformément aux principes ordinaires
    concernant le refus des sacrements à ceux qui n’ont pas la disposition requise. Pour 4. Oui. » (NDLR.)

    VIII — Sur les questions politiques, économiques et sociales
    — 70 —
    ❍ Jésus-Christ a prêché la pauvreté et l’humilité, la préférence pour les faibles et les petits. Une société pénétrée de cet esprit doit éliminer les inégalités de fortune et de condition sociale. Les réformes politiques et sociales découlant de la Révolution française furent, consciemment ou non, d’inspiration évangélique et concourent à
    réaliser une société vraiment chrétienne.

    ❑ Jésus-Christ a prêché l’esprit de pauvreté et d’humilité, la préférence pour les faibles et les petits. Par pauvreté, l’Église entend le détachement des biens de la terre ou un emploi de ses richesses tel qu’elles servent au salut de l’âme et non à sa perte. Ainsi, elle n’a jamais enseigné qu’être riche est intrinsèquement mauvais ; mais seulement qu’il est mauvais de faire un usage désordonné de la richesse. Par humilité, l’Église entend le fait, pour le fidèle, de reconnaître qu’il ne tient rien de lui-même et a tout reçu de Dieu et qu’il doit se mettre à la place qui lui revient. L’existence de classes sociales est donc une condition à la pratique de la vertu d’humilité. Quant à la préférence pour les faibles et les petits, elle serait impossible dans une société où tous seraient égaux. La Révolution française, dans la mesure où elle a cherché à réaliser une complète égalité politique, sociale et économique dans
    la société idéale rêvée par ses auteurs, a été un mouvement satanique, inspiré par l’orgueil.

    Explication
      Il est certain que les inégalités, soit dans le domaine politique, soit dans le domaine social ou économique, ont souvent été iniques et ceci pour deux motifs principaux : soit parce que ces inégalités étaient illégitimes et résultaient de l’oppression ; soit parce qu’elles étaient accentuées au point de nier la dignité naturelle de l’homme ou de lui ôter les moyens de vivre sainement et honnêtement.
      Un exemple typique d’inégalité exagérée est le sort très dur et immérité dans lequel furent jetés les ouvriers, au XIX e siècle, par suite de la révolution industrielle (Pie XI, Quadragesimo anno, AAS 23, pages 195, 197 et 198 1). Contrairement à ce qu’on a pu dire, l’Église a accompli son devoir en luttant contre cette situation.
      Mais, dans cette lutte, son objectif est une société hiérarchisée à l’intérieur des limites de l’ordre naturel. Elle n’a jamais voulu l’abolition de toutes les inégalités légitimes, rêvée par les révolutionnaires et à laquelle travaillent la franc-maçonnerie et autres agents (cf. Pie XII, Radiomessage de Noël 1944, AAS, vol. 37, page 14 2).

    1 — Par exemple : « Certes le capital a longtemps réussi à s’arroger des avantages excessifs. Il
    réclamait pour lui la totalité du produit et du bénéfice, laissant à peine à la classe des travailleurs de
    quoi refaire ses forces et se perpétuer. Une loi économique inéluctable, assurait-on, voulait que tout
    le capital s’accuмulât entre les mains des riches ; la même loi condamnait les ouvriers à traîner la plus
    précaire des existences dans un perpétuel dénuement… » (Actes de S.S. Pie XI, t. VII [1931], Bonne
    Presse, p. 120) ; « […] L’atténuation du paupérisme qui, au temps de Léon XIII, s’étalait encore dans
    toute son horreur… » (ibid., p. 123). (NDLR.)

    2 — Radiomessage de Noël 1944 : « Dans un peuple digne de ce nom, toutes les inégalités, qui
    dérivent non du libre caprice, mais de la nature même des choses, inégalités de culture, de richesses,
    de position sociale, sans préjudice, bien entendu, de la justice et de la charité mutuelle, ne sont
    nullement un obstacle à l’existence et à la prédominance d’un authentique esprit de communauté et
    de fraternité. Bien au contraire, loin de nuire aucunement à l’égalité civile, elles lui confèrent son sens
    légitime, à savoir que chacun a le droit, en face de l’État, de vivre honorablement sa propre vie
    personnelle, au poste et dans les conditions où l’ont placé les desseins et les dispositions de la
    Providence. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1944, t. VI, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre
    de Saint-Augustin, 1963, p. 246.) (NDLR.)

    — 71 —
    ❍ L’Église doit faire cause commune avec l’ouvrier dans la lutte contre le régime capitaliste.

    ❑ L’Église intervient dans les questions sociales pour protéger la loi naturelle. Son objectif n’est pas de favoriser une classe au détriment d’une autre, mais de faire régner dans les relations entre les classes la doctrine de Jésus-Christ. Elle appuie les justes aspirations des ouvriers autant que les droits authentiques des patrons. Le régime capitaliste, en tant que fondé sur la propriété privée, est, en soi, légitime. L’Église combat ses abus, mais ne favorise pas sa destruction.

    Explication
      Se généralise parmi les catholiques l’idée selon laquelle l’Église est une sorte de parti travailliste dont la finalité serait la défense d’une seule classe. Or, contrairement à cela, l’Église se tient au-dessus des classes comme        audessus des partis. Même quand elle défend les justes revendications des ouvriers, jamais elle ne méconnaît les droits des patrons. Il n’y a pas longtemps, dans une allocution à l’occasion du Katholikentag (journée catholique) de Vienne (14 septembre 1952 ; cf. Catolicismo nº 24, décembre 1952), le pape a déclaré bien clairement que la
    question ouvrière, brûlante dans la première moitié de ce siècle, était déjà dépassée par une autre question plus grave, celle de la lutte des classes insufflée par le socialisme 1.  Il est plus nécessaire que jamais de montrer que l’Église est la protectrice de tous, ouvriers et patrons, et non pas seulement l’avocate systématique
    des uns contre les autres.
      Quant au capitalisme, il convient de dissiper la confusion qui s’est établie à son endroit dans le langage courant. Le régime capitaliste en soi, c’est-à-dire en tant que système fondé sur la propriété privée et sur la libre initiative, et autorisant des bénéfices dans la mesure permise par la morale, est légitime et ne peut être confondu avec les abus auxquels il a en fait donné lieu en beaucoup d’endroits.
      Il convient de distinguer la légitime défense des organisations ouvrières saines contre les abus du capitalisme, de la lutte des organisations révolutionnaires qui proclament l’illégitimité du régime capitaliste en soi. Quiconque s’associe à l’action de ces dernières organisations collabore avec le communisme et encourt le blâme contenu dans la lettre de la sacrée congrégation des Séminaires à l’épiscopat brésilien : « Pour quelques-uns, ne sont pas suffisantes, sur le terrain social, les directives si humaines, si sagement favorables aux classes ouvrières,
    que le Saint-Siège, principalement de Léon XIII à Pie XII, a promulguées, mais ils tâchent de s’approcher toujours plus de la gauche, jusqu’à entretenir une vraie sympathie envers le communisme bolchévique destructeur de la religion et de tout le vrai bien de la personne humaine » (AAS 42, page 841 2).

    1 — Radiomessage au Katholikentag de Vienne, 14 septembre 1952 : « […] L’Église évoque
    aujourd’hui la première période des luttes sociales contemporaines. Au centre dominait la question
    ouvrière : la misère du prolétariat, et le devoir d’élever cette classe d’hommes, livrée sans défense aux
    aléas de la conjoncture économique, jusqu’à la dignité des autres classes de la cité dotées de droits
    précis. Ce problème peut être considéré aujourd’hui comme résolu, au moins dans ses parties
    essentielles, et le monde catholique a contribué à cette solution d’une façon loyale et efficace. […] Si
    les signes des temps ne trompent pas, d’autres problèmes dominent dans la deuxième époque des
    luttes sociales, où nous semblons être entrés. Nous nommerons deux de ces problèmes : le
    dépassement de la lutte des classes et la défense de la personne et de la famille. La lutte des classes
    doit être dépassée par l’instauration d’un ordre organique unissant patrons et ouvriers. La lutte des
    classes ne saurait jamais être un objectif de la doctrine sociale catholique. L’Église se doit toujours à
    toutes les classes de la société. » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1952, t. XIV, SaintMaurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1955, p. 469.) (NDLR.)
    2 — Traduction française dans Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1950, t. XII, SaintMaurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1952, p. 76.

    — 72 —
    ❍ Le régime de salarié est contraire à la dignité de l’homme et intrinsèquement injuste. La condition de travailleur comporte naturellement un droit de participation à la propriété de l’entreprise, à sa direction et à ses bénéfices.

    ❑ Le régime de salarié est entièrement conforme à la dignité de l’homme et du chrétien. Le contrat de travail n’implique pas comme conséquence nécessaire la participation du travailleur à la propriété, à la direction ou aux bénéfices de l’entreprise.

    Explication
      Léon XIII, saint Pie X, Pie XI (voir Quadragesimo anno, AAS 23, page 199 1)  et Pie XII, enseignent que le régime du salarié est en soi juste et conforme à la dignité humaine. L’économie malsaine des XIXe et XXe siècles a ôté au régime du salaire son véritable caractère. Selon la doctrine de l’Église, les relations entre patrons et ouvriers sont revêtues d’un caractère familial. Les employés, autrefois, étaient considérés comme membres à part entière de la société domestique, qui comprenait les époux, la famille et l’ensemble de la communauté soumise au maître de maison. Le mot « patron » provenant de « pater », père, et le mot « domestique » [criado], dérivé du fait que les domestiques étaient formés et éduqués dans la propre maison [casa en portugais, domus en latin] du père, rappelle bien ce caractère. Cela suffit à montrer qu’il n’y a rien de dépréciatif dans la condition d’employé salarié. Même dans le milieu industriel et commercial, le caractère familial de ces relations doit se poursuivre. L’Église veut que patrons et ouvriers soient entre eux, dans la mesure du possible, comme les membres d’une même famille, père et fils, qui collaborent au bien-être commun.
      Au point de vue de la justice, le salaire est un système de rémunération satisfaisant, dès lors qu’il réalise les conditions fixées par Pie XI, c’est-à-dire qu’il suffit à permettre l’entretien honnête et digne de l’ouvrier et de sa famille. Dans l’entretien honnête et digne, on inclut ce qui est nécessaire à l’ouvrier prévoyant pour se constituer un pécule et améliorer la situation de sa propre famille, de sorte qu’il participe également à l’augmentation de bien-être que le progrès de la technique et de la production amène à la société (cf. Quadragesimo Anno : « Les
    ressources que ne cessent d’accuмuler les progrès de l’économie sociale doivent donc être réparties de telle manière entre les individus et les diverses classes de la société, que soit procurée cette utilité commune dont parle Léon XIII, ou, pour exprimer autrement la même pensée, que soit respecté le bien commun de la société tout entière » (AAS 23, page 196 2).

      La participation de l’ouvrier aux gains de l’entreprise est présentée par Pie XI et Pie XII comme digne d’estime, mais jamais comme obligatoire (voir Radiomessage au Katholikentag déjà citée 3 édité).    Dans certains cas, elle peut produire de bons fruits. Mais ce n’est pas une panacée qui doive toujours être appliquée. Et surtout, elle ne peut être imposée par la loi à tout un pays. On doit dire de même de la participation de l’ouvrier à la propriété de l’entreprise ou à sa direction. En ce qui concerne ce dernier point, la doctrine catholique n’admet cette
    participation qu’à la condition que le pouvoir de décision et la responsabilité de toute la marche de l’usine ou de l’établissement commercial restent entre les mains du propriétaire de l’entreprise (cf. Pie XII, Allocution au 9e Congrès de l’Union internationale des associations patronales catholiques, A A S 41, page 285 4 édité).
    La phrase réfutée, portée à ses ultimes conséquences logiques, représenterait l’abolition de l’inégalité des classes, dernier terme rêvé par tous les révolutionnaires.

    1 — « Commençons par relever la profonde erreur de ceux qui déclarent essentiellement injuste le contrat de louage de travail et prétendent qu’il faut lui substituer un contrat de société, ce disant, ils font, en effet, gravement injure à Notre Prédécesseur [Léon XIII], car l’encyclique Rerum novarum non seulement admet la légitimité du salariat, mais s’attache longuement à le régler selon les normes de la justice. » (Quadragesimo anno, Actes de S.S. Pie XI, t. VII [1931], Bonne Presse, p. 126). (NDLR.)
    2 — Quadragesimo anno, Actes de S.S. Pie XI, t. VII [1931], Bonne Presse, p. 122.
    3 — Radiomessage au Katholikentag, 14 septembre 1952 : « C’est ainsi que s’explique l’insistance
    de la doctrine sociale catholique, notamment sur le droit de propriété privée. C’est la raison profonde
    pour laquelle les papes des encycliques sociales et Nous-même avons refusé de déduire, soit
    directement, soit indirectement, de la nature du contrat de travail, le droit de copropriété de l’ouvrier
    au capital, et, partant, son droit de cogestion. […] » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année
    1952, t. XIV, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1955, p. 469.) Voir aussi DS 3733
    (Quadragesimo anno.) (NDLR.)
    4 — Allocution aux membres de l’Union internationale des associations patronales catholiques, 7
    mai 1949 : « On ne serait pas non plus dans le vrai en voulant affirmer que toute entreprise
    particulière est par sa nature une Société, de manière que les rapports entre participants y soient
    déterminés par les règles de la justice distributive, en sorte que tous indistinctement – propriétaires ou
    non des moyens de production – auraient droit à leur part de la propriété ou tout au moins des
    bénéfices de 1’entreprise. Une telle conception part de l’hypothèse que toute entreprise rentre par
    nature dans la sphère du droit public. […] Le propriétaire des moyens de production, quel qu’il soit
    – propriétaire particulier, association d’ouvriers, ou fondation – doit, toujours dans les limites du droit
    public de l’économie rester maître de ses décisions économiques. Il va de soi que son revenu est plus
    élevé que celui de ses collaborateurs. […] » (Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1949, t. XI,
    Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1951, p. 161-162.) (NDLR.)

    — 73 —
    ❍ Selon saint Augustin, l’unique propriétaire des richesses est Dieu. L’homme n’en est que le gérant.
    Les richesses appartiennent donc à la collectivité et le propriétaire n’en est que le simple administrateur en vue
    du bien commun.

    ❑ Selon saint Augustin, le suprême propriétaire des richesses est Dieu. De là il découle que le propriétaire
    doit faire usage de ses biens selon la volonté souveraine de Dieu. Dieu cependant ne s’identifie pas à la
    collectivité. Si l’empire de Dieu sur toutes les richesses est absolu, celui de la collectivité ne l’est pas.
    Transférer les droits de Dieu à une collectivité équivaut à diviniser l’État et à immoler l’individu.

    Explication
      La proposition réfutée est « étatolâtre ». C’est pourquoi elle arrive à des conclusions qui ne sont admissibles que dans une conception qui fait de l’État un dieu. En réalité, le régime de propriété individuelle procède de la conception selon laquelle l’État n’est ni un dieu, ni une fin en soi, mais plutôt un moyen. Pour cette raison, la condition de propriétaire consiste dans l’exercice d’un droit personnel et propre, et non pas dans l’exercice d’un droit délégué par l’État. C’est pourquoi nous disons que le propriétaire ne peut être, en aucune manière,
    confondu avec un simple gérant.
      Ce qui caractérise le gérant, en effet, c’est l’exercice de droits qui ne lui sont pas propres, mais qui lui ont été délégués. Et c’est la raison pour laquelle la distinction entre propriétaire et gérant est courante dans les législations des pays non communistes (cf. Quadragesimo anno, AAS 23 1).
    1 — « Ce qui à notre époque frappe tout d’abord le regard, ce n’est pas seulement la concentration des richesses, mais encore l’accuмulation d’une énorme puissance, d’un pouvoir économique discrétionnaire, aux mains d’un petit nombre d’hommes qui d’ordinaire ne sont pas les propriétaires, mais les simples dépositaires et gérants du capital qu’ils administrent à leur gré. Ce pouvoir est surtout considérable chez ceux qui, détenteurs et maîtres absolus de l’argent, gouvernent le crédit et le dispensent selon leur bon plaisir. Par là, ils distribuent en quelque sorte le sang à l’organisme économique dont ils tiennent la vie entre leurs mains, si bien que sans leur consentement nul ne peut plus respirer. » (Quadragesimo anno, Actes de S.S. Pie XI, t. VII [1931], Bonne Presse, p. 146-147). (NDLR.)

    — 74 —
    ❍ L’unique titre de propriété, dans le sens strict du terme, est le travail, en sorte que l’homme est seulement propriétaire de ce qu’il produit personnellement. Les richesses naturelles qu’il possède ne lui appartiennent pas d’une manière absolue. Il n’en est que l’administrateur et ne les possède que dans la mesure où il les administre, du fait que leur propriété absolue appartient à la collectivité.

    ❑ Léon XIII enseigne que le titre originaire de la propriété n’est pas le travail, mais l’occupation. En sorte que l’homme est propriétaire non seulement du fruit de son travail, mais aussi des richesses naturelles, c’est-à-dire non seulement du fruit de la terre, mais aussi de la terre elle-même. Il pourra exploiter celle-ci personnellement ou
    par d’autres.

    Explication
      La phrase réfutée rejoint ce qu’on appelle le « socialisme agraire » qui nie la propriété de la terre. Cette opinion est condamnée par les sociologues catholiques qui s’appuient sur l’argumentation avec laquelle Léon XIII, dans Rerum Novarum, justifie la propriété privée 1 édité.  Et, de fait, dans cette encyclique, le pape montre que l’homme a droit aussi aux biens-fonds légitimement acquis. Voir aussi la doctrine de Quadragesimo Anno, reproduite dans l’explication du numéro 71.  Dans la même encyclique, Pie XI rejette directement l’opinion de ceux qui voient dans le travail l’unique titre de propriété (2 édité).

    1 — « La tradition universelle, non moins que les enseignements de Notre Prédécesseur [Léon XIII], font de l’occupation d’un bien sans maître et du travail qui transforme une matière (occupatione rei nullius et industria seu specificatione) les titres originaires de la propriété. De fait, contrairement à certaines opinions, il n’y a aucune injustice à occuper un bien vacant qui n’appartient à personne. D’un autre côté, le travail que l’homme exécute en son propre nom et par lequel il confère à un objet une forme nouvelle ou un accroissement de valeur est le seul qui lui donne un droit sur le produit. » (Quadragesimo anno, ibid., p. 118 ; DS 3730.) (NDLR.)
    2 — « Vous n’ignorez pas, vénérables frères et très chers fils, avec quelle énergie Notre
    Prédécesseur [Léon XIII], d’heureuse mémoire, s’est fait le défenseur de la propriété privée contre les
    erreurs socialistes de son temps et comment il a montré que son abolition, loin de servir les intérêts
    de la classe ouvrière, ne pourrait que les compromettre gravement. » (Quadragesimo anno, ibid.,
    p. 112-113.) (NDLR.)

    — 75 —
    ❍ De soi, la terre n’est pas susceptible d’appropriation individuelle, car elle appartient à la collectivité. Ainsi, les
    personnes qui vivent de la terre doivent payer à la collectivité les avantages qu’elles tirent de son utilisation exclusive. Cette redevance, l’État peut la percevoir au moyen d’un système tributaire qui fasse retomber sur la terre tous les impôts. Et comme la terre est la source de tous les biens, un tel tribut doit suffire à pourvoir à tous les besoins de l’État.

    ❑ La terre, comme tout autre bien meuble ou immeuble, est susceptible d’appropriation individuelle. Ainsi, le propriétaire de la terre ne doit aucunement à l’État un quelconque tribut pour son utilisation exclusive. Les impôts doivent retomber sur les propriétaires autant que sur tout autre personne, selon la justice distributive. La terre n’est pas le fonds unique des biens économiques. Un tribut qui retomberait exclusivement sur la terre subvertirait l’économie privée et serait insuffisant pour supporter les dépenses normales de l’État.

    Explication
      La phrase réfutée est une des thèses classiques du « socialisme agraire » d’Henri George. L’Église est loin de s’associer à cette phobie de la propriété foncière. Dans cette propriété, elle voit, tout au contraire, un appui précieux apporté à la stabilité des familles, des classes sociales, des associations pieuses et charitables, ainsi que des instituts ecclésiastiques.

    — 76 —
    ❍ Les grandes propriétés sont intrinsèquement mauvaises parce que contraires à la doctrine chrétienne qui
    n’admet que la petite propriété, plus conforme à l’égalité qui doit régner entre les hommes.

    ❑ Il est désirable que la propriété se répartisse le plus possible entre les hommes comme apanage naturel de la
    personnalité. La prospérité sociale, cependant, comporte et parfois exige qu’à côté de la petite propriété, il existe de moyennes et grandes propriétés. L’égalité entre les hommes doit s’entendre non dans le sens niveleur, mais
    dans le sens proportionnel : les droits et les responsabilités correspondent à la situation que la personne occupe
    dans la société.

    Explication
      Comme la propriété remplit aussi une fonction sociale, cela implique des limites nécessaires à la grande propriété : quand elle favorise l’improductivité des richesses au détriment du bien commun ; quand elle concentre tellement les richesses dans les mains de quelques-uns qu’elle réduit les autres à la misère, à l’indigence ou à la servitude ; quand elle empêche une notable partie des hommes de devenir propriétaires. (Voir l’explication de la proposition 71.)
    Sur la légitimité des grandes propriétés, le pape Pie XII s’est prononcé dans l’allocution du 2 juillet 1951 aux membres du Congrès réuni à Rome pour étudier l’amélioration des conditions de vie de l’ouvrier agricole (AAS 43, page 554 sq.). Après avoir parlé de la convenance de la petite propriété rurale (« Nous pensons ici d’abord à l’exploitation paysanne, à l’exploitation familiale : telle est la classe rurale qui, par l’ensemble de son caractère social, et aussi par son rôle économique, forme comme le noyau d’une saine paysannerie »), le pape a ajouté : « Cela ne revient pas à nier l’utilité, souvent la nécessité, d’exploitations agraires plus vastes 1. »
    1 — Discours au Ier Congrès catholique international rural, 2 juillet 1951. Docuмents pontificaux
    de S.S. Pie XII, année 1951, t. XIII, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1954, p. 288.
    (NDLR.)

    — 77 —
    ❍ La question sociale est une question de simple justice dans l’ordre économique. Pour la résoudre on ne
    doit pas faire appel à la charité.

    ❑ La question sociale est avant tout une question morale et religieuse (Léon XIII, Graves de communi). Elle englobe des questions de justice et de charité et, jamais, elle ne sera résolue par la pratique des simples devoirs de justice.

    Explication
      La proposition réfutée est cohérente avec le matérialisme historique qui ne prend pas en considération, dans la question sociale, l’existence de l’âme humaine, mais seulement le corps et ses nécessités. De fait, l’Église enseigne que la question sociale est avant tout morale ; et comme toutes les questions morales sont religieuses, elle est essentiellement religieuse.
      Léon XIII, dans Rerum novarum, enseigne que la question sociale n’a de solution possible que si l’on admet deux principes : 1º l’inégalité sociale ; 2º la nécessité de l’union des classes sociales. En développant ce second principe, il indique les moyens qui doivent être mis en œuvre pour arriver à cette union, à savoir :
      a) la justice ;
      b) l’amitié, qui porte les riches à remplir non seulement leurs devoirs de stricte justice, mais aussi à être généreux pour ce qui regarde leur superflu. Il ajoute que ce devoir d’aumône est une véritable obligation morale et que la Providence en a disposé ainsi pour favoriser l’union entre les classes 1.  Ce fut le dessein de la Providence, en donnant aux uns plus qu’aux autres, soit en matière de talents, soit en matière de richesses, que les uns servent les autres en distribuant leur superflu et que tous vivent ainsi unis et amis ;
      c) en troisième lieu, le sentiment de la charité chrétienne qui, en inspirant les diverses relations qui s’établissent entre les classes, imprègne la vie sociale de cette suavité ordonnée qui est la perfection de la vie humaine en commun.
      Léon XIII, donc, est loin de restreindre la question sociale aux limites étroites et mesquines du « do ut facias ». Il envisage la question d’une manière humaine, considérant que Dieu Notre-Seigneur a fait toutes les créatures pour une même fin ultime, laquelle doit être obtenue par l’aide multiforme que se donnent, ici-bas, les uns et les autres.
      Dans `Graves de communi`, écrit dix ans plus tard, en 1901, Léon XIII déclare catégoriquement qu’on ne résoudra pas la question sociale par des augmentations de salaire, par la diminution des heures de travail ou par d’autres mesures de ce genre ; la paix sociale est le fruit de la vertu que seule la religion peut implanter solidement.
    La même doctrine est enseignée par Pie XI dans Quadragesimo anno, qui désigne la cause des maux de la société dans le développement de l’économie réalisée en marge des principes moraux et même contre ces principes 2.

    1 — Voir aussi DS 3729 (Quadragesimo anno) : « Les riches sont tenus par un très grave précepte
    de pratiquer l’aumône, la bienfaisance et la magnificence, comme l’enseignent les saintes Écritures et
    les saints Pères de l’Église. »
    2 — Voir la dernière partie de l’encyclique (Actes de S.S. Pie XI, ibid., p. 160 sq.).

    — 78 —
    ❍ L’Église s’est trompée dans le passé lorsqu’elle a approuvé les régimes monarchiques et aristocratiques qui
    favorisent les inégalités et l’orgueil de classe, et qui sont, par suite, incompatibles avec l’esprit évangélique.

    ❑ En soi, l’Église considère également compatibles avec ses principes et, donc, avec l’esprit évangélique, les trois
    régimes monarchique, aristocratique et démocratique. Saint Thomas enseigne qu’en principe, le meilleur régime
    est le monarchique, mais qu’étant données les contingences humaines, le meilleur système de gouvernement
    doit compter des éléments de chacun de ces trois régimes (I-II, q. 105, a. 1, c et ad 1  3* ).

    Explication
      La phrase réfutée fut condamnée par saint Pie X dans la lettre apostolique Notre charge apostolique contre le Sillon, organe de propagande à tendance moderniste dirigé par Marc Sangnier. Dans ce docuмent, le saint pape déclare que la civilisation chrétienne, selon Léon XIII, est possible en l’une quelconque des trois formes de gouvernement  (4 édité).
      De plus, la phrase réfutée procède du présupposé faux selon lequel l’égalité entre les hommes a été enseignée par Jésus-Christ. Tous les docuмents pontificaux se rapportant aux questions sociales établissent comme fondement voulu par la Providence l’inégalité des classes. Ainsi, par exemple : Rerum novarum,
    Quadragesimo anno, le Radiomessage de Noël 1944, etc.

    3* — « […] Voici donc l’organisation la meilleure pour le gouvernement d’une cité ou d’un royaume : à la tête est placé, en raison de sa vertu, un chef unique ayant autorité sur tous ; puis viennent un certain nombre de chefs subalternes, qualifiés par leur vertu ; et cependant la multitude n’est pas étrangère au pouvoir ainsi défini, tous ayant la possibilité d’être élus et tous étant d’autre part électeurs. Tel est le régime parfait, heureusement mélangé de monarchie par la prééminence d’un seul, d’aristocratie par la multiplicité de chefs vertueusement qualifiés, de démocratie enfin ou de pouvoir populaire du fait que de simples citoyens peuvent être choisis comme chefs, et que le choix des chefs appartient au peuple. Et tel fut le régime institué par la loi divine. En effet, Moïse et ses successeurs gouvernaient le peuple en qualité de chefs uniques et universels, ce qui est une
    caractéristique de la royauté. Mais les soixante-douze anciens étaient élus en raison de leur mérite(Dt 1, 15) : “Je pris dans vos tribus des hommes sages et considérés, et je les établis comme chefs” ; voilà l’élément d’aristocratie. Quant à la démocratie, elle s’affirmait en ce que les chefs étaient pris dans l’ensemble du peuple, (Ex 18, 21) : “Choisis parmi tout le peuple des hommes capables etc.” ; et que le peuple aussi les désignait (Dt 1, 13) : “Présentez, pris parmi vous, des hommes sages”. L’excellence des dispositions légales est donc incontestable en ce qui touche à l’organisation des pouvoirs. » (Somme théologique, tome 2, Paris, Cerf, 1984, p. 702.)

    4 — « Ainsi [pour le Sillon] la démocratie seule inaugurera le règne de la parfaite justice ! N’est-ce
    pas une injure faite aux autres formes de gouvernement, qu’on ravale, de la sorte, au rang de
    gouvernements de pis-aller impuissants ? Au reste, le Sillon se heurte encore sur ce point à l’enseignement de Léon XIII. Il aurait pu lire dans l’encyclique déjà citée du Principat politique [Diuturnum illud] que “la justice sauvegardée, il n’est pas interdit aux peuples de se donner le gouvernement qui répond le mieux à leur caractère ou aux institutions et coutumes qu’ils ont reçues de leurs ancêtres” ; et 1’encyclique fait allusion à la triple forme de gouvernement bien connue. Elle suppose donc que la justice est compatible avec chacune d’elles. » (Docuмents pontificaux de Sa Sainteté saint Pie X, t. II, 1909-1914, publications du Courrier de Rome, 1993, p. 257.)

    — 79 —
    ❍ La démocratie chrétienne consiste dans le gouvernement du peuple, c’est-à-dire de la majorité.

    ❑ « Démocratie chrétienne » est une expression employée pour indiquer tout gouvernement qui promeut le bien commun sous la loi de Dieu, que ce gouvernement soit monarchique, aristocratique ou démocratique. C’est ce qu’enseigne Léon XIII quand il dit que la démocratie chrétienne « ne doit absolument pas avoir en vue de préférer
    ou de préparer une forme de gouvernement pour la substituer à une autre » (Graves de communi). La forme démocratique de gouvernement est compatible avec la doctrine de l’Église dans la mesure où elle signifie la participation du peuple aux affaires publiques. Mais, par « peuple », l’Église n’entend pas la majorité numérique, inorganique, c’est-à-dire la masse ; mais bien toute la population, compte tenu des légitimes différenciations de classe, de région, etc. La démocratie légitime n’est donc pas la domination des classes les plus nombreuses sur les moins nombreuses, de la masse sur l’élite, mais l’influence juste et proportionnée des classes, familles, régions et
    groupes sociaux dans les affaires publiques.

    Explication
      La différence entre la conception catholique et la conception courante de la démocratie provient d’une manière différente de comprendre le mot « peuple ».
      Pour l’Église, le peuple est, en un certain sens, le contraire de la « masse ». Pie XII dit : « Peuple et multitude amorphe (ou, comme on a coutume de l’appeler, masse) sont deux concepts différents. Le peuple vit et se meut par sa vie propre ; la masse est de soi inerte, et elle ne peut être mue que de l’extérieur. Le peuple
    vit de la plénitude de la vie des hommes qui le composent, dont chacun, à sa place et de la manière qui lui sont propres, est une personne consciente de ses propres responsabilités et de ses propres convictions. La masse, au contraire, attend l’impulsion du dehors, jouet facile entre les mains de quiconque en exploite les instincts et les impressions, prompte à suivre, tour à tour, aujourd’hui tel drapeau et demain tel autre. L’exubérance vitale d’un vrai peuple répand la vie, abondante et riche, dans l’État et dans tous ses organes, leur infusant, avec une
    vigueur sans cesse renouvelée, la conscience des propres responsabilités, le sens vrai du bien commun » (Radiomessage de Noël 1944 1).
      Or, pour le commun des démocrates, le peuple est précisément ce que Pie XII appelle la masse. C’est ce qui ressort des paroles du pape glorieusement régnant :
      « Dans le domaine national et constitutionnel. Partout, actuellement, la vie des nations est désagrégée par le culte aveugle de la valeur numérique. Le citoyen est électeur. Mais, comme tel, il n’est en réalité qu’une des unités, dont le total constitue une majorité ou une minorité, qu’un déplacement de quelques voix, d’une seule même, suffira à inverser. Au regard des partis, il ne compte que pour sa valeur électorale, pour l’appoint qu’apporte sa voix ; de sa place et de son rôle de père de famille et dans la profession, il n’est pas question. »
    (Allocution aux dirigeants du Mouvement universel pour une confédération mondiale, le 6 avril 1951 2).
      A propos de la démocratie, il convient d’ajouter que jamais, dans le sens acceptable du mot, elle ne s’identifie avec le mythe révolutionnaire de la souveraineté populaire. Tout pouvoir vient de Dieu. Le peuple, – et, par « peuple », on entend ce qui a été défini ci-dessus, en opposition avec la masse, – ne peut tout au plus que choisir ceux qui gouverneront avec l’autorité qui leur vient de Dieu.

    1 — Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1944, t. VI, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de
    Saint-Augustin, 1963, p. 246.
    2 — Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1951, t. XIII, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de
    Saint-Augustin, 1954, p. 119.

    — 80 —
    ❍ Les catholiques doivent préférer le socialisme au libéralisme.

    ❑ Les catholiques ne doivent accepter ni le libéralisme, ni le socialisme.

    Explication
      Selon la doctrine de l’Église, tant le régime libéral que le régime socialiste
    sont mauvais ; et quand ils sont portés à leurs ultimes conséquences, ils produisent la complète subversion de la vie sociale.
      Les catholiques doivent donc chercher l’instauration d’un régime qui s’enracine dans un terrain entièrement différent. La proposition réfutée a le défaut de situer le libéralisme comme le contraire du socialisme. En réalité, comme l’affirme Léon XIII, le libéralisme est une des causes du socialisme, car, selon la tendance
    laïque et inorganique de notre époque, il est impossible de sortir d’un extrême sans tomber dans un autre. Examinons une société livrée au paganisme : Si l’autorité se montre libérale et condescendante, si les lois accordent une grande facilité de mouvement aux particuliers, le déchaînement alarmant des passions
    produit forcément l’anarchie. Le maintien de l’ordre exige alors une telle multiplicité de lois, de décrets, de règlements, un si grand nombre d’interventions publiques pour assurer la marche des innombrables fonctions de l’État, que le citoyen isolé, désarmé, terrorisé, devient en peu de temps un grain de poussière, un esclave inerte devant l’État Moloch.
      Les fondements de la vraie solution, opposée au libéralisme et au socialisme, se trouvent dans les paroles suivantes du souverain pontife : « L’État ne contient en soi, ni ne réunit mécaniquement en un territoire donné, une agglomération amorphe d’individus ; il est et doit être, dans la réalité, une unité organique et organisatrice d’un vrai peuple » (Message de Noël, 1948 [?] 1).
    1 — Nous n’avons pas trouvé ce texte dans le radiomessage de Noël 1948, qui dit seulement :
    « La doctrine catholique sur l’État et la société civile s’est toujours fondée sur le principe que selon la
    volonté divine les peuples forment ensemble une communauté ayant un but et des devoirs communs » Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1948, t. X, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de
    Saint-Augustin, 1950, p. 450. (NDLR.)

        *      *    *

    Directives
    Des directives au clergé accompagnaient la lettre pastorale et le Catéchisme des vérités opportunes de Mgr de Castro Mayer. Les voici :
    1. — Afin que votre action pour combattre ces erreurs soit plus complète, nous vous recommandons encore la plus grande précision de langage.

      Dans les écrits religieux contemporains destinés, le plus souvent, à être divulgués parmi le peuple fidèle, on lit certains mots qui
    La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
    The measure of love is to love without measure.
                                     St. Augustine (354 - 430 AD)

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  • Directives
    Des directives au clergé accompagnaient la lettre pastorale et le Catéchisme des vérités opportunes de Mgr de Castro Mayer. Les voici :
    1. — Afin que votre action pour combattre ces erreurs soit plus complète, nous vous recommandons encore la plus grande précision de langage.

      Dans les écrits religieux contemporains destinés, le plus souvent, à être divulgués parmi le peuple fidèle, on lit certains mots qui figureraient plus justement dans des ouvrages à caractère strictement technique et destinés aux spécialistes.
      Cependant ces termes passent, comme cela est naturel, des écrits à la prédication, aux conférences et aux réunions des associations religieuses, au point qu’ils deviennent parfois d’un usage courant dans certains milieux.
    Parmi ces termes, si quelques-uns sont excellents, d’autres réclament simplement qu’on leur donne un sens exact, et d’autres, enfin, sont inintelligibles.
      De tout cela, il résulte une assez grande confusion parmi le grand public dans lequel ils sont lancés. Citons-en quelques-uns : église pneumatique, vivre dans le pneuma, spiritualité transpsychologique, anthropocentrisme religieux, spiritualité christocentrique, vivre dans une très forte tension, vertucentrisme, moralisme,
    etc.…
    2. — En ce qui concerne la sainte messe, il convient toujours de souligner que la consécration en est la partie essentielle la plus importante ; que la messe, en tant que vrai sacrifice de la Loi nouvelle, a quatre fins : latreutique, eucharistique, propitiatoire et impétratoire, et que la communion est le moyen excellent
    de participation au saint sacrifice, de manière à exclure l’idée que l’assistance à la messe serait, à elle seule, plus importante que la communion sacramentelle.
    3. — En exposant la doctrine du Corps mystique, il convient d’éviter toute expression qui puisse conduire à une conception panthéiste.
    4. — En inculquant la dévotion au Père éternel, vous ne devez pas parler de Jésus-Christ exclusivement comme d’un simple médiateur. Une telle manière de procéder conduirait les fidèles à conclure que la seconde Personne de la très Sainte Trinité ne peut être l’objet de notre adoration, mais un simple intermédiaire entre nous et Dieu Notre-Seigneur. Il faut apporter à cela un soin tout spécial dans les régions où se propage plus intensément le spiritisme qui, comme vous le savez, chers coopérateurs, nie la divinité de Jésus-Christ.
    5. — Rappelons que, selon Mediator Dei, « répudier et rejeter les chants polyphoniques ou à plusieurs voix, même s’ils se conforment aux normes données par le Siège apostolique », est hors de « la voie droite » (AAS 39, page 545546 1). La même encyclique recommande le chant religieux populaire (ibid., page 590 2).

    1 — Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1947, t. IX, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de
    Saint-Augustin, 1961, p. 375.
    2 — « On ne saurait, toutefois, exclure totalement du culte catholique la musique et le chant modernes, […] pourvu qu’ils n’aient rien de profane et d’inconvenant… Nous vous exhortons encore,
    vénérables frères, à prendre soin de promouvoir le chant religieux populaire et sa parfaite exécution »
    (ibid., p. 417-418). La même encyclique cependant, demande qu’on conserve et cultive le chant
    grégorien « que l’Église prescrit absolument en certaines parties de la liturgie [cf. saint Pie X, lettre
    apost. Tra le sollecitudini] ». (NDLR.)

    6. — Sur l’usage du latin dans la liturgie sacrée, soyez attentifs, très chers coopérateurs, à ce que dit sagement le pape Pie XII dans la même encyclique Mediator Dei : « L’emploi de la langue latine, en usage dans une grande partie de l’Église, est un signe d’unité manifeste et éclatant, et une protection efficace contre toute corruption de la doctrine originale » (AAS 39, page 545 1).
    1 — Ibid., p. 374.

    7. — Ne perdez jamais l’occasion d’enseigner une véritable dévotion envers le pape et, à un degré moindre, envers l’évêque diocésain.
      Sur ce point, il est nécessaire d’éviter certaine tendance qui, dans le but louable de resserrer les liens de charité entre les brebis et le pasteur local, présente l’évêque sous un jour tel qu’elle lui confère une sorte d’infaillibilité jusqu’à en faire presque l’égal du Saint-Père, qui, selon cette conception, ne serait qu’un simple censeur des évêques. Enseignez donc, au sujet des relations entre le pape et les évêques, la doctrine exacte.
      Notre-Seigneur Jésus-Christ a institué dans l’Église une seule hiérarchie de gouvernement, formée de deux degrés harmonieux : le pape et, subordonnés à lui, les évêques (can. 108, 3e). L’unité de cette hiérarchie est une notion indispensable pour que le fidèle sache comment se placer en face d’elle. En la voyant comme un seul tout, ayant, à son sommet, le souverain pontife, source de toute juridiction dans l’Église, et en considérant dans une même perspective les évêques et le pape, le fidèle témoignera à tous le respect, la vénération et l’amour qu’il leur doit.
      Dans cette perspective, il convient de rappeler que la plénitude du pouvoir appartient au pontife romain, qui a juridiction directe et immédiate sur les évêques et les fidèles. La juridiction des évêques, successeurs des apôtres,
    s’exerce en harmonie avec la juridiction pontificale et sous sa dépendance.
      Tel est le cadre naturel de l’Église. Vouloir inculquer une dévotion envers le pape qui soit une chose entièrement différente et même opposée à la dévotion envers l’évêque, et, inversement, prétendre inculquer une dévotion envers l’évêque qui soit différente et même opposée à la dévotion envers le pape, serait nier implicitement l’unité harmonieuse de la hiérarchie. Aimons avec une extrême charité et dévotion le pape et l’évêque, chacun selon son rang et dans la mesure des pouvoirs que leur a conférés Notre-Seigneur Jésus-Christ.
      Le fidèle le plus dévoué envers son évêque – et tout catholique doit l’être – n’aura aucune crainte à se montrer très respectueux envers l’autorité suprême du pontife romain dans toute l’étendue qui lui a été conférée par le divin fondateur de l’Église.
    8. — Sur le magistère ecclésiastique, enseignez que le magistère pontifical étant infaillible et celui de chaque évêque, officiel mais faillible, il est dans l’ordre de la fragilité humaine qu’un évêque ou l’autre vienne à tomber dans l’erreur.
      L’histoire enregistre de telles éventualités. Elles engendrent de soi, comme on le pense, les conséquences les plus dangereuses. Malgré cela, il ne faut pas manquer d’enseigner aux fidèles comment ils doivent agir dans de telles circonstances. Dans des cas aussi douloureux, le premier devoir du fidèle consiste à conserver tout le respect dû à la personne sacrée du pasteur qui lui fut donné par la Providence et à exécuter fidèlement ses ordres dans tout ce qui ne met pas obstacle à la fidélité directe et plus élevée qu’il doit au Vicaire du Christ.
    9. — Inculquez aussi la vénération pour le célibat ecclésiastique, qui constitue une des plus primordiales gloires de la pensée catholique et de l’Église latine.
    10. — Pour traiter des relations entre la théologie et la philosophie, n’adoptez jamais un langage qui nie explicitement ou implicitement le principe selon lequel la philosophie est un auxiliaire de la théologie. Montrez que la véritable sagesse est dans la Révélation, don miséricordieux de Dieu, pour illuminer les âmes et les acheminer vers le salut.
      Ne perdez pas l’occasion d’inculquer l’admiration pour la philosophie scolastique en évitant l’attitude d’indifférence envers cette philosophie par rapport aux autres. De même, ne consentez pas à la montrer comme dépassée par les nouveaux courants de la pensée moderne ou des nouvelles écoles apologétiques.
    11. — Que tout le langage des catholiques soit surnaturel. N’ayons pas crainte d’affirmer à tout moment que nous croyons à la Révélation, à la grâce et à la divinité de l’Église. La foi est le plus grand don de Dieu. Elle nous affermit
    dans les connaissances les plus nécessaires à l’élévation de notre nature et à l’orientation de notre action, ainsi qu’à l’acheminement de notre âme vers son destin éternel.
      Il serait lamentable que, pour ne pas déplaire au monde, nous manifestions de la crainte à affirmer notre foi. Nous donnerions l’impression qu’elle n’est pas solide et, qu’à nos yeux, toutes les religions sont égales.
    12. — De même, rejetons un système d’apologétique qui prétend faire appel aux seuls arguments de la raison et se contente de conduire les âmes vers une religion purement naturelle, dans l’attente que les irrémédiables insuffisances de la religion naturelle inciteront les âmes à trouver d’elles-mêmes la Révélation.
    13. — Une égale prudence de langage est recommandée pour tout ce qui touche aux problèmes sociaux. Nous ne devons pas paraître soldats d’une autre cause que la nôtre, ni donner l’impression d’une action unilatérale, incompatible avec la sainteté de notre mission. Surtout, ne flattons pas la grande puissance du
    jour, qui est la multitude, en lui donnant l’idée que nous nous associons au progrès révolutionnaire qui est en train de parvenir, par le communisme, à la dernière étape de la destruction du monde occidental. Nous entendons partout affirmer que l’Église est révolutionnaire et que, si elle ne découvre pas entièrement ses positions, c’est parce qu’elle a encore besoin des riches pour construire des églises. Il est facile de percevoir ce qu’il y a d’opportunisme, de naturalisme dégradant et de profonde corruption doctrinale dans cette phrase. Ce n’est pas pour le service de « Mammon » que l’Église lutte contre la démagogie et le socialisme.
    Mais elle est, beaucoup moins encore, l’esclave de la multitude. Nous sommes le Corps mystique du Christ, qui est incommensurablement au-dessus de tout cela et qui lutte pour instaurer sur la terre le règne de la justice et de la charité sans acception de personnes.
    14. — Une précaution plus grande encore est recommandée dans la formation de la pureté et dans l’explication des devoirs conjugaux. La morale catholique, de même que toutes les pratiques traditionnellement suivies dans l’Église, garantit parfaitement, dans le traitement de ces sujets délicats, toutes les convenances de la vertu. Dans l’atmosphère de corruption croissante, il convient que nous nous attachions avec une ferveur redoublée aux principes et traditions qui sont les nôtres. Nous devons éviter, non seulement ce qui est néfaste à notre
    avancement, mais aussi toute attitude qui puisse exprimer une approbation, de notre part, de cette atmosphère sensuelle du monde moderne.
      La pureté suppose, pour être pleinement pratiquée et de manière durable, toute une ambiance de dignité, de gravité et de retenue. Il est inutile d’imaginer que cette vertu puisse exister dans des groupes où l’on n’évite pas soigneusement non seulement le péché, mais tout ce qui peut être qualifié de souffle du mal. Aussi, que les fidèles n’admettent pas dans leur entourage les badinages et expressions plus ou moins équivoques, les chansons carnavalesques, les termes d’argot dont la trivialité excessive n’est pas en harmonie avec la dignité qui doit
    régner dans les milieux catholiques.
    15. — Dans l’étude des problèmes touchant à l’action actuelle de l’Église, que nos chers coopérateurs se montrent réalistes sans cependant pactiser avec l’esprit de nouveauté qui attaque tout ce qui est ancien pour le fait d’être ancien, qui tend à louer tout ce qui est nouveau pour le seul fait d’être nouveau et ainsi se sépare du véritable esprit traditionnel de la sainte Église, comme le montre la lettre de la sacrée congrégation des Séminaires à l’épiscopat brésilien : « L’esprit de nouveauté ne laissera jamais de critiquer rien de ce qui, même avec des
    avantages évidents, a été pratiqué jusqu’à aujourd’hui. On profite de n’importe quel abus, ou de quelque exagération dans les coutumes traditionnelles et dans les méthodes d’apostolat, pour ridiculiser et traiter hostilement le tout, pris dans son ensemble » (AAS 42, page 840 1).
    1 — Lettre de la S. C. des Séminaires à l’épiscopat du Brésil (7 mars 1950) ; Docuмents pontificaux de S.S. Pie XII, année 1950, t. XII, Saint-Maurice, éd. de l’Œuvre de Saint-Augustin, 1952, p. 74.

      *        *      *
    Chers fils et bien-aimés coopérateurs, il est très important pour le prêtre
    d’instruire. Mais que vaut l’instruction si elle n’est accompagnée d’amour ?

    Malheur à la science – s’exclamait Bossuet – qui ne se transforme pas en amour
    et en action !
      Connaître Dieu et sa sainte Église est une condition normale de salut. Mais il ne suffit pas de connaître Dieu, il faut l’adorer ; il ne suffit pas de connaître la doctrine de la sainte Église, il faut l’aimer d’un amour enthousiaste et extrême, reflet limpide et ardent de l’amour que nous devons à Dieu.
        En exposant à vos paroissiens les erreurs que nous avons signalées, exposez-leur surtout les vérités qui s’opposent à ces erreurs. Formez-les de manière à ce qu’ils ne s’en tiennent pas à la connaissance, mais qu’ils parviennent aussi à l’amour. En d’autres termes, infusez dans leurs âmes cet amour ardent de l’orthodoxie, cet attachement à la cause catholique, dont vous êtes naturellement, en tant que prêtres, les exemples vivants et édifiants.
      Cette vertu du sens catholique, vous devez la demander pour vos paroissiens, comme Nous-même Nous la demandons pour Nous et pour tous nos diocésains, dans une prière indigne mais incessante. Enseignez-leur aussi à la demander pour eux-mêmes. Et pour que nos prières, les vôtres, bien-aimés fils et chers coopérateurs, et celles de tous nos chers diocésains soient agréées par Dieu, en concluant cette lettre, tournons nos regards, humblement, vers le SacréCœur de Jésus, abîme de toutes les vertus, fournaise de charité, centre et modèle
    de tous les cœurs. Puisse la tiédeur de nos âmes se transformer en zèle ardent au contact des flammes qui jaillissent du divin Cœur. Puissent nos fautes, nos misères, nos indignités, attirer sur nous la miséricorde de ce divin Cœur, qui est un abîme de charité. Puissent les grâces dont ce divin Cœur est la source, couler dans toute leur plénitude sur nous, pour illuminer nos intelligences, fortifier nos volontés, afin que nous parvenions, dans toute la mesure qui nous a été destinée, à cette sainteté qui est le désir suprême de nos âmes.
        Pour que ceci se réalise et que nous recevions la pleine effusion des grâces du Cœur de Jésus, approchons-nous du Cœur Immaculé de Marie, canal nécessaire par lequel nos prières vont au Cœur de Jésus et par lequel les grâces descendent du divin Cœur jusqu’à nous. Le Cœur Immaculé de Marie s’est manifesté de nos jours aux bergers de Fatima pour nous demander de faire pénitence et nous promettre les grâces les plus choisies. Écoutons l’appel de ce Cœur maternel et, confiants dans son intercession, travaillons, chers fils et bien-aimés coopérateurs, pour que s’instaure au plus tôt dans notre diocèse, le règne du SacréCœur. Les yeux fixés sur cet idéal, nous donnons à vous tous et à nos fils bienaimés, vos paroissiens, avec une affection paternelle, notre bénédiction pastorale.
    Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

    Donné et transmis en notre ville épiscopale de Campos, sous le sceau et le signe de nos armes, le 6 janvier 1953, en la fête de l’Épiphanie de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

    † Antoine, évêque de Campos.


    Mandement
    Le Nom du Seigneur invoqué, Nous demandons et déterminons que :
    1. le sujet de notre Lettre pastorale soit expliqué aux fidèles au cours de la messe dominicale ;
    2. le Catéchisme et ses Directives, qui font partie de notre Lettre pastorale, soient expliqués, par sections, dans les réunions des associations religieuses et d’apostolat, pour la formation catholique des membres de ces associations ;
    3. la réception et le sujet de cette Lettre pastorale soient enregistrés dans le livre du Tombo et qu’un exemplaire figure aux archives paroissiales ;

    Donné et transmis en notre ville épiscopale de Campos, sous le sceau et le signe de nos armes, le 6 janvier 1953, en la fête de l’Épiphanie de Notre-Seigneur Jésus-Christ.


    † Antoine, évêque de Campos.

    [Fin de la reproduction du Catéchisme des vérités opportunes
    qui s’opposent aux erreurs contemporaines.]

      ❋    ❋      ❋
    https://www.seldelaterre.fr/articles/sdt37/cat%C3%A9chisme-des-v%C3%A9rit%C3%A9s-opportunes

    et '' Cité  catholique''. 1962  {Verbe #103}


    La mesure de l'amour, c'est d'aimer sans mesure.
    The measure of love is to love without measure.
                                     St. Augustine (354 - 430 AD)